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sentier étroit et malaisé qui menait dans les montagnes. Deux arêtes sombres et dentelées se profilaient dans l’obscurité ; entre les deux s’étendait le défilé de l’Aigle où les chevaux attendaient. Avec un instinct qui n’était jamais mis en défaut, Jefferson Hope choisissait son chemin au milieu des blocs de rocher, ou dans le lit du torrent desséché, jusqu’à ce que son compagnon et lui eussent enfin atteint l’endroit retiré où, cachés par d’énormes pierres, les fidèles animaux avaient été attachés. La jeune fille fut placée sur la mule, le vieux Ferrier, toujours muni de son sac d’argent, enfourcha un des chevaux, tandis que Jefferson Hope prenait l’autre. Puis ils s’engagèrent tous les trois dans un étroit sentier qui longeait d’effrayants précipices.

Le spectacle était propre à glacer de terreur quiconque n’a pas l’habitude de l’aspect sauvage que la nature sait revêtir parfois. D’un côté s’élevait à plus de mille mètres un énorme rocher tout noir, tout morne, qui semblait menacer les alentours ; de longues rayures de basalte striaient sa surface rugueuse et lui donnaient ainsi l’aspect d’un monstre aux côtes proéminentes ; de l’autre côté un affreux chaos de rochers et de débris de toutes sortes obstruait une partie du défilé. Au milieu était tracée la piste, mais si étroite, si mauvaise, que non seulement on ne pouvait y passer qu’en file indienne, mais qu’encore des cavaliers expérimentés étaient seuls capables de