Page:Doyle - Le Capitaine Micah Clarke, trad. Savine, 1911.djvu/102

Cette page n’a pas encore été corrigée

degré par degré, mais un homme tel que Ruben frappe du talon un seul instant sur le bord, et l'instant d'après, il s'est lancé jusqu'aux oreilles dans l'endroit le plus profond.

Le ciel seul sait quelle mèche avait mis le feu à l'étoupe.

Tout ce que je puis dire, c'est que depuis ce jour, mon camarade était mélancolique et assombri une heure, puis gai, et plein d'entrain l'heure suivante.

Il n'avait plus rien de son flot constant de bonne humeur, il devenait aussi piteux qu'un poussin qui mue, chose qui m'a toujours paru un des plus singuliers résultats de ce que les poètes ont appelé le joyeux état de l'amour.

Mais, il faut le dire, en ce monde, joie et plaisir se touchent de si près, qu'on dirait qu'ils sont à l'attache dans des stalles contiguës, et qu'une ruade suffirait pour faire tomber la cloison qui les sépare.

Voici un homme aussi plein de soupirs qu'une grenade est bourrée de poudre.

Il fait triste figure; il a l'air abattu. Son esprit va à l'aventure et si vous lui faites remarquer qu'il est très malheureux dans cet état, il vous répondra, vous pouvez en être certain, qu'il ne l'échangerait pas pour les Puissances ni pour les Principautés du ciel.

Pour lui les larmes sont de l'or, et le rire n'est que de la fausse monnaie.