Page:Doyle - La Vallée de la peur.djvu/205

Cette page a été validée par deux contributeurs.

celui-ci une valeur exceptionnelle. Il se faisait l’effet d’un chasseur qui tient en laisse un limier de choix : le jour viendrait de le lâcher ; il avait sa meute pour le gibier ordinaire. Cependant quelques membres de la loge, et notamment Ted Baldwin, ne voyaient pas sans fureur et sans haine la rapide fortune de l’étranger. Mais ils l’évitaient, le sachant aussi prêt à combattre qu’à rire.

Par malheur, en même temps qu’il se poussait dans la faveur de ses camarades, Mac Murdo perdait du terrain sur un point où maintenant, il était encore plus engagé. Le père d’Ettie Shafter avait définitivement rompu avec lui et lui interdisait sa maison. Ettie elle-même, trop profondément éprise pour se ressaisir, n’envisageait pas sans terreur le mariage avec un homme qu’elle regardait comme un criminel. Un matin, après une nuit sans sommeil, elle résolut de le voir, peut-être pour la dernière fois, et de faire un vigoureux effort pour l’arracher à de trop funestes influences. Elle se rendit chez lui, comme il l’en avait souvent priée, et gagna tout droit sa chambre, où il se tenait d’habitude. Assis à une table, le dos tourné, il semblait écrire une lettre. Ettie n’avait que dix-neuf ans : une idée malencontreusement puérile lui traversa le cerveau. Mac Murdo ne l’avait pas entendue ouvrir la porte : elle s’avança sur la pointe des pieds et le toucha aux deux épaules.

Si elle pensait le surprendre, elle ne s’était