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comment ai-je pu… ?

— Cette amitié-là ne fait que rendre votre crime dix fois plus odieux, dit sévèrement l’inspecteur. Qu’on l’emmène pour le reste de la nuit au… Mais un instant… Qui est là ? »

La porte s’ouvrit brusquement et on vit entrer un homme, si hagard, si défait qu’il ressemblait plus à un fantôme qu’à un être humain.

Il marchait d’un pas si chancelant, qu’il dut s’appuyer sur le dossier des chaises pour s’approcher du bureau de l’inspecteur.

Il était malaisé de reconnaître, en cette créature d’aspect si malheureux, l’homme à mine réjouie et rubiconde qu’était le sous-curateur du musée, le privat-docent, M. Wilhelm Schlessinger. Mais le coup d’œil exercé de Baumgarten n’était pas de ceux qu’on peut décevoir par un changement quelconque.

« Bonjour, monsieur, dit-il, vous voilà ici de bonne heure. C’est sans doute parce que vous avez appris qu’un de vos étudiants, Von Schlegel, est arrêté pour tentative d’assassinat contre la vie de Léopold Strauss ?

— Non, je suis venu pour moi-même, dit Schlessinger d’une voix rauque et en portant la main à sa gorge. Je suis venu pour soulager mon âme d’une grande faute, et pourtant Dieu sait combien elle est involontaire… C’est moi qui… Mais, grand Dieu, la voilà, l’horrible chose ; Au ! si le ciel avait fait que je ne l’aie jamais vue ? »

Et il recula saisi d’un redoublement d’épouvante en regardant, les yeux largement ouverts, la hachette qui gisait sur le parquet. Et la montrant de son doigt émacié :

« La voilà, cria-t-il, regardez-la ! Elle est