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jim harrison, boxeur

Rien d’étonnant à ce qu’il y eut, au fond du cœur des plus braves, une crainte de la puissance française, et cette animosité a toujours pour résultat d’engendrer une haine amère et pleine de rancune.

Alors les marins parlèrent sans bienveillance de leurs récents ennemis.

Ils les haïssaient sincèrement et selon l’usage de notre pays, ils disaient tout haut ce qu’ils avaient sur le cœur.

En ce qui concernait les officiers français, il était impossible d’en parler d’une façon plus chevaleresque, mais quant à la nation, ils l’avaient en horreur.

Les vieux avaient combattu contre eux dans la guerre d’Amérique, combattu encore pendant ces dix dernières années, et on eût dit que le désir le plus ardent qu’ils eussent dans le cœur était de passer le reste de leur vie à combattre encore contre eux.

Mais si j’étais surpris de la violente animosité qu’ils témoignaient à l’égard des Français, je ne l’étais pas moins de voir à quel degré ils les appréciaient.

La longue série des victoires anglaises avait fini par obliger les Français à s’abriter dans les ports, à renoncer avec désespoir à la lutte et cela nous avait fait croire à tous que, pour une raison ou une autre et par la nature même des choses, l’Anglais sur mer avait toujours le dessus contre le Français.

Mais ceux qui avaient participé à la lutte n’étaient nullement de cet avis.

Ils se répandaient en bruyants éloges sur la vaillance de leurs adversaires et ils expliquaient leur défaite par des raisons précises.

Ils rappelaient que les officiers de l’ancienne marine française étaient presque tous des aristocrates, que la Révolution les avait chassés de leurs vaisseaux et