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jim harrison, boxeur

sait d’une certaine considération, car elle avait pour frère aîné le fameux Sir Charles Tregellis, et celui-ci, ayant hérité d’un opulent marchand des Indes Orientales, finit par devenir le sujet des conversations de la ville et l’ami tout particulier du Prince de Galles.

J’aurai à parler plus longuement de lui par la suite, mais vous vous souviendrez dès maintenant qu’il était mon oncle et le frère de ma mère.

Je puis me la représenter pendant tout le cours de sa belle existence, car elle était toute jeune quand elle se maria.

Elle n’était guère plus âgée quand je la revois dans mon souvenir avec ses doigts actifs et sa douce voix.

Elle m’apparaît comme une charmante femme aux doux yeux de tourterelle, de taille assez petite, il est vrai, mais se redressant quand même bravement.

Dans mes souvenirs de ce temps-là, je la vois constamment vêtue de je ne sais quelle étoffe de pourpre à reflets changeants, avec un foulard blanc autour de son long cou blanc, je vois aller et venir ses doigts agiles pendant qu’elle tricote.

Je la revois encore dans les années du milieu de sa vie, douce, aimante, calculant des combinaisons, prenant des arrangements, les menant à bonne fin, avec les quelques shillings par jour de solde d’un lieutenant, et réussissant à faire marcher le ménage du cottage du Friar’s Oak et à tenir bonne figure dans le monde.

Et maintenant, je n’ai qu’à m’avancer dans le salon, pour la revoir encore, après quatre-vingts ans d’une existence de sainte, en cheveux d’un blanc d’argent, avec sa figure placide, son bonnet coquettement enrubanné, ses lunettes à monture d’or, son épais châle de laine bordé de bleu.

Je l’aimais en sa jeunesse, je l’aime en sa vieillesse