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jim harrison, boxeur

C’était là, dans la cité de Londres, que se trouvait la racine principale qui avait donné naissance à l’Empire, à sa fortune au magnifique épanouissement.

La mode peut changer, ainsi que le langage et les mœurs, mais l’esprit d’entreprise que recèle cet espace d’un mille ou deux en carré ne saurait changer, car s’il se flétrit, tout ce qui en est issu est condamné à se flétrir également.

Nous lunchâmes chez Stephen, l’auberge à la mode, dans Bond Street, où je vis une file de tilburys et de chevaux de selle qui s’allongeait depuis la porte jusqu’au bout de la rue.

De là nous allâmes au Mail, dans le parc de Saint-James, puis chez Brookes où était le grand club whig, et enfin on retourna chez Wattier où se donnaient rendez-vous pour jouer les gens à la mode.

Partout, je vis les mêmes types d’hommes à tournures raides, aux petits gilets.

Tous témoignaient la plus grande déférence à mon oncle et, pour lui être agréable, m’accueillaient avec une bienveillante tolérance.

Les propos étaient toujours dans le genre de ceux que j’avais déjà entendus au Pavillon. On s’entretenait de politique, de la santé du roi. On causait de l’extravagance du Prince, de la guerre, qui paraissait prête à éclater de nouveau, des courses de chevaux et du ring.

Je m’aperçus ainsi que l’excentricité était là aussi à la mode, comme me l’avait dit mon oncle, et si les continentaux nous regardent encore aujourd’hui comme une nation de toqués, c’est sans doute une tradition qui remonte à l’époque où les seuls voyageurs qu’il leur arrivât de voir appartenaient à la classe avec laquelle je me trouvais alors en contact.