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tenir ma plume, tant j’en suis honteux. Mon bouton, — que le diable l’emporte ! — mon bouton qui ne tenait plus qu’à un fil, s’arracha tout à coup, sauta (je l’avais évidemment frôlé par mégarde), roula avec bruit et alla s’arrêter, le maudit ! aux pieds de Son Excellence. Et cela au milieu d’un silence général ! C’était là toute ma justification, mon excuse, ma réponse, tout ce que je voulais dire à Son Excellence ! Les conséquences furent terribles ! L’attention de Son Excellence se porta aussitôt sur ma figure et mon costume. Je me rappelai ce que j’avais vu dans le miroir. Je me précipitai pour rattraper mon bouton ! L’affolement s’était emparé de moi ! Je me baissai, je voulus saisir le bouton, mais il roulait, roulait, si bien que cela me fut impossible ; en un mot, je me distinguai sous le rapport de l’adresse. Je sentis alors que mes dernières forces m’abandonnaient, que tout, tout était perdu ! C’était fait de ma réputation, j’étais un homme flambé ! Et, de but en blanc, à mes deux oreilles carillonnaient tour à tour Thérèse et Faldoni. Enfin je rattrapai mon bouton, je me levai, je me redressai et, en imbécile que j’étais, j’aurais dû rester tranquille, et mettre les mains sur la couture