mon sang se glace, je cache mon visage dans mes mains, j’ai peur de regarder. Encore une clameur, toute proche les ouvriers reviennent de la fabrique. Je me penche à la fenêtre, je vois mon père porté sur une civière, mort, j’entends qu’ils disent entre eux « Il a fait un faux pas. Il est tombé de l’échelle dans la cave chauffée à blanc, c’est le diable qui t’y a poussé. » Je me jette sur mon lit et j’attends, toute roide, sans savoir qui ni quoi j’attends. Combien de temps restai-je ainsi ? Je ne m’en souviens plus. Je sais seulement que je me sentais comme balancée, la tête lourde ; la fumée me piquait les yeux, et j’étais heureuse de penser que j’allais bientôt mourir. Tout à coup je sens qu’on me soulève par les épaules, je regarde autant que la fumée me le permet lui ! lui tout brûlé, son cafetan plein de cendres !
— Je viens te chercher, belle fille. Sauve-moi, puisque c’est toi qui m’as perdu. Je me suis damné pour toi ! Car comment jamais expier cette nuit maudite ?… Peut-être, si nous priions ensemble.
Et il riait, l’homme épouvantable !
— Montre-moi par ou il faut sortir pour éviter les gens.