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les poteaux, plâtrer, badigeonner, réparer tout ce qui se voyait et sautait aux yeux. Nos détenus comprenaient parfaitement le but de ce travail, et leurs discussions s’animaient toujours plus ardentes et plus fougueuses. Leur fantaisie ne connaissait plus de limites. Ils s’apprêtaient même à manifester des exigences quand le général arriverait, ce qui ne les empêchait nullement de s’injurier et de se quereller. Notre major était sur des charbons ardents, Il venait continuellement visiter la maison de force, criait et se jetait encore plus souvent qu’à l’ordinaire sur les gens, les envoyait pour un rien au corps de garde attendre une punition et veillait sévèrement à la propreté et à la bonne tenue des casernes, À ce moment arriva une petite histoire, qui n’émut pas le moins du monde cet officier, comme on aurait pu s’y attendre, qui lui causa, au contraire, une vive satisfaction. Un forçat en frappa un autre avec une allène en pleine poitrine, presque droit au cœur.

Le délinquant s’appelait Lomof ; la victime portait dans notre maison de force le nom de Gavrilka : c’était un des vagabonds endurcis dont j’ai parlé plus haut ; je ne sais pas s’il avait un autre nom, je ne lui en ai jamais connu d’autre que celui de Gavrilka.

Lomof avait été un paysan aisé du gouvernement de T… district de K… Ils étaient cinq, qui vivaient ensemble : les deux frères Lomof et trois fils. C’étaient de riches paysans, on disait dans tout le gouvernement qu’ils avaient plus de trois cent mille roubles assignats. Ils labouraient et corroyaient des peaux, mais s’occupaient surtout d’usure, de receler les vagabonds et les objets volés, enfin d’un tas de jolies choses. La moitié des paysans du district leur devait de l’argent et se trouvait ainsi entre leurs grilles. Ils passaient pour être intelligents et rusés, ils prenaient de très-grands airs. Un grand personnage de leur contrée s’étant arrêté chez le père, ce fonctionnaire l’avait pris en affection à cause de sa hardiesse et de sa rouerie. Ils s’imaginèrent