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I

Chapitre II. La Nuit (suite).

Il suivit toute la rue de l’Épiphanie et atteignit enfin le bas de la montagne. Il trottait dans la boue, soudain s’offrit à lui comme un espace large et vide, à demi caché par le brouillard, — c’était la rivière. Les maisons n’étaient plus que des masures, la rue faisait mille tours et détours parmi lesquels il était difficile de se reconnaître. Néanmoins Nicolas Vsévolodovitch trouvait son chemin sans presque y songer. De tout autres pensées l’occupaient, et il ne fut pas peu surpris quand, sortant de sa rêverie et levant les yeux, il se vit tout à coup au milieu du pont. Pas une âme ne se montrait aux alentours. Grand fut donc l’étonnement de Stavroguine lorsqu’il s’entendit interpeller avec une familiarité polie par une voix qui semblait venir de dessous son coude. La voix, assez agréable du reste, avait ces inflexions douces qu’affectent chez nous les bourgeois trop civilisés et les élégants commis de magasin.

— Voulez-vous me permettre, monsieur, de profiter de votre parapluie ?

En effet, une forme humaine se glissait ou faisait semblant de se glisser sous le parapluie de Nicolas Vsévolodovitch. Celui-ci ralentit le pas et se pencha pour exam