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voulais tout expier, et elle a refusé… Je l’aime pour cela ! je l’aime pour cela !

Les yeux de Katia brillaient de colère.

— Mon frère n’avait pas prévu cela, murmura Alioscha. Il était si sûr qu’elle ne viendrait pas…

— Sans doute, laissons… Adieu, je vous en prie…

III

Deux semaines s’étaient écoulées ; le départ des condamnés était fixé pour le matin de ce jour. Ivan Fédorovitcli, encore malade, ne pouvait rien pour son frère. Katherina Ivanovna, inquiète, toujours partagée entre ses deux amours pour ces deux êtres si différents et si semblables, Ivan, Dmitri, cet esprit et ce cœur, mais ces deux sensuels, ces deux Karamazov, — ne savait que faire. Quitter Ivan, malade, et qui avait besoin de soins dévoués, elle ne pouvait s’y résoudre. Mais la pensée d’abandonner Mitia, de le laisser entrer, comme avait dit Alioscha, dans les ténèbres, subir son injuste condamnation, agoniser de la mort lente des bagnes sibériens, cette pensée lui était insupportable.

— Alexey Fédorovitch, disait-elle à Alioscha qu’elle avait mandé deux heures avant le départ du convoi, que faire ? Je n’ai d’espoir qu’en vous ; il me semble que vous trouverez les moyens de nous sauver tous ; parlez, dites, que faire ? Lequel des deux faut-il abandonner ? car il faut choisir ! ajouta-t-elle en se tordant les mains.