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un autre reptile… S’il n’y avait pas de parricide, il n’y aurait pas de spectacle… Le spectacle ! Panem et circenses ! Eh ! je suis joli aussi, moi ! Avez-vous de l’eau ? donnezmoi de l’eau au nom du Christ ! dit-il en étreignant tout à coup sa tête.

L’huissier s’approcha de lui aussitôt.

Alioscha se leva et cria :

— Il est malade ! ne le croyez pas ! il a la fièvre chaude !

Katherina Ivanovana se leva à son tour, blême de terreur et considérant Ivan Fédorovitch. Mitia le regardait avec un sourire qui le défigurait.

— Tranquillisez-vous ! je ne suis pas un fou, reprit Ivan, je ne suis qu’un assassin. On ne peut exiger d’un assassin l’éloquence… dit-il en riant.

Le procureur, visiblement agité, se pencha vers le président. Les juges chuchotaient entre eux. Fétioukovitch dressa l’oreille. La salle était anxieuse.

— Témoin, votre langage est incompréhensible et vous tenez des discours qui ne sont pas de mise ici. Tâchez de vous contenir, et parlez si vous avez quelque chose à nous dire. Par quoi pouvez-vous confirmer votre aveu, si ce n’est pas un effet du délire ?

— Mais je n’ai pas de témoin ! Ce chien de Smerdiakov ne reviendra pas de l’autre monde pour faire sa déposition… dans une enveloppe. Vous voudriez toujours des enveloppes ! Vous en avez assez d’une. Je n’ai pas de témoins, sauf un seul… peut-être, dit-il, d’un air réfléchi.

— Qui donc ?

— Il a une grande queue. Votre Excellence : cela n’est point prévu par la procédure. Le diable n’existe point.