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— Attendez ! cria tout à coup le jeune homme, — regardez : voyez-vous comme la porte résiste quand on tire ?

— Eh bien ?

— Cela prouve qu’elle est fermée non à la clef, mais au verrou ! Entendez-vous comme il résonne ?

— Eh bien ?

— Mais comment donc ne comprenez-vous pas ? C’est la preuve que l’une d’elles est à la maison. Si toutes deux étaient sorties, elles auraient fermé la porte en dehors, à la clef, et n’auraient pas tiré le verrou intérieurement. Tenez, entendez-vous le bruit qu’il fait ? Or, pour s’enfermer au verrou, il faut être chez soi, comprenez-vous ? Donc elles sont chez elles, seulement elles n’ouvrent pas !

— Bah ! mais oui, au fait ! s’écria Koch étonné. — Ainsi elles sont là !

Et il se mit à ébranler furieusement la porte.

— Attendez ! reprit le jeune homme, — ne tirez pas comme cela. Il y a ici quelque chose de louche… Vous avez sonné, vous avez tiré de toutes vos forces sur la porte, — elles n’ouvrent pas ; donc, ou toutes deux sont évanouies, ou…

— Quoi ?

— Voici ce qu’il y a à faire : faisons monter le dvornik pour qu’il les réveille lui-même.

— C’est une idée !

Tous deux se mirent en devoir de descendre.

— Attendez ! Restez ici ; moi, j’irai chercher le dvornik.

— Pourquoi rester ?

— Mais qui sait ce qui peut arriver ?

— Soit…

— Voyez-vous, je me prépare à être juge d’instruction ! Il y a ici quelque chose qui n’est pas clair, cela est évident, é-vi-dent ! fit avec chaleur le jeune homme, et il descendit quatre à quatre les marches de l’escalier.