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m’offrez-vous ? En chrétien que je suis, je vous pardonnerai et j’irai même jusqu’à vous aimer ; mais, homme de cœur, pourrai-je contenir mon mépris ? La morale m’interdit d’agir autrement, car, je vous le répète, vous vous êtes déshonoré tandis que je me conduisais avec noblesse. Montrez-moi celui des vôtres qui serait capable d’un acte pareil ? Qui d’entre eux refuserait cette grosse somme qu’a pourtant repoussée le misérable Foma, ce Foma honni, par simple penchant à la grandeur d’âme ? Non, colonel, pour vous égaler à moi, il vous faudrait désormais une longue suite d’exploits. Mais de quel exploit peut-être capable celui qui ne peut me dire vous, comme à son égal, qui me tutoie, comme un domestique ?

— Mais, Foma, je ne te tutoyais que par amitié ! Je ne savais pas que cela te fût désagréable… Mon Dieu, si j’avais pu le savoir !

— Vous, continua-t-il, qui n’avez pu, ou plutôt qui n’avez pas voulu consentir à une de mes plus insignifiantes demandes, à l’une des plus futiles, alors que je vous priais de me dire : « Votre Excellence ! »

— Mais, Foma, c’était un véritable attentat à la hiérarchie…

— C’est une phrase que vous avez apprise par