Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/188

Cette page a été validée par deux contributeurs.

suis brutal, sans éducation ; je suis capable de lâcher quelque mot que je serai le premier à regretter. Il n’en demeure pas moins qu’il m’a fait beaucoup de bien… Va-t-en, mon ami… Voilà qu’on l’amène ; on l’amène ! Sérioja, sors, je t’en supplie… Je te raconterai tout. Sors, au nom du Christ !

Et mon oncle me conduisit vers la terrasse au moment même où Foma faisait son entrée. Je dois confesser que je ne m’en allai pas. Je décidai de rester où j’étais. Il y faisait noir et, par conséquent, on ne pouvait me voir. Je résolus d’écouter !

Je ne cherche pas à excuser mon action, mais je dis hautement que ce fut un exploit de martyr, quand je pense que je pus écouter des choses pareilles pendant toute une grande demi-heure sans perdre patience. J’étais placé de manière non seulement à fort bien voir, mais aussi à bien entendre.

À présent, imaginez-vous un Foma à qui l’on a ordonné de venir sous peine de voir employer la force en cas de refus.

— Sont-ce bien mes oreilles qui ont entendu une telle menace, colonel ? larmoya-t-il en entrant. Est-ce bien votre ordre que l’on m’a transmis ?

— Parfaitement, ce son tes oreilles, Foma ;