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une partie d’entre eux emmena dans leur pays ces petits prisonniers et le reste nous vint faire la guerre en cette Isle, où ils firent plusieurs attaques et entrèrent en plusieurs pourparlers avec le sieur de la Barique que l’on portait toujours sur les lieux afin de leur parler, cet homme ne put jamais réduire à la raison ces animaux féroces : toujours ils tendirent à faire quelque méchant coup, il est vrai que Dieu nous assista bien, puisque pendant qu’ils furent ici à nous faire des embuscades, jamais ils ne nous tuèrent qu’un homme nommé d’Aubigeon. Peu après ce meurtre, ils en furent bien châtiés, car ils tombèrent à notre discrétion, ce qu’ils firent ainsi. Ce meurtre étant commis, ils passèrent de l’autre côté du fleuve et envoyèrent ensuite quelques uns d’entre eux, feignant vouloir parlementer et être de ces nations qui n’avaient jamais eu de démêlés avec nous, feinte dont ils ont usé en plusieurs de leurs trahisons passées et qui leur était ordinaire, mais en même temps, M. Lemoine revenant de Québec dit à M. de Maison-Neufve : “ Voila des gens qui ont fait un tel coup à l’Isle aux Oies, qui ont tué d’Aubigeon et qui veulent encore nous trahir. Il faut les prendre, car ce sont des fourbes et des menteurs.” Afin de les attaquer, Mr. de Maison-Neufve leur fit crier que le lendemain, ils vinrent parlementer : cela dit, ils se retirent de l’autre côté de l’eau sans s’approcher plus près ; le lendemain venu, voici deux Iroquois qui paraissent dans un canot avec un petit Anglais au milieu, ils viennent un peu hors la portée du mousquet du château. Alors M. le Gouverneur voulut envoyer à eux plusieurs personnes, mais M. Lemoine l’en empêcha lui disant qu’ils s’enfuieraient et que s’il voulait, il irait tout seul à eux dans un petit canot de bois avec deux pistolets cachés au fond de son canot, que dans cet état, il irait aborder sur la même bature où ils étaient ; qu’étant seul de la sorte ils le laisseraient venir sans se défier, qu’étant sur eux, il se lèverait tout d’un coup avec ses pistolets, et qu’ayant pris le dessus, il leur ferait prendre malgré eux le courant qui vient vers le château ; quoique la proposition fut hardie, elle fut néanmoins acceptée, mais pour en faciliter l’exécution, M. le Gouverneur fit glisser des mousquetaires le long de l’eau jusque vis-à-vis les Iroquois, lesquels étaient assez proches de terre, ces mousquetaires ne se montrèrent que quand il fut temps, ce qui aida à bien réussir ainsi qu’on l’avait projetté. Ces Iroquois étant logés, comme ils étaient considérables, un de leurs capitaines nommé La Plume parut aussitôt avec menace qu’il se vengerait si on ne lui rendait ses gens. On lui dit que ses gens étaient bien et qu’il les pouvait venir voir, mais à ces paroles en menaçant, il répondit qu’il y viendrait d’une autre manière, sur quoi il se retira de l’autre côté