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Rémi, (avec emphase)

Et puis l’dimanche, mam’ Lefèvre, j’irais avec ma p’tite femme à la barrière, au salon d’flore, manger la fine gibelotte de lapin, avec une bonne bouteille de vin à seize, sans compter l’gros radis noir par dessus l’marché !… Oh ! oui, que j’la rendrais heureuse !… T’nez mam’ Lefèvre vous savez qu’aux trois journées de 1830, je m’suis conduit en brave citoyen, qu’j’ai même reçu la croix d’juillet et la commission des récompenses nationales a pris mon nom ?… Eh ben, j’y suis pas même allé à c’te commission, j’ai tout laissé ça là, y a c’pendant du temps d’écoulé, mais, bouth ! des récompenses, j’aime ben mieux rester auprès d’la bourgeoise au moins, quoiqu’y parle jamais, si j’la vois pleurer, j’cours à la boutique et j’y pleure aussi.

Mad. Lefèvre

C’est bien, ça ? mon p’tit Rémi, mais tu n’peux c’pendant pas épouser une femme mariée ?

Rémi.

Eh ben… ben non, Mam’ Lefèvre, j’sais ben… Mais si le divorce prenait ?… Si le bourgeois venait à quitter sa femme ?… Enfin, mam’ Lefèvre… on sait pas… mais si ça arrivait, hein ?… Dites donc ?… Oh ! j’vous en prie, mam’ Lefèvre, parlez y d’moi à mam’ Thérèse !… J’vous l’dis, elle ne s’rait plus malheureuse !… Oh ! non, oh ! non !

Mad. Lefèvre

J’te crois bien, mon bon p’tit Rémi, tu peux croire que si c’te gueuse de loi vient à sortir, je penserai à toi, mais il vaudrait encore mieux que ce malheureux Guillaume reprenne une conduite régulière… Ah ! Dieu de Dieu, si M. Lefèvre m’en faisait la dixième partie seulement !