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l’interlocuteur s’était retiré, il ne relisait même pas ce qu’il avait écrit, la faiblesse de sa vue ne lui permettant pas de lire, ainsi que je l’ai dit plus haut ; il continuait à partir du dernier mot, comme s’il n’eût tenu aucun compte du temps écoulé pendant toute la durée de la conversation. Il s’entretenait donc en même temps et avec lui-même et avec les autres. Sa pensée continuellement réfléchie sur lui-même ne se détendait jamais, excepté pendant le sommeil ; et encore son sommeil était-il abrégé par son excessive frugalité (puisque souvent il ne mangeait même pas de pain) et par cette réflexion continuelle sur sa propre intelligence.

IX.

Des femmes comptèrent aussi au nombre de ses disciples les plus fervents, entre autres Gémina, dans la maison de laquelle il habitait, et sa fille, appelée également Gémina. Amphiclia, fille d’Ariston et femme du fils d’Iamblique, ne se fit pas moins remarquer par son ardeur pour la philosophie.

Beaucoup d’hommes et de femmes des plus illustres familles lui confiaient en mourant leurs enfants de l’un et l’autre sexe, ainsi que leurs biens, comme à un gardien sacré et en quelque sorte divin. Aussi sa maison était-elle remplie de jeunes gens et de jeunes filles. De ce nombre était Potamon, dont Plotin surveillait l’éducation, et qu’il écoutait avec bienveillance, malgré la versatilité de sa pensée. Il se prêtait volontiers à entendre les administrateurs des biens de tous ses pupilles, lorsqu’ils venaient rendre leurs comptes, et même il surveillait sévèrement leur gestion, en disant qu’aussi longtemps que ces jeunes gens ne se seraient pas voués à la philosophie, leurs biens et leurs revenus devaient leur être conservés intacts. Et pourtant,