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s’établissent entre les objets extérieurs et nous-mêmes. Ainsi, il faut admettre que quelque chose passe des objets extérieurs en nous pour produire la vue et la connaissance des formes. Car il est difficile de concevoir que les objets externes puissent nous donner par l’intermédiaire de l’air qui est entre eux et nous, ou au moyen de rayons, d’émissions quelconques allant de nous à eux, une empreinte de leur forme et de leur couleur ; ce phénomène, au contraire, s’explique parfaitement si l’on admet que certains simulacres de même couleur, de même forme et d’une grandeur proportionnelle passent de ces objets à nous et arrivent ainsi à la vue et à l’intelligence. Ces simulacres sont animés d’une grande vitesse, et comme d’un autre côté l’objet solide formant une masse compacte et renfermant une grande quantité d’atomes, émet toujours la même quantité de particules, la vision est continue, et il ne se produit en nous qu’une seule représentation qui conserve toujours le même rapport avec l’objet.

Toute conception, toute perception sensible, qu’elle porte sur la forme ou sur d’autres attributs, n’est que la forme même du solide perçue directement, soit en vertu d’une sorte de condensation actuelle et continue de l’image, soit par suite des traces qu’elle a laissées en nous.

L’erreur, les faux jugements tiennent toujours à ce qu’on suppose qu’une idée préconçue sera confirmée ou ne sera pas démentie par l’évidence ; ensuite, lorsqu’elle n’est pas confirmée, nous formons notre jugement en vertu d’une sorte d’initiative de la pensée, liée, il est vrai, à la perception et à la représentation directe, mais à laquelle se joint une conception à nous propre, de laquelle résulte l’erreur. En effet, les représentations que l’intelligence réfléchit comme un miroir, soit qu’on les perçoive dans le songe, soit qu’on les embrasse par un acte personnel de la pensée ou par quelque autre faculté judiciaire, ne ressembleraient pas aux objets qu’on appelle réels et vrais, s’il n’y avait pas des objets de ce genre perçus directement ; et, d’un autre côté, l’erreur ne serait pas possible s’il n’y avait pas un acte personnel, une sorte d’initiative de l’intelligence, liée, il est vrai, à la représentation directe, mais allant au delà de cette représentation. Cette conception, liée à la perception directe que produit la représentation, mais allant au delà, grâce à un acte propre de la pensée individuelle, produit l’erreur lorsque l’évidence ne la confirme pas ou la contredit ; lorsque l’évidence la confirme ou ne la contredit