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jeunes gens à un spectacle, un coup de vent souleva son manteau et l’on vit qu’il n’avait pas de tunique ; aussitôt les Athéniens l’applaudirent, au rapport de Démétrius de Magnésie dans les Homonymes, et l’admiration qu’il inspirait ne fit que s’accroître. Antigone, qui était l’un de ses auditeurs, lui ayant un jour demandé pourquoi il puisait de l’eau, il lui répondit : « Est-ce que je me contente de puiser de l’eau ? ne me voit-on pas aussi bêcher et arroser la terre ? ne fais-je point tout en vue de la philosophie ? »

Zénon lui-même l’encourageait à ces travaux et exigeait qu’il lui remît chaque jour une obole prélevée sur son salaire. À la fin il réunit toute la somme, et l’apportant à ses amis assemblés, il leur dit : « Cléanthe pourrait, s’il le voulait, nourrir un autre Cléanthe, tandis que ceux qui ont de quoi vivre se font fournir par d’autres tout ce qui leur est nécessaire, sans apporter pour cela plus d’ardeur à la philosophie. »

Cette ardeur infatigable l’avait fait surnommer le Second Hercule. Mais, d’un autre côté, son esprit était excessivement lent et épais, aussi Timon dit-il de lui :

Quel est ce bélier qui parcourt les rangs, ce lourd citoyen d’Assos, ce grand parleur, ce mortier, cette masse inerte ?

Objet de risée pour ses compagnons d’étude, il supportait patiemment leurs sarcasmes ; on dit même que quelqu’un l’ayant un jour appelé âne, il se contenta de répondre : « C’est vrai, car seul je puis porter le fardeau de Zénon. »

Une autre fois on lui reprochait sa timidité : « C’est pour cela même, répondit-il, que je commets peu de fautes. »

Il préférait sa condition à celle des riches, et disait : « Pendant qu’ils jouent à la balle, moi je fertilise par