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disait aussi que les musiciens accordent avec soin leur lyre, mais ne songent nullement à accorder les penchants de leur âme ; que les mathématiciens observent le soleil et la lune sans s’inquiéter de ce qui est à leurs pieds ; que les orateurs s’étudient à bien dire, mais non à bien faire ; enfin que les avares parlent de l’argent avec mépris et l’aiment par-dessus tout. Il condamnait ceux qui, tout en louant les gens de bien de s’être placés au-dessus des richesses, portent envie aux riches. Il s’indignait de ce que dans les sacrifices offerts aux dieux pour obtenir la santé on mangeât de manière à la perdre. Un autre sujet d’étonnement pour lui c’était que les esclaves, en voyant leurs maîtres manger avec avidité, ne dérobassent pas une partie des mets. Il approuvait fort ceux qui sur le point de se marier n’en faisaient rien ; ceux qui au moment de s’embarquer revenaient sur leurs pas ; ceux qui, décidés à entrer dans les affaires, s’en abstenaient ; ceux qui résolus à élever des enfants changeaient d’avis ; enfin ceux qui, déterminés à fréquenter les grands, y renonçaient. « Il faut, disait-il, tendre la main à ses amis, mais sans fermer les doigts. »

Ménippe raconte dans le Diogène vendu qu’il fut fait prisonnier et mis en vente, et qu’interrogé alors sur ce qu’il savait faire, il répondit : « Commander aux hommes. » S’adressant ensuite au héraut, il lui dit : « Demande si quelqu’un veut acheter un maître. » Comme on lui défendait de s’asseoir : « Qu’importe ? dit-il, on achète bien les poissons sans s’inquiéter comment ils sont placés. »

Il s’étonnait de ce qu’avant d’acheter une marmite ou un plat on l’éprouve au son, tandis que pour un homme on se contente de la simple vue. Xéniade l’ayant acheté, il lui dit que, quoiqu’il fût le maître de