Page:Diogène Laërce - Vies et doctrines des philosophes de l’Antiquité, trad. Zévort.djvu/255

Cette page a été validée par deux contributeurs.

il lui dit : « Si tu es ignorant, tu fais bien ; mais si tu es instruit, tu as tort. » Il répétait sans cesse que de toutes les dépenses, la plus coûteuse est celle du temps.

Il mourut vieux, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans, après avoir quelque temps interrompu ses travaux. J’ai fait sur lui ces vers :

Quelqu’un a dit avec raison que l’esprit est un arc qui se rompt si on le détend : tant que Théophraste se livre à ses travaux, il ne connaît ni maladie, ni infirmités ; à peine les a-t-il abandonnés, que les forces le quittent et il succombe.

On rapporte que ses disciples lui ayant demandé s’il n’avait rien à leur dire, il répondit : « Je n’ai rien à vous recommander, sinon de vous rappeler que dans la vie la gloire nous offre un appât trompeur ; car à peine commençons-nous à vivre qu’il nous faut mourir. Soyez donc heureux, et de deux choses l’une : ou bien renoncez à l’étude, car le labeur est grand ; ou bien cultivez-la avec ardeur, car la gloire aussi est grande. Du reste, le vide de la vie l’emporte sur les avantages qu’elle procure ; mais il ne m’appartient plus maintenant de vous dire ce qu’il faut faire ; c’est à vous d’y pourvoir ; » et en achevant ces mots il expira. Toute la ville d’Athènes assista à ses funérailles et on lui rendit toute espèce d’honneurs[1].

Théophraste a laissé un nombre prodigieux d’ouvrages excellents. J’ai cru devoir, en raison de leur mérite, en donner le catalogue :

Premières Analytiques, III livres ; secondes Analytiques, VII ; sur l’Analyse des Syllogismes, I ; Abrégé des Analytiques, I ; des Lieux communs dans la déduction, II ; Critique de la théorie de la discussion ; des

  1. Je lis : πασὶ τὸ ἄνδρα κ. τ. λ.