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DIOGÈNE.

Cet ancien citoyen de Synope, portant un bâton, une robe double, et ayant le ciel pour couverture, est mort sans aucun sentiment de douleur, en se serrant les lèvres avec les dents, et en retenant son haleine. Ce qui prouve que Diogcne était véritablement fils de Jupiter, et un chien céleste.

D’autres disent que, voulant partager un polype[1] à des chiens, il y en eut un qui le mordit tellement au nerf du pied, qu’il en mourut. Mais, comme dit Antisthène dans ses Successions, ses amis ont conjecturé qu’il était mort en retenant sa respiration. Il demeurait dans un collége situé vis-à-vis de Corinthe, et qui s’appelait Cranium. Ses amis, étant venus le voir selon leur coutume, le trouvèrent enveloppé dans son manteau ; mais, se doutant qu’il ne dormait pas, par la raison qu’il ne donnait guère de temps au sommeil, ils défirent son manteau ; et comme ils le trouvèrent expiré, ils crurent qu’il était mort volontairement, par un désir de sortir de la vie. Il y eut, à cette occasion, une dispute entre ses amis pour savoir à qui l’ensevelirait. Us furent même près d’en venir aux mains, jusqu’à ce que leurs pères et leurs supérieurs étant survenus, la dispute fut accordée, et Diogène enterré près de la porte qui conduit à l’isthme. On lui érigea un tombeau, sur lequel on mit un chien de pierre de Paros. Ses concitoyens lui firent même l’honneur de lui élever des statues d’airain, avec cette inscription :

Le temps consume l’airain ; mais ta gloire, ô Diogène, durera dans tous les âges. Tu as seul fait connaître aux mortels le bonheur dont ils peuvent jouir par eux-mêmes, et leur as montré le moyen de passer doucement la vie.

Nous avons aussi fait à sa louange l’épigramme suivante :

Diogène, dis-moi, quel accident t’amène aux enfers ? C’est la morsure d’un chien féroce.

  1. Sorte de poisson qui avait huit pieds ou nageoires. Voyez le Thrésor d’Estienne.