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DIOGÈNE.

une vie heureuse ; mais que le moyen de vivre ainsi n’était pas connu de ceux qui aiment les tartes, les onguents et autres choses semblables. Il dit à un homme qui se Taisait chausser par son domestique, qu’il ne serait heureux que lorsqu’il se ferait aussi moucher par un autre ; ce qui arriverait, s’il perdait l’usage des mains. Il vit un jour les magistrats, qui présidaient aux choses saintes[1] accuser un homme d’avoir volé une fiole dans le trésor ; sur quoi il dit, que les grands voleurs accusaient les petits. Voyant aussi un garçon qui jetait des pierres contre une potence : Courage ! lui dit-il, tu atteindras au but. Des jeunes gens qui étaient autour de lui lui dirent qu’ils auraient bien soin qu’il ne les mordît pas : Tranquillisez-vous, mes enfants, leur dit-il ; les chiens ne mangent point de betteraves[2]. Il dit aussi à un homme qui se croyait relevé par la peau d’un lion dont il était couvert : Cesse de déshonorer les enseignes de la vertu. Quelqu’un trouvait que Callisthène était fort heureux d’être si magnifiquement traité par Alexandre : Au contraire, dit-il, je le trouve bien malheureux de ne pouvoir dîner et souper que quand il plaît à Alexandre. Lorsqu’il avait besoin d’argent, il disait qu’il en demandait à ses amis, plutôt comme une restitution que comme un présent. Un jour qu’étant au marché, il faisait des gestes indécents, il dit qu’il serait à souhaiter qu’on pût ainsi apaiser la faim. Une autre fois il vit un jeune garçon qui allait souper avec de grands seigneurs : il le tirade leur compagnie, et le reconduisit chez ses parents, en leur recommandant de prendre garde à lui. Un autre jeune homme, qui était fort paré, lui ayant fait quelques questions, il dit qu’il ne lui répondrait pas, qu’il ne lui eût fait connaître s’il était homme ou femme. Il vit aussi un jeune homme dans le bain, qui versait du vin d’une fiole dans une coupe,

  1. Gr., les hiéromnémones. Étienne dit qu’on appelait spécialement ainsi les députés de chaque ville au conseil des amphictyons.
  2. La betterave passait pour l’emblème de la fadeur. Ménage.