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De ce regard jamais éteint sous la paupière,
Et, la gorge entr'ouverte à d'impossibles cris,
Marche en se roidissant dans la chambre, suivie
Par ce regard dardé du fond d'une autre vie.

Elle s'arrête enfin, sans geste, à l'angle clair
De la creuse embrasure où, dans l'ombre baignée,
La vieille à l'autre coin chante sur un vieux air,
Et près de son rouet s'endort, lasse araignée.
Tout le passé renaît en Gemma, jours par jours ;
Et flottant sur le parc au hasard des détours,
La transporte et la roule ainsi dans son supplice :
« Ciel tranquille ! Ciel vaste et profond ! Dont la paix
Semble s'éterniser sous les nappes d'eau lisse,
Et lointaine descend dans les taillis épais !
Regard multiplié des nuits, qui nous surveilles !
Où sont-ils, ces matins aux si fraîches merveilles,
Que, comme vous limpide et pure, j'ai vécus !
Où le métal uni de mes jeunes prunelles
À sa clarté brisait tous les désirs aigus !
Où j'allais promenant mes candeurs fraternelles
Dans le vert paradis des bois pleins de soleil ;
Où nul visage encor ne hantait mon sommeil !
Ah ! Tu gisais inerte en mon sein, comme un lâche,
Mon cœur ! Rien ne pouvait t'émouvoir ! Un vautour,
De son bec implacable, aujourd'hui, sans relâche,
En te criant : « Trop tard ! » te déchire à ton tour ! »
Et tandis que Gemma, d'une étreinte qui broie,