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Christophe & Guillaume de Harcour, qui tinrent ensuite successivement cet office, prenoient le titre de souverain maître & général réformateur des eaux & forêts.

Leurs successeurs prirent celui de grand maître, enquêteur & général réformateur des eaux & forêts de France.

Cet office, qui étoit unique, subsista ainsi jusqu’au tems d’Henri Clausse, qui en fut pourvu en 1567 ; il l’exerçoit encore en 1570. Depuis cet office fut supprimé en 1575 ; Henry Clausse y fut pourtant rétabli en 1598, & en prenoit encore la qualité en 1609.

Lorsque l’office unique de grand maître des eaux & forêts fut supprimé en 1575, on en créa six, mais leur établissement ne fut bien assuré qu’en 1609.

En 1667 toutes les charges de grands-maîtres furent supprimées, ou pour mieux dire suspendues jusqu’en 1670 qu’ils furent ensuite rétablis dans leurs fonctions sur le pié de l’édit de 1575.

L’édit du mois de Février 1589 créa 16 départemens de grands-maîtres ; il a encore été créé depuis une 17e charge pour le département d’Alençon, par édit du mois de Mars 1703.

Présentement ils sont au nombre de 18, qui ont chacun leur département dans les provinces & généralités ; savoir Paris, Soissons, Picardie, Artois & Flandres ; Hainault, Châlons en Champagne, Metz, duché & comté de Bourgogne & Alsace ; Lyonnois, Dauphiné, Provence & Riom ; Toulouse & Montpellier ; Bordeaux, Auch, Béarn, Navarre & Montauban ; Poitou, Aunis, Limoges, la Rochelle & Moulins ; Touraine, Anjou & Maine ; Bretagne, Rouen, Caen, Alençon, Berry & Blaisois, & Orléans.

Dans cette derniere généralité il y deux grands-maîtres, l’un ancien, l’autre alternatif.

Il a été créé en divers tems de semblables offices de grands-maîtres alternatifs & triennaux pour les différens départemens, mais ces offices ont été réunis aux anciens.

Les grands-maîtres ont deux sortes de jurisdiction ; l’une, qu’ils exercent seuls & sans le concours de la table de marbre, l’autre qu’ils exercent à la tête de ce siége.

Par rapport à leur jurisdiction personnelle, ils ne la peuvent exercer contentieusement qu’en réformation, c’est-à-dire en cours de visite dans leurs départemens ; ils font alors des actes de justice & rendent seuls des ordonnances dont l’appel est porté directement au parlement ou au conseil, si le grand maître agit en vertu de quelque commission particuliere du conseil.

Les grands-maîtres étant en cours de visite, peuvent, quand ils le jugent à-propos, tenir le siége des maîtrises, & alors les officiers des maîtrises deviennent leurs assistans. Il n’y a pourtant point de loi qui oblige les grands-maîtres de les appeller pour juger avec eux ; mais quand ils le font, l’appel des juge. mens qu’ils rendent ainsi en matiere civile ne peut être porté à la table de marbre, ni même devant les juges en dernier ressort ; il est porté directement au conseil ou au parlement de même que s’ils avoient jugé seuls, parce qu’en ce cas le siége des maîtrises devient le leur, ce qui fait disparoître l’infériorité ordinaire des maîtrises à l’égard de la table de marbre.

L’habillement des grands-maîtres est le manteau & le rabat plissé ; ils siégent l’épée au côté, & se couvrent d’un chapeau garni de plumes.

Ils prêtent serment au parlement, & sont ensuite installés à la table de marbre par un conseiller au parlement ; ils peuvent ensuite y venir siéger lorsqu’ils le jugent à-propos, & prennent toujours leur place au-dessus de leur lieutenant général, ont voix

délibérative ; mais c’est toujours le lieutenant général, ou autre officier qui préside en son absence, qui prononce.

Les grands-maîtres ont aussi voix délibérative à l’audience & chambre du conseil des juges en dernier ressort, & dans ce tribunal ils ont droit de prendre leur séance à main gauche après le doyen de la chambre.

L’ordonnance des eaux & forêts leur attribue la connoissance en premiere instance, à la charge de l’appel de toutes actions qui sont intentées devant eux en procédant aux visites, ventes & réformations d’eaux & forêts.

Ils ont l’exécution des lettres-patentes, ordres & mandemens du roi sur le fait des eaux & forêts.

En procédant à leurs visites ils peuvent faire toutes sortes de réformations & juger de tous les délits, abus & malversations qu’ils trouveront avoir été commis dans leur département sur le fait des eaux & forêts.

Ils peuvent faire le procès aux officiers qui sont en faute, les decréter, emprisonner & subdéléguer pour l’instruction, & les juger définitivement, ou renvoyer le procès en état à la table de marbre.

A l’égard des bucherons, chartiers, pâtres, garde-bêtes & autres ouvriers, ils peuvent les juger en dernier ressort au présidial du lieu du délit, au nombre de sept juges au-moins, mais ils ne peuvent juger les autres personnes qu’à la charge de l’appel.

Ils doivent faire tous les ans une visite générale en toutes les maîtrises & gruries de leur département.

En faisant la visite des ventes à adjuger, ils désignent aux officiers des maîtrises le canton où l’on doit asseoir les ventes de l’année suivante.

Ils font marquer de leur marteau les piés corniers des ventes & arbres de reserve lorsqu’il convient de le faire.

Les ventes & adjudications des bois du roi doivent être faites par eux avant le premier Janvier de chaque année.

Ils doivent faire les récolemens par réformation le plus souvent qu’il est possible, pour voir si les officiers des maîtrises font leur devoir.

Quand ils trouvent des places vagues dans les bois du roi, ils peuvent les faire planter.

Les bois où le roi a droit de grurie, grairie, tiers & danger ; ceux tenus en apanage ou par engagement, ceux des ecclésiastiques, communautés & gens de main-morte, sont sujets à la visite des grands-maîtres.

Ils reglent les partages & triages des seigneurs avec les habitans.

Enfin ils font aussi la visite des rivieres navigables & flotables, ensemble des pécheries & moulins du roi, pour empêcher les abus & malversations.

Les prevôts des maréchaux & autres officiers de justice, sont tenus de prêter main-forte à l’exécution de leurs jugemens & mandemens.

Voyez le recueil des eaux & forêts de Saint Yon, & les lois forestieres de Pecquet. (A)

Maitre particulier des eaux et forêts est le premier officier d’une jurisdiction royale appellée maîtrise, qui connoît en premiere instance des matieres d’eaux & forêts.

L’établissement de ces officiers est fort ancien ; ils ont succédé à ces officiers qui sous la seconde race de nos rois avoient l’administration des forêts du roi sous le nom de juges ou de forestiers ; ils sont nommés dans les capitulaires judices, & quelquefois judices villarum regiarum, c’est-à-dire des domaines ou métairies du roi ; & ailleurs forestarii seu justetiarii forestarum.

Ces juges n’étoient proprement que de simples