Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/731

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

considérer & les combiner ensemble dans une table à part ; cette table donne la correction qu’il faut faire au vrai lieu trouvé ci-dessus. Mais ce lieu ainsi corrigé n’est pas encore le vrai lieu, à moins que la lune ne soit en conjonction ou en opposition ; si elle est hors de ces deux cas, il y aura encore une correction à faire, laquelle dépend de deux élémens qu’il faut prendre ensemble, & comparer, savoir la distance du lieu corrigé de la lune au soleil, & celle du lieu où elle est par rapport à son propre apogée, cette derniere distance ayant été changée par la derniere correction.

Par toutes ces opérations & ces corrections, on arrive enfin au vrai lieu de la lune pour l’instant donné, mais il faut convenir qu’il se rencontre en tout cela des difficultés prodigieuses. Les inégalités de lune sont si grandes que ç’a été inutilement que les Astronomes ont travaillé jusqu’au grand Newton à les soumettre à quelque regle. C’est à ce grand homme que nous devons la découverte de leur cause méchanique, ainsi que la méthode de les calculer & de les déterminer, de façon qu’on peut dire de lui qu’il a découvert un monde presque entier, ou plûtôt qu’il se l’est soumis.

Suivant la théorie de M. Newton, on démontre d’une maniere fort élégante les lois méchaniques d’où dépendent les mouvemens que l’on a reconnus tant à l’égard de la lune que de son orbite apparent. C’est une chose remarquable que l’astre qui est le plus proche de la terre, soit celui dont les mouvemens nous sont, pour ainsi dire, le moins connus. Au reste, quelque utilité que l’Astronomie ait retiré du travail de M. Newton, les mouvemens de la lune sont si irréguliers, qu’on n’est pas encore parvenu à découvrir entierement tout ce qui appartient à la théorie le cette planete, & cela faute d’une longue suite d’observations qui demandent beaucoup de veilles & d’assiduités.

M. Newton fait voir par la théorie de la gravité, que les plus grandes planetes, en tournant autour du soleil, peuvent emporter avec elles de plus petites planetes qui tournent autour d’elles, & il prouve à priori, que ces dernieres doivent se mouvoir dans des ellipses dont les foyers se trouvent dans le centre des plus grandes, & qu’en même tems leur mouvement dans leur orbite est différemment troublé par l’action du soleil. Enfin, il infere de-là que les satellites de Saturne sont sujets à des irrégularités analogues. Il examine d’après la même théorie quelle est la force du soleil pour troubler le mouvement de la lune, il détermine quel seroit l’incrément horaire de l’aire que la lune décriroit dans une orbite circulaire par des rayons vecteurs aboutissant à la terre, sa distance de la terre, son mouvement horaire dans une orbite circulaire & elliptique, le mouvement moyen des nœuds, le mouvement vrai des nœuds, la variation horaire de l’inclinaison de l’orbite de la lune au plan de l’écliptique.

Enfin, il a conclu de la même théorie que l’équation annuelle du mouvement moyen de la lune provient de la différente figure de son orbite, & que cette variation a pour cause la différente force du soleil ; laquelle étant plus grande dans le périgée, allonge alors l’orbite, & devenant plus petite dans l’apogée, lui permet de nouveau de se contracter. Dans l’allongement de l’orbite, la lune se meut plus lentement, & dans la contraction elle va plus vîte, & l’équation annuelle propre à compenser cette inégalité est nulle, lorsque le soleil est apogée ou périgée : dans la moyenne distance du soleil, elle va suivant les observations à 11′ 50″, & dans les autres distances elle est proportionnelle à l’équation du centre du soleil, on l’ajoute au moyen mouvement de la lune,

lorsque la terre va de son aphélie au périhélie, & on la soustrait lorsqu’elle va en sens contraire. Or, supposant le rayon du grand orbe de mille parties & l’excentricité de la terre de 16 , cette équation, lorsqu’elle sera la plus grande, ira suivant la théorie de la gravité à 11′ 49″ ; ce qui s’accorde, comme l’on voit, avec l’observation.

M. Newton ajoute que dans le périhélie de la terre les nœuds de la lune & son apogée se meuvent plus promptement que dans l’aphélie, & cela en raison triplée inverse de la distance de la terre au soleil, d’où proviennent des équations annuelles des mouvemens des nœuds proportionnelles à celui du centre du soleil ; or les mouvemens du soleil sont en raison doublée inverse de la distance de la terre au soleil, & la plus grande équation du centre que cette inégalité puisse produire est de 1° 56′ 26″, en supposant l’excentricité de 16 partie.

Si le mouvement du soleil étoit en raison triplée inverse de sa distance, cette inégalité donneroit pour plus grande équation 2° 56′ 9″, & par conséquent les plus grandes équations que puissent produire les inégalités des mouvemens de l’apogée de la lune & des nœuds, sont à 2° 56′ 9″, comme le mouvement diurne de l’apogée de la lune & le moyen mouvement diurne de ces nœuds sont au moyen mouvement diurne du soleil ; d’où il s’ensuit que la plus grande équation du moyen mouvement de l’apogée est d’environ 19′ 52″, & que la plus grande équation du moyen mouvement des nœuds est de 9′ 27″. On ajoute la premiere équation, & on soustrait la seconde, lorsque la terre va de son périhélie à son aphélie, & dans l’autre cas on fait le contraire.

Il paroît aussi par la même théorie de la gravité, que l’action du soleil sur la lune doit être un peu plus grande, quand l’axe transverse de l’orbite lunaire passe par le soleil, que lorsqu’il coupe à angles droits la droite qui joint la terre & le soleil, & que par conséquent l’orbite lunaire est un peu plus grande dans le premier cas que dans le second ; ce qui donne naissance à une autre équation du moyen mouvement de la lune, laquelle dépend de la situation de l’apogée de la lune par rapport au soleil, & devient la plus grande qui soit possible, lorsque l’apogée de la lune est à 45° du soleil ; & nulle, lorsque la lune arrive aux quadratures & aux syzygies. On l’ajoute au moyen mouvement, lorsque l’apogée de la lune passe des quadratures aux syzygies, & on l’en soustrait, lorsque l’apogée passe des syzygies aux quadratures.

Cette équation que M. Newton appelle semestre, devient de 3′ 45″, lorsqu’elle est la plus grande qui soit possible (c’est-à-dire à 45° de l’apogée) dans les moyennes distances de la terre au soleil ; mais elle augmente & diminue en raison triplée inverse de la distance du soleil ; ce qui fait que dans les plus grandes distances du soleil elle est environ de 3′ 34″, & dans la plus petite, de 3′ 56″ ; mais lorsque l’apogée de la lune est hors des octans, c’est-à-dire a passé 45°, elle diminue alors, & elle est à la plus grande équation, comme le sinus de la distance double de l’apogée de la lune à la plus prochaine syzygie ou quadrature, est au rayon.

De la même théorie de la gravité il s’ensuit que l’action du soleil sur la lune, est un peu plus grande, lorsque la droite tirée par les nœuds de la lune, passe par le soleil, que lorsque cette ligne est à angles droits avec celle qui joint le soleil & la terre ; & de-là se déduit une autre équation du moyen mouvement de la lune, que M. Newton appelle seconde équation semestre, & qui devient la plus grande possible, lorsque les nœuds sont dans les octans du soleil, c’est-à-dire à 45°. du soleil ; & nulle, lorsqu’ils sont dans les syzygies ou quadratures. Dans