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précieuses libertés. Les plus remarquables de ces lois, sont la pragmatique de saint Louis en 1268 ; la pragmatique faite sous Charles VII. en 1437 ; le concordat fait en 1516 ; l’édit de 1535, contre les petites dates ; l’édit de Moulins en 1580, & plusieurs autres plus récens,

Le parlement a toujours été très-soigneux de maintenir ces mêmes libertés, tant par les différens arrêts qu’il a rendus dans les occasions qui se sont présentées, que par les remontrances qu’il a faites à ce sujet à nos rois, entr’autres celles qu’il fit au roi Louis XI. en 1461, qui font une des principales pieces qui ont été recueillies dans le traité des libertés de l’Eglise gallicane, par pierre Pithou.

Quoique le détail de nos libertés soit presqu’infini, parce qu’elles s’étendent sur-tout notre Droit canonique ; elles se rapportent néanmoins à deux maximes fondamentales.

La premiere, que le pape & les autres supérieurs ecclésiastiques n’ont aucun pouvoir direct ni indirect sur le temporel de nos rois, ni sur la jurisdiction séculiere.

La seconde, que la puissance du pape, par rapport au spirituel, n’est point absolue sur la France, mais qu’elle est bornée par les canons & par les coutumes qui sont observés dans le royaume ; de sorte que ce que le pape pourroit ordonner au préjudice de ces regles, est nul.

C’est de ces deux maximes que dérivent toutes les autres que Pierre Pithou a recueillies dans son traité des libertés de l’Eglise gallicane, qu’il dédia au roi, & qui fut imprimé pour la premiere fois en 1609. avec privilege.

On y joignit plusieurs autres pieces aussi fort importantes concernant les libertés de l’Eglise gallicane, telles que les rémontrances faites au roi Louis, & plusieurs mémoires & traités de Jacques Cappel, Jean du Tillet, du sieur Dumesnil, de Claude Fauchet, de Hotman, Coquille, &c. l’auteur étoit déja décédé.

Mais le traité de Pithou sur les libertés de l’Eglise, est un des plus fameux de ce recueil. Quoique cet opuscule ne contienne que huit ou dix pages d’impression, il a acquis parmi nous une telle autorité, qu’on a distingué les à linea qui sont au nombre de 83, comme autant d’articles & de maximes ; & on les cite avec la même vénération que si c’étoient autant de lois.

Ce recueil a depuis été réimprimé plusieurs fois avec des augmentations de diverses pieces, qui ont aussi pour objet nos libertés.

M. Pierre Dupuy publia en 1639, en 2 vol. in-4o. un commentaire sur le traité des libertés de l’Eglise gallicane de Pithou : la derniere édition qui est de 1731 augmentée par l’abbé Lenglet du Fresnoy, compose 4 volumes in-fol. y compris deux volumes de preuves.

Les autres auteurs qui ont écrit depuis sur les libertés de l’Eglise gallicane, n’ont fait aussi pour la plûpart que commenter les maximes recueillies par Pithou.

Pour la conservation de nos libertés, on a recours en France à quatre principaux moyens qui sont remarques par Pithou, art. 75, 76, 77, 78, & 79 ; où il dit que les divers moyens ont été sagement pratiqués par nos ancêtres, selon les occurrences & les tems.

Ces moyens sont, 1°. que l’on confere avec le pape, pour se concilier à l’amiable sur les difficultés qui peuvent s’élever. 2°. De faire un examen scrupuleux des bulles & autres expéditions venant de Rome, afin qu’on ne laisse rien publier contre les droits du roi, ni contre ceux de l’Eglise gallicane. 3°. L’appel au futur concile ; enfin l’appel comme d’a-

bus aux parlemens, en cas d’entreprise sur la jurisdiction

séculiere, & de contravention aux usages de l’Eglise de France.

Voyez les traités faits par du Tillet, Hotman, Dupuy, Leschassier, Bouchel, bibl. du Droit franc. let. j. verb. jurisdict. bibliot. can. tom. I. pag. 543 & 547. Dhericourt, loix ecclésiast. part. I. chap. 17. (A)

Liberté, (Inscript. Med.) La Liberté sur les médailles, tient de la main droite un bonnet qui est son symbole. Tout le monde sait qu’on le donnoit à ceux qu’on affranchissoit. Appien raconte qu’après l’assassinat de César, un des meurtriers porta par la ville un bonnet au bout d’une pique, en signe de liberté. Il y avoit sur le mont Aventin un fameux temple dédié à la Liberté, avec un parvis, autour duquel régnoit un portique, qu’on nommoit atrium libertatis. Sous ce portique étoit la célebre bibliotheque d’Asinius Pollion qui rebâtit cet édifice.

On érigea sous Tibere dans la place publique une statue à la Liberté, dès qu’on sut la mort de Séjan. Josephe rapporte qu’après le massacre de Caïus, Cassius Chéréa vint demander le mot aux consuls, ce qu’on n’avoit point vu de mémoire d’homme, & que le mot qu’ils lui donnerent, fut liberté.

Caïus étant décédé, on érigea sous Claude un monument à la Liberté ; mais Néron replongea l’empire dans une cruelle servitude. Sa mort rendit encore la joie générale. Tout le peuple de Rome & des provinces prit le bonnet de la liberté ; c’étoit un triomphe universel. On s’empressa de représenter par-tout dans les statues & sur les monnoies, l’image de la Liberté qu’on croyoit renaissante.

Une inscription particuliere nous parle d’une nouvelle statue de la Liberté, érigée sous Galba.

La voici telle qu’elle se lit à Rome sur la base de marbre qui soutenoit cette statue.

Imaginum domus Aug. cultoribus signum
Libertatis restitutæ, Ser. Galbæ imperatoris
Aug. curatores anni secundi, C. Turranius
Polubius, L. Calpurnius Zena, C. Murdius
Lalus, C. Turranius Florus C. Murdius
Demosthenes.

Sur le côté gauche de la base est écrit

Dedic. id. Octob. C. Bellico Natale Cos.
P. Cornelio Scipione Asiatico.

Ces deux consuls furent subrogés l’année 68 de Jesus-Christ.

Ce fut sur le modele de cette statue ou de quelque autre pareille, qu’on frappa du tems du même empereur tant de monnoies, qui portent au revers, libertas August. libertas restituta, libertas publica. Les provinces à l’imitation de la capitale, dresserent de pareilles statues. Il y a dans le cabinet du roi de France une médaille grecque de Galba, avec le type de la Liberté, & le mot Ἐλευθερία. (D. J.)

Liberté, (Mythol. Iconol.) déesse des Grecs & des Romains. Les Grecs l’invoquoient sous le nom d’Eleuthérie, & quelquefois ils disoient Θεοὶ Ἐλεύθεροι, dieux de la liberté. Les Romains qui l’appellerent Libertas, eurent cette divinité en singuliere vénération, lui bâtirent des temples, des autels en nombre, & lui érigerent quantité de statues. Tiberius Gracchus lui consacra sur le mont Aventin un temple magnifique, soutenu de colonnes de bronze, & décoré de superbes statues. Il étoit précédé d’une cour qu’on appelloit atrium Libertatis.

Quand Jules César eut soumis les Romains à son empire, ils éleverent un temple nouveau en l’honneur de cette déesse, comme si leur liberté étoit rétablie par celui qui en sappa les fondemens ; mais dans une médaille de Brutus, on voit la Liberté sous la figure d’une femme, tenant d’une main le chapeau, symbole de la liberté, & deux poignards de