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ou de plâtre leurs joints, pendant qu’elles sont sur leurs cales.

LIANNE, s. f. (Botan.) on donne ce nom à un grand nombre de différentes plantes, qui croissent naturellement dans presque toute l’Amérique, & principalement aux Antilles : plusieurs de ces plantes sont rameuses, bien garnies de feuilles, & couvrent la terre & les rochers ; d’autres, comme le lierre d’Europe, serpentent & s’attachent à tout ce qu’elles rencontrent ; on en voit beaucoup d’aussi grosses que le bras, rondes, droites, couvertes d’une peau brune, fort unie, sans nœuds ni feuilles, s’élever jusqu’à la cime des plus grands arbres, d’où, après avoir enlacé les branches & n’étant plus soutenue, leur propre poids les fait incliner vers la terre, où elles reprennent racine & produisent de nouveaux jets qui cherchent à s’appuyer sur quelque arbre voisin, ou remontent en serpentant autour de la maîtresse lianne, ce qui ressemble à des cables de moyenne grosseur : l’usage que l’on fait de cette lianne lui a donné le nom de lianne à cordes. On l’appelle encore lianne jaune, à cause d’un suc de cette couleur qui en découle lorsqu’elle a été coupée.

Les autres liannes, dont l’usage est le plus connu, sont,

1. Lianne brûlante. C’est une espece de lierre qu’on emploie tout verd dans la composition de la lessive, qui sert à la fabrication des sucres.

2. Lianne à concombre. Celle-ci porte un fruit gros comme un citron de moyenne grosseur, ayant la forme d’un sphéroïde très-peu allongé ; la pellicule qui le couvre est lisse, d’un verd pâle & parsemée de petites pointes peu aiguës, l’intérieur de ce fruit est tout-à-fait semblable à celui des concombres ordinaires ; on l’emploie aux mêmes usages.

3. Lianne à crocs de chiens. Cette lianne produit beaucoup de branches tortueuses, souples & fortes, garnies de beaucoup d’épines très-aiguës, assez grandes & recourbées comme les griffes d’un chat ; son bois sert à faire des cerceaux pour les barriques où l’on met le sucre. Il ne faut pas la confondre avec la lianne à barriques, que l’on emploie aussi à faire des cerceaux, mais dont l’usage n’est pas si bon.

4. Lianne à eau. Elle croît abondamment dans les bois & dans les montagnes ; sa propriété la plus connue est de servir à désaltérer ceux qui fréquentent les lieux écartés des ruisseaux & des sources ; lorsqu’ils sont pressés de la soif, ils coupent cette lianne par le pié, &, après avoir fait une médiocre ouverture à la partie qui est restée suspendue aux rochers ou aux arbres, ils reçoivent par le bout d’en bas la valeur d’une chopine & plus d’une belle eau fraîche, limpide, sans aucun goût ni qualité, malfaisante.

5. Lianne grise. Cette espece est un peu noueuse, mais très-liante ; sa grosseur approche de celle du petit doigt : on l’emploie au lieu d’osier pour faire des paniers, des claies & autres ouvrages utiles à la campagne.

6. Miby. Lianne de la petite espece très-menue, fort souple, servant à faire des liens & des petits paniers peu durables.

7. Lianne à patate. Ce n’est autre chose que la tige des patates, qui rempe à terre & s’étend beaucoup ; on en nourrit les cochons.

8. Lianne à persil. Le bois de cette lianne est de couleur rougeâtre ; il est dur, solide, & cependant assez liant ; on en fait des bâtons qui ne rompent point.

9. Lianne à sang. Cette lianne étant coupée, donne quelques gouttes d’une liqueur visqueuse, rouge comme du sang de bœuf ; teignant les linges & les étoffes blanches, mais cette couleur s’efface à

la lessive ; on pourroit peut-être la fixer.

10. Lianne à savon. Ainsi nommée par l’effet qu’elle produit, étant écrasée & frottée dans de l’eau claire ; on lui attribue une qualité purgative.

11. Lianne à serpent. Cette lianne est employée dans les remedes contre la morsure du serpent, on exprime le suc de la tige & des feuilles, & après l’avoir mêlé avec les deux tiers de tafia ou d’eau-de-vie, on fait boire le tout au patient, & le marc s’applique sur la morsure, cela réussit quelquefois.

Cette plante dont les propriétés ne sont pas bien connues, paroît avoir une qualité narcotique ; elle exhale une odeur forte, désagréable & assoupissante.

Le nombre des autres liannes est si considérable, qu’il faudroit un volume entier pour les décrire toutes exactement.

Lianne, (pomme de) s. f. Botan. La pomme de lianne est le fruit d’une plante d’Amérique nommée par quelques auteurs grenadille, ou fleur de la passion. Cette plante s’étend beaucoup, & s’éleve contre tout ce qu’elle rencontre ; elle est bien garnie de feuilles d’un assez beau verd ; & dans la saison elle porte une parfaitement belle fleur en campanille ou clochette d’un pouce & demi à deux pouces de diametre, sur autant de hauteur, au fond de laquelle sont le pistil & les étamines que l’imagination a fait ressembler aux instrumens de la passion.

Cette fleur en clochette n’est pas composée de plusieurs pétales, ni même d’une seule, ainsi que le sont les fleurs en entonnoir ; mais toute sa circonférence est formée par un grand nombre de filets assez gros, veloutés, & d’une belle couleur bleue depuis leur extrémité jusqu’environ les deux tiers de leur longueur, le reste étant marqueté de blanc & de pourpre, jusqu’à la partie qui joint le pistil, autour duquel ces filets prennent naissance, & représentent intérieurement un soleil rayonnant, varié de diverses couleurs. La position naturelle de cette fleur est toujours pendante, & differe beaucoup de la figure défectueuse qu’en ont donné les RR. PP. Dutertre & Labat, dans laquelle ils renversent les filets en-dehors, pour montrer le pistil à découvert ; c’est tout le contraire, puisqu’ainsi qu’on l’a déja dit, la fleur ressemble à une campanille ou clochette dont le pistil peut être regardé comme le battant.

Au bout de deux ou trois jours cette fleur se séche, & le pistil en croissant se change en un fruit verd, plus gros qu’un œuf de poule ; la peau de ce fruit acquiert en murissant une belle couleur d’abricot ; elle est fort épaisse, coriace, souple, unie, un peu veloutée, & belle à voir ; elle renferme intérieurement une multitude de petites graines plates, presque noires, nageantes dans une liqueur épaissie en consistence de gelée claire, un peu aigrelette, sucrée, parfumée, & d’un goût très-agréable ; on la croit raffraîchissante. Pour manger ce fruit, communément on fait avec le couteau un trou à l’une de ses extrémités, au moyen de quoi on en suce la substance, en pressant un peu la peau qui cede sous les doigts comme une bourse de cuir.

Quelques voyageurs ont confondu la pomme de lianne avec la grenadille ou barbadine ; celle-ci est trois ou quatre fois plus grosse ; sa peau est épaisse du petit doigt, extrèmement lisse, & d’un jaune verdâtre très-pâle, comme celle d’un concombre à moitié mûr. La substance intérieure de ce fruit est un peu moins liquide, & plus parfumée que celle de la pomme de lianne ; ces deux plantes s’emploient à former de très-jolis berceaux qu’on appelle tonelles dans le pays. Art. de M. le Romain.

Lianne, (Géog.) petite riviere de France, en Picardie, elle tire sa source des frontieres de l’Ar-