Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/367

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

décédés sans autres biens, n’étoient que fidei-commissaires ; cette légitime a lieu sur les biens substitués au défaut de biens libres ; les petits-enfans ne la peuvent obtenir sur les biens de leur ayeul, que quand ils n’ont pas d’ailleurs d’établissement suffisant pour leur condition ; on la regle ordinairement à la moitié de la légitime de droit. Voyez la Peyrere, édition de 1717, let. L. p. 215. Albert, verbo Légitime, art. j. Voyez aussi Cambolas, & le journal du palais, à la date du 14 Mai 1672. (A)

Légitime du mari. Voyez Don mobile, & Succession, undè vir & uxor.

Légitime de la mere. Voyez ci-devant Légitime des ascendans.

Légitime naturelle, est la même chose que la légitime de droit. Voyez ci-devant Légitime du droit.

Légitime du pere. Voyez ci-devant Légitime des ascendans.

Légitime statuaire, est celle qui est réglée par le statut ou la coutume de chaque province ; c’est la même chose que ce que l’on appelle légitime coutumiere, ou reserves coutumieres. (A)

Légitime, exquisitus, ἀκριβὴς, (Pathologie.) épithete que les anciens donnoient aux maladies dont les symptômes étoient conformes à la cause qui étoit censée les produire le plus constamment ; ils appelloient par exemple, une fievre tierce légitime, lorsque les symptômes qui l’accompagnoient annonçoient un caractere bilieux dans le sang, une pléthore, surabondance de bile ; lorsque le fébril étoit extrèmement vif, aigu, pénétrant, les vomissemens, diarrhées, rapports bilieux, la langue jaune, la chaleur forte, âcre, les maux de tête violens, les sueurs abondantes, les accès assez courts, l’apyrexie bien décidée, &c. Si les accès revenans tous les deux jours n’étoient pas suivis de ces symptômes, s’ils étoient longs & modérés, par exemple, ils l’appelloient alors fausse ou bâtarde, nothia, sparia, pensant qu’une autre cause conjointement à la bile, ou même sans elle, les avoit produites.

L’on explique aujourd’hui l’idée des anciens en d’autres paroles à l’ordinaire ; on donne le nom de légitime aux maladies dont tous les symptômes, surtout les principaux pathognomoniques, sont bien évidemment marqués. Ainsi une pleurésie sera censée légitime, si la fievre est violente, la douleur de côté très-aiguë, la difficulté de respirer très-grande, le pouls vîte, dur, & serré ; si ces symptômes manquent en nombre ou en intensité, la pleurésie est appellée fausse, ψευδοπλευρῖτις.

On a encore étendu ce nom aux maladies qui ont leur siége dans la partie où est le principal symptôme, & on l’a refusé à celles qui quoique excitant à-peu-près les mêmes phénomenes, étoient situées dans d’autres parties. La pleurésie nous fournit encore un exemple pour éclaircir ceci ; lorsque le siége de l’inflammation est dans la plevre ou les muscles intercostaux internes, elle est légitime ; si elle attaque les parties extérieures, elle est appellée batarde. Il y a comme on voit dans ces dénominations souvent beaucoup d’hypothétique & d’arbitraire.

Il n’est pas rare de voir dans des écrivains trop peu exacts & rigoureux ce nom confondu avec ceux de primaire, essentiel, idiopathique : quoique la distinction ne soit peut-être pas de grande importance, elle n’en est pas moins réelle. Article de M. Ménuret.

LÉGITIMER, v. act. (Jurisprud.) c’est faire un acte de légitimation, c’est donner à un bâtard l’état d’enfant légitime. Voyez ci devant Légitimation. (A)

LEGS, s. m. (Jurisprud.) est une libéralité faite par un testateur par testament ou codicille, & qui

doit être délivrée après sa mort au légataire par l’héritier ab intestat, ou par l’héritier institué, s’il y en a un, ou par le légataire universel, lorsqu’il y en a un.

L’usage de faire des legs est probablement aussi ancien que celui des testamens. Dès que les hommes eurent inventé une maniere de regler leurs biens après leur mort, ils pratiquerent aussi l’usage des legs particuliers en faveur de leurs parens, amis, ou autres personnes auxquelles ils vouloient faire quelque libéralité, sans néanmoins leur donner la totalité de leurs biens.

Dans la Genese, liv. I. ch. xxv. v. 5. & 6. il est fait mention de legs particuliers faits par Abraham à ses enfans naturels : deditque Abraham cuncta quæ possiderat Isaac, filiis autem concubinarum largitus est munera.

On trouve encore quelque chose de plus précis pour l’usage des legs dans le prophete Ezéchiel, ch. xivj. v. 17. & 13. où en parlant du pouvoir que le prince avoit de disposer de ses biens, il prévoit le cas où il auroit fait un legs à un de ses serviteurs : si autem dederit legatum de hereditate suâ uni servorum suorum, erit illius usque ad annum remissionis, & revertetur ad principem ; hereditas autem ejus filius ejus erit, &c.

Ce même texte nous fait connoître que chez les Hébreux, il étoit permis de faire des legs à des étrangers, mais que les biens légués ne pouvoient être possédés par les légataires étrangers ou par leurs héritiers, que jusqu’à l’année du jubilé ; après quoi les biens devoient revenir aux héritiers des enfans du testateur. La liberté de disposer de ses biens par testament n’étoit pas non plus indéfinie ; ceux qui avoient des enfans ne poavoient disposer de leurs immeubles à titre perpétuel, qu’en faveur de leurs enfans.

Ces usages furent transmis par les Hébreux aux Egyptiens, & de ceux-ci aux Grecs, dont les Romains emprunterent comme on sait une partie de leurs lois.

La fameuse loi des 12 tables qui fut dressée sur les mémoires que les députés des Romains avoient rapportés d’Athenes, parle de testamens & de legs : pater familias, uti legas, sit super familia pecuniâque suâ, ita jus esto.

L’usage des testamens & des legs s’introduisit aussi dans les Gaules ; & depuis que les Romains en eurent fait la conquête, il fut reglé en partie par les lois romaines, & en partie par les coutumes de chaque pays.

Il y avoit anciennement chez les Romains quatre sortes de legs, savoir per vindicationem, damnationem, sinendi modum & per præceptionem : chacune de ces différentes especes de legs différoit des autres par la matiere, par la forme, & par l’effet.

Léguer per vindicationem, c’étoit quand le testateur donnoit directement au légataire, & en termes qui l’autorisoient à prendre lui-même la chose léguée, par exemple, do illi solidos centum, ou do, lego, capito, sumito, habeto : on appelloit ce legs per vindicationem, parce que le légataire étoit en droit de vendiquer la chose léguée contre toutes sortes de personnes, dès que l’héritier avoit accepté la succession.

Le legs per damnationem, se faisoit en ces termes, damno te heres illi dare solidos centum, ou heres meus damnas esto dare, dato, facito, heredem meum dare jubeo. Ce legs produisoit contre l’héritier en faveur du légataire, une action in personam ex testamento.

On léguoit sinendi modo en disant, damno te heres ut illi permittas illam rem accipere, ou bien heres meus damnas esto sinere Lucium Titium sumere illam rem,