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même la mere seroit de condition illustre ; pourvû qu’elle n’ait point d’enfans légitimes ; mais les bâtards incestueux ou adultérins, ou qu’elle auroit eu pendant sa viduité lorsqu’elle est de condition illustre, n’ont point de légitime.

Le Droit françois ne distingue point & ne donne aucune légitime aux bâtards, mais simplement des alimens.

Néanmoins dans quelques coutumes singulieres, telles que S. Omer & Valenciennes, où les bâtards succedent à leur mere concurremment avec les enfans légitimes ; ils ont aussi droit de légitime.

Les enfans légitimés par mariage subséquent ont pareillement droit de légitime, quand même il y auroit des enfans d’un mariage intermédiaire entre leur naissance & leur légitimation, & ne peut même par le contrat de mariage subséquent qui opere cette légitimation, déroger au droit que les légitimés ont pour la légitime ; car cette dérogation à la légitime seroit elle-même un avantage sujet à la légitime.

Lorsque le pere a réduit son fils à un simple usufruit, dans le cas de la loi si furioso, les créanciers du fils peuvent demander la distraction de la légitime.

La loi fratres, au code de inoff. testam. donne aussi une légitime aux freres germains ou consanguins, lorsque le défunt avoit disposé de ses biens par testament au profit d’une personne infame d’une infamie de droit ; l’usage a même étendu cette querelle d’inofficiosité aux donations entre vifs, & dans les pays coutumiers l’infamie de droit est un moyen pour faire anéantir toute la disposition.

En pays de Droit écrit, & dans quelques coutumes, comme Bordeaux & Dax, les ascendans ont droit de légitime dans la succession de leurs enfans décédés sans postérité légitime.

La légitime des enfans par le droit du digeste, étoit la quatrieme partie de la succession ; mais par la novelle 18, d’où est tirée l’authentique novissima, les enfans ont le tiers lorsqu’ils ne sont que quatre ou un moindre nombre, & la moitié s’ils sont cinq ou plus ; la novelle 18 a reglé pareillement la légitime des ascendans au tiers.

Quelques coutumes ont réglé la légitime, conformément au droit écrit, comme Reims & Melun.

D’autres, comme Paris, Orléans, Calais, & Chaunes, ont reglé la légitime à la moitié de ce que les enfans auroient eu si les pere & mere n’eussent pas disposé à leur préjudice.

D’autres enfin ne reglent rien sur la quotité de la légitime, & dans celle-ci on se-conforme à la coutume de Paris, si ce n’est dans quelques coutumes voisines des pays de droit écrit, où l’on suit l’esprit du droit romain.

La légitime de droit qui est celle dont on parle ici, est différente de la légitime coutumiere qui n’est autre chose que ce que les coutumes réservent aux héritiers présomptifs, soit directs ou collatéraux.

La légitime doit être laissée librement, & ne peut être grévée d’aucune charge.

Pour fixer sa quotité, on fait une masse de toutes les donations & de tous les biens délaissés au tems du décès de celui de cujus.

On compte ensuite le nombre de ceux qui font part dans la supputation de la légitime..... Dans ce nombre ne sont-point compris ceux qui ont renoncé à la succession tout-à-fait gratuitement ; mais on compte ceux qui n’ont renoncé qu’aliquo dato vel retento.

Pour le payement de la légitime on épuise d’abord les biens extans dans la succession, ensuite toutes les dispositions gratuites, en commençant par les dispositions testamentaires, & premierement les institutions d’héritier, & les legs universels, ensuite les legs particuliers.

Si ces objets ne suffisent pas, le légitimaire est en droit de se pourvoir contre les donataires entre-vifs, en s’adressant d’abord aux derniers, & remontant de l’un à l’autre, suivant l’ordre des donations, jusqu’à ce que le légitimaire soit rempli ; bien entendu que chaque donataire est lui-même en droit de retenir sa légitime.

La dot, même celle qui a été fournie en deniers, est sujette au retranchement pour la légitime, dans le même ordre que les autres donations, soit que la légitime soit demandée pendant la vie du mari, ou qu’elle ne le soit qu’aprè, sa mort, & quand il auroit joui de la dot pendant plus de 30 ans, ou même quand la fille dotée auroit renoncé à la succession par son contrat de mariage ou autrement, ou qu’elle en seroit excluse de droit, suivant la disposition des loix, coutumes, ou usages.

La légitime se regle eu égard au tems de la mort, tant par rapport aux biens que l’on doit faire rentrer dans la masse, que par rapport au nombre des personnes que l’on doit considérer pour fixer la quotité de la légitime.

On impute sur la légitime tout ce que le légitimaire a reçû à titre de libéralité de ceux sur les biens desquels il demande la légitime, tel que les donations entre-vifs, les prélegs, tout ce qui a été donné au légitimaire pour lai former un établissement, comme un office, un titre clérical, une bibliotheque, des frais & habits de noces, & généralement tout ce qui est sujet à rapport.

La légitime doit être fournie en corps héréditaires ; cependant le légitimaire ne peut pas demander que l’on morcele les biens, s’ils ne peuvent pas se partager commodément.

Les fruits & intérêts de la légitime courent du jour de la mort.

L’action que le légitimaire a contre les héritiers & donataires, dure pendant 30 ans, à compter du décès de celui qui donne ouverture à la légitime ; car pendant sa vie elle n’est pas sujette à prescription, & ne peut être purgée par decret, attendu que le droit n’est pas encore ouvert.

Voyez les novelles 18, 101, 115, & 117, les traités de legitimâ, par Benavidius, Merlinus, Carnalhus, & celui de la Champagne ; Bouchel & la Peyrere, au mot légitime, & autres auteurs qui traitent des successions. (A)

Légitime des ascendans est celle que le droit romain donne aux pere, mere, & à leur défaut, à l’ayeul & ayeule, sur les biens de leurs enfans ou petits-enfans décédés sans postérité. Voyez ce qui est dit ci-devant au mot Légitime. (A)

Légitime des collatéraux est celle que le droit donne aux freres germains ou consanguins, lorsque le défunt a disposé de ses biens par testament, au profit d’une personne infame. Voyez la loi fratres, au code de inosf. testam. (A)

Légitime coutumiere, est la portion des propres ou autres biens que les coutumes réservent à l’héritier, nonobstant toutes dispositions testamentaires qui seroient faites : au contraire on l’appelle coutumiere, parce qu’elle est opposée à la légitime de droit ; c’est la même chose que ce que l’on appelle les réserves coutumieres. Voyez Reserves. (A)

Légitime de Droit, est celle qui est établie par le Droit romain, à la différence des reserves coutumieres qu’on appelle légitime coutumiere.

Légitime des freres. Voyez ci-devant Légitime des collatéraux.

Légitime de grace, est celle dont la quotité dépend de l’arbitrage du juge, c’est-à-dire, celle que le juge accorde aux enfans sur les biens que leurs ancêtres ont substitués, & dont les pere & mere