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gesses criées par les rois & hérauts d’armes, tenant un grand pot d’or bien riche ».

C’est la derniere fois de ma connoissance qu’il est parlé de largesses dans notre histoire, & au fond, la discontinuation de cet usage frivole n’est d’aucune importance à la nation. Les vraies largesses des rois consistent dans la diminution des impots qui accablent le malheureux peuple. (D. J.)

LARGEUR, s. f. (Géom.) c’est une des trois dimensions des corps, voyez Dimension. Dans une table, par exemple, la largeur est la dimension qui concourt avec la longueur pour former l’aire ou la surface du dessus de la table. Les Géometres appellent assez communément hauteur ce que l’on nomme vulgairement largeur : ainsi, dans l’évaluation de l’aire d’un parallélogramme ou du triangle, quand ils disent multiplier la base par la hauteur, il faut entendre qu’il s’agit de multiplier la longueur par la largeur.

Ordinairement la largeur d’une surface se distingue de la longueur, en ce que la largeur est la plus petite des deux dimensions de la surface, & que la longueur est la plus grande. Ainsi on dit d’une surface qu’elle a, par exemple, vingt toises de long & quatre de large. (E)

Largeur se dit dans l’Ecriture de l’étendue horisontale des caracteres & de celle des pleins & des déliés.

Largeur, (Rubanier.) se dit lorsque les soies, après être passées en lisses & en peigne, sont toutes prêtes à être travaillées ; pour lors l’ouvrier fait environ une douzaine de pas sur ses marches, en se servant de menue ficelle au lieu de trame, seulement pour disposer cette chaîne à prendre sa largeur. On prend encore pour le même effet de vieilles dents de peigne ou même des allumettes, quand elles peuvent suffire pour la largeur nécessaire : cette opération est d’autant plus indispensable, que toutes les soies de chaîne étant attachées ensemble par un seul nœud sur le vergeon de la corde à encorder, on seroit trop long-tems à leur faire prendre la largeur requise si on travailloit réellement avec la trame qui en outre seroit perdue.

LARGO, adv. terme de Musique, qui, placé à la tête d’un air, indique un mouvement d’une lenteur modérée, & moyen entre l’andante & l’adagio. Ce mot marque qu’il faut tirer de grands sons, donner de grands coups d’archet, &c.

Le diminutif larghetto annonce un mouvement un peu plus animé que le largo, mais plus lent que l’andante. Voyez Adagio, Andante, &c. (S)

LARGUE, s. m. (Marine.) vent largue ; c’est un air de vent compris en le vent arriere & le vent de bouline. Il est le plus favorable pour le sillage, car il donne dans toutes les voiles ; au lieu que le vent en poupe ne porte que dans les voiles d’arriere, qui dérobent le vent aux voiles des mats d’avant. L’expérience a appris en général qu’un vaisseau qui fait trois lieues par heure avec un vent largue, n’en fait que deux avec un vent en poupe.

Largue, haute mer. On dit prendre le largue, tenir le largue, faire largue, pour dire prendre la haute mer, tenir la haute mer, &c.

LARGUER, v. act. (Marine.) laisser aller & filer les manœuvres quand elles sont hâlées. Larguer les écoutes, c’est détacher les écoutes pour leur donner plus de jeu. Larguer une amare, c’est détacher une corde d’où elle est attachée. On se sert encore du verbe larguer pour exprimer l’état du vaisseau : lorsque ses membres ou ses bordages se séparent ; lorsqu’il s’ouvre en quelqu’endroit, on dit alors que le vaisseau est largué.

LARIGOT, s. m. (Lutherie.) jeu d’orgue, c’est le plus aigu de tous les jeux de l’orgue ; il sonne la

quinte au-dessus de la doublette. Voyez la table du rapport de l’étendue des jeux de l’orgue, & nos Pl. d’orgue. Ce jeu, qui est de plomb, a quatre octaves d’étendue.

LARIN, s. m. (Monn. étrang.) monnoie de compte & monnoie courante de la même valeur. Elle regne au Mogol, en Arabie, en Perse, & principalement dans les golfes persiques & de Cambaye. Cette monnoie a reçu son nom de la ville de Lar, capitale du Laristan, où l’on en a d’abord fabriqué : sa figure est assez singuliere, c’est un fil d’argent de la grosseur d’un tuyau de plume de pigeon, long d’environ un travers de doigt, replié de sorte qu’un bout est un peu plus grand que l’autre. L’empreinte est marquée au coude du repli, mais il s’en trouve de plusieurs empreintes différentes, parce que plusieurs princes en font frapper. Le larin est d’un titre plus haut que l’argent de France ; & comme on le prend au poids, son usage est très-commode dans tout l’Orient. Dix larins valent une piastre, c’est-à-dire cinq de nos livres ; huit larins font un hor, & dix hors font un toman. Ainsi le larin peut s’évaluer à environ dix sols de France. (D. J.)

LARINO, (Géogr.) petite ville d’Italie au royaume de Naples, dans la Capitanate, avec un évêché suffragant de Bénevent, dont elle est à 15 lieues. Elle étoit de l’ancien Samnium. C’est le Larinum de Ciceron & de Méla. Les habitans sont nommés Larinas au singulier, & par Pline au pluriel Larinates. Le territoire de la ville, Larinas ager par Tite-Live, & Larinus ager par Cicéron. Longitude 32. 35. lat. 41. 48. (D. J.)

LARISSE, (Géogr. anc.) La seule Grece avoit plusieurs villes de ce nom ; une dans la Méonie, aux confins de l’Eolide, sur l’Hermus ; une dans la Troade au bord de la mer ; une dans la Lydie sur le Caïstre, au-dessus de Sardes, remarquable par un temple d’Apollon ; une dans l’île de Crete, une autre dans la Carie, une autre près d’Argos, &c.

Mais la fameuse Larisse, la capitale de Thessalie, mérite seule de nous arrêter ici. Elle étoit située sur la rive droite du fleuve Pénée, dans la Pélasgiotide, dixmilles au-dessus d’Astrax ; elle est nommée Larissa dans Lucain, & Larissæ dans Horace. Les Latins ont dit également Larissei & Larissenses, pour en désigner les habitans. Jupiter y étoit particulierement honoré, d’où il fut surnommé Larissus. Elle a pour symbole dans ses médailles un cheval qui court ou qui paît.

Philippe, pere d’Alexandre, ayant résolu de tourner ses armes contre les Grecs, après avoir fait une paix captieuse avec les Illyriens & les Pannoniens, choisit sa demeure dans notre Larisse, & par ce moyen gagna l’affection des Thessaliens, qui contribuerent tant par leur excellente cavalerie au succès de ses projets ambitieux. César rapporte qu’avant la bataille de Pharsale, Scipion occupoit Larisse avec une légion ; ce fut aussi la premiere place où Pompée se rendit après sa défaite : cependant il ne voulut point s’y arrêter ; il vint sur le bord de la riviere & prit un petit bateau pour aller du côté de la mer, où il trouva un navire prêt à lever l’ancre qui le reçut volontiers.

Mais ce qui immortalise encore davantage la Larisse de Thessalie, c’est d’avoir été la patrie d’Achille. Voilà pourquoi Racine fait dire à ce héros, dans Iphigénie, act. jv. sc. 6.

Jamais vaisseaux partis des rives du Scamandre,
Aux champs thessaliens oserent-ils descendre ?
Et jamais dans Larisse un lâche ravisseur
Me vint-il enlever ou ma femme ou ma sœur ?

Larisse subit le sort du pays dont elle étoit la métropole ; elle perdit sa splendeur & son lustre, atque