Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/219

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sortes, les unes sont un assemblage de marteaux pour former toutes sortes d’ouvrages plats, comme tables de cuivre de toute épaisseur, toutes sortes d’ouvrages concaves, comme chaudieres, chauderons, &c. les autres sont des trifleries ou machines à mettre le laiton en fil. Les premieres s’appellent des batteries.

Des batteries. Pour établir une batterie, il faut avoir un courant d’eau qui fournisse un pié cube, & dont la chûte soit d’environ douze à treize piés. Avec cela on fera tourner quatre roues, dont deux serviront aux martinets, la troisieme à une meule, & la quatrieme à une triflerie. Il faut être à portée de fourrages pour les chevaux qu’on employera aux charrois des bois & des cuivres. Cette situation trouvée, il faut construire un grand bassin de retenue, semblable à ceux des moulins ordinaires, mais beaucoup plus étendu. Outre ce reservoir, Il faut une seconde écluse de décharge, & un roulis pour le dégorgement dans les crues.

La muraille du reservoir tient au bâtiment de l’usine, & un second mur parallele au premier, forme l’enceinte où l’on place la roue. A l’endroit du mur qui soutient toute la hauteur de l’eau, on établit une écluse qui distribue l’eau dans une beuse qui fait tourner la roue. En un autre endroit on établit encore une beuse qui traverse le mur & porte l’eau sur une seconde roue ; cette beuse est faite de madriers de chêne bien assemblés ; elle est couverte jusqu’au lieu ou il y a une écluse semblable à la premiere, que le maître usinier peut gouverner au moyen d’un levier dont la suspension est en quelque point de l’épaisseur de la muraille qu’il traverse ; son bout fait en fourchette tient à la tige de la vanne, & son autre extrémité est tirée ou poussée de bas en haut par une gaule attachée en cet endroit par deux chaînons. Une troisieme beuse, mais beaucoup plus petite que les premieres, fait tourner une troisieme roue, à l’arbre de laquelle tient une meule qui sert à racommoder les marteaux & enclumes. Une quatrieme beuse met en mouvement la roue de la triflerie, située dans le même bâtiment, à l’extrémité.

On pratique une voûte par où l’eau de toutes les beuses s’écoule & va rejoindre le ruisseau.

L’arbre bc, d’une des roues porte à sa circonférence, fig. 13, trois rangées d, d, d, de douze mantonets chacune ; ces mantonets rencontrant les queues e, f, g, de trois marteaux h, i, k, les éleve ; mais à l’échappée de la dent, ils retombent sur l’enclume l, m, n.

L’enclume l, ou m, ou n, est enchâssée dans des ouvertures faites à des billots : ces billots sont des troncs d’arbres de chêne enfoncés de trois à quatre piés en terre, cerclés de fer, & dont les têtes sont au niveau du terrein. Il y a autour d’eux un grand enfoncement commun où descendent les jambes des ouvriers assis sur les planches o, mises en travers de cet enfoncement.

Les manches des marteaux passent dans un collet de figure ovale, dont les tourillons sont soutenus par les montants qu’on voit dans la figure citée ; ces montans sont d’un pied en quarré solidement assemblés par le haut à un chapeau pq, & au niveau du terrein par une autre piece de la même solidité, sur laquelle sont attachées des pieces de fer plates, contre lesquelles donnent les queues des marteaux : ces pieces plates font la fonction de ressort, & doublent pour ainsi dire le coup du marteau, qu’elles renvoyent à son échappement.

Il faut appliquer à l’arbre A B tout ce que nous venons de dire de l’arbre R S ; il n’y a de différence qu’en ce que l’un porte treize mantonets sur chaque rangée.

Il faut observer que les mantonets soient distribués à ne pas élever à-la-fois les trois marteaux ; ce qui

employeroit une force immense en pure perte. Il faur que quand un des marteaux frappe, l’autre échappe & que le troisieme s’éleve. Pour cet effet on divisera la circonférence de l’arbre en autant de parties égales qu’il doit y avoir de mantonets dans toutes les rangées ; ainsi, dans ce cas, en trente-six parties ; & l’on placera les mantonets de la seconde rangée de maniere qu’ils répondent aux vuides de la premiere, & les mantonets de la troisieme de maniere qu’ils répondent aux vuides de la seconde.

On voit à l’extrémité de la même Pl. IV. un fourneau : c’est-là qu’on recuit le cuivre à mesure qu’on le bat.

Les tourillons des arbres sont portés par des coussinets qui ne sont qu’à quinze pouces d’élévation au-dessus du niveau de l’usine, qui est élevée de six à sept piés au-dessus du terrein.

Ce sont des coffres qui s’appellent beuse, qui portent l’eau sur les aubes des roues. On lâche l’eau par des vannes, & les vannes sont toûjours proportionnées dans leurs levées à la quantité de marteaux qu’on fait travailler. Si l’on n’a à mouvoir que deux marteaux d’un poids médiocre, l’ouverture de l’écluse ne sera que de deux pouces six lignes. Si l’on a à mouvoir à-la-fois trois des plus gros marteaux, la levée de la vanne sera de quatre pouces six lignes. Il y a un chauderon percé de deux ou trois trous suspendu au-dessus des tourillons de l’arbre qu’il arrose de gouttes d’eau qui le rafraichissent : cette précaution est inutile ou côté des roues ; elles sont toûjours mouillées & leurs tourillons aussi.

Le mantonet en frappant la queue du marteau, la chasse devant lui, ensorte qu’ils se séparent immédiatement après le choc ; ainsi elle va porter avec force sur la piece plate qui la renvoie avec la même force.

Lorsque l’ouvrier veut arrêter son marteau, il a un bâton qu’il place sous le manche quand il s’éleve : alors le collier porte sur la plaque, & le mantonet n’engrene plus.

La queue du marteau est couverte d’une plaque recourbée, en s’arrondissant vers le mantonet ; l’autre extrémité assujettie dessous le collier, est percée de deux trous dans lesquels on met des clous qui entrent dans une espece de coin chassé avec force entre la queue de cette plaque & le manche du marteau. On fait entrer ce manche dans un collier oval, où il est fixé par d’autres coins & calles de bois. Les tourillons de ce collier oval portent dans deux madriers verticaux, garnis à cet endroit d’une bande de fer percée à cet effet : ces madriers, qui ont quatre pouces six lignes d’équarrissage, se placent dans une entaille pratiquée au montant. Comme ils sont plus courts que l’entaille, on les ressere par des morceaux de bois ou des coins. Aussi l’on peut démancher les marteaux quand on le juge à propos.

Les montants dans l’intervalle desquels les marteaux se meuvent, ont deux pouces d’équarrissage ; ils sont assujettis par le chapeau en haut ; à fleur de terre, par la traverse qui porte la piece plate, & dans la terre par une troisieme piece. Il est inutile de parler de ses appuis & de la maçonnerie solide qu’il faut pour fondement à un chassis aussi fort & qui fatigue autant. V. là-dessus l’art. Grosses Forges.

L’extrémité des manches des marteaux est en tenon d’une grandeur convenable.

Il y a deux sortes de marteaux. Des marteaux à bassin qui ne servent qu’à abbattre les plates, c’est ainsi qu’on appelle les tables destinées à faire le fil de laiton ; le plus petit pese 20 livres, & le plus gros 50. Entre ces deux limites, il y en a du poids de 23, 24, 26, 28 livres ; ils ont tous la même figure. La pointe de quelques-uns a quatre pouces de large. Il sert à battre les lames qui se couperont par filets pour faire le fil de laiton. Des marteaux qui ont assez la figure d’un