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culierement affecté aux noces ; car on lit dans Pline que le voile de l’épousée étoit jaune : les Poëtes même donnent au dieu Hymen une robe jaune & des souliers jaunes. (D. J.)

HYMÉNÉE, s. f. (Poésie.) chanson nuptiale, ou du-moins espece d’acclamation consacrée à la solemnité des noces, ἐν δὲ γάμοις ὑμέναιος, dit Athénée d’après Aristophane.

Entre les différens sujets qu’Homere a représentés sur le bouclier d’Achille, toute la ville où est placée la scene de ce tableau particulier, retentit des chants d’hyménée. Hésiode décrivant aussi sur le bouclier d’Hercule une pompe nuptiale, fait mention de ces mêmes chants. En un mot, l’épithalame dans sa naissance n’étoit autre chose que cette chanson, ce chant, cette acclamation répétée d’hymen, ô hyménée, & nous en trouvons l’origine dans l’histoire intéressante d’Hyménée, jeune homme d’Athènes, ou d’Argos.

Ce jeune homme, dont la Grece fit depuis un dieu qui présidoit au mariage, étoit d’une beauté accomplie ; né pauvre & d’une famille obscure, il se laissa surprendre aux charmes d’une athénienne de son âge, dont la naissance égaloit la fortune. La disproportion étoit trop marquée pour lui laisser la moindre espérance ; cependant à la faveur d’un déguisement dont sa jeunesse & sa beauté écartoient le soupçon, il suivoit par-tout son amante. Un jour il l’accompagna jusqu’à Eleusis avec les filles d’Athènes les plus qualifiées qui alloient offrir des sacrifices à Cérès ; il arriva qu’elles furent enlevées par des pyrates, & que les ravisseurs après avoir pris terre dans une île deserte, s’y endormirent. Hyménée saisit l’occasion favorable, tue les pyrates, revient à Athènes, déclare dans l’assemblée du peuple ce qu’il est, ce qui lui est arrivé, & promet si on lui permet d’épouser celle dont il est épris, qu’il la ramenera sans peine avec toutes ses compagnes. Il les ramena en effet, & devint le plus heureux des époux ; c’est pour cela que les Athéniens ordonnerent qu’il seroit toûjours invoqué dans la solemnité des noces, avec les dieux qu’ils en regardoient comme les protecteurs. Les Poëtes à leur tour le nommerent dieu, & lui formerent une illustre généalogie ; les uns le firent naître d’Uranie, d’autres d’Apollon & de Calliope, & d’autres enfin de Bacchus & de Vénus ; mais il nous suffit d’indiquer ici, d’après Servius, & tous les anciens commentateurs, quelle fut l’origine du chant, & de l’acclamation d’Hyménée.

Cette acclamation, dit M. l’abbé Souchay, dont nous empruntons les recherches, passa depuis dans l’épithalame, & devint un vers intercalaire, ou une espece de refrain ajusté à la mesure ; témoin Catulle imitateur de Sapho, qui répete si souvent ce vers,

Hymen, ô hymenæe, hymen ades, ô hymenæe.


& ces autres,

Io hymen, hymenæe io,
Io hymen, ô hymenæe ;


témoin encore Aristophane qui, dans sa comédie des oiseaux, acte v. scene 4, parlant du mariage de Pisthétérus avec la déesse Souveraineté, fait chanter par un demi-chœur, Ὑμὴν, ὦ Ὑμέναι, ὦ Ὑμήν, après que ce même demi-chœur a exalté en ces mots, suivant la traduction de M. Boivin, le bonheur des deux époux.

Depuis le jour célebre où la reine des dieux
Superbement ornée,
Par les sœurs du destin fut au maître des cieux
Avec pompe amenée,
On n’a point encore vû d’hymen si glorieux
Hymen, ô hyménée !

C’est ainsi que l’acclamation d’Hymen par intervalles égaux, ne fut plus le chant nuptial ordinaire, & servit seulement à marquer les vœux & les applaudissemens des chœurs, lorsque l’épithalame eut pris une forme réguliere : enfin, cette acclamation a passé jusqu’à nous d’après les Latins qui l’avoient adoptée. (D. J.)

HYMETTE (le Mont,) Géog. anc. en latin Hymettus ; Hérodote dit Hymessus : montagne de Grece dans l’Attique, près de la ville d’Athènes, au midi oriental, sur la côte du golfe Saronique.

Cette montagne est fort célebre dans les écrits des Poëtes, à cause de l’excellent miel que l’on y recueilloit.

Martial, liv. VII. epig. 87. nous dit,

Pascat & Hybla mas, pascat Hymettos apes.


Silius Italicus, liv. XIV. v. 200. s’exprime en ces mots,

Tùmque nectareis vocat ad certamen Hymettum
Audax Hybla favis.


Horace, liv. II. satyr. v. 15. se moque d’un homme délicat qui refuseroit de boire du vin de Falerne, s’il n’étoit adouci avec du miel d’Hymette.

Nisi Hymettia mella Falerno
Ne biberis diluta.

Le mont Hymette s’appelle encore aujourd’hui par quelques francs monte Metto ; mais on le nomme généralement Lamprovouni. Il est dans la Livadie, entre Sétine & le cap Colone, & s’étend depuis le golfe d’Engia jusqu’au détroit de Négrepont.

M. Spon qui a eu la curiosité de le visiter, en parle ainsi dans son voyage, tome II. p. 129. Le mont Hymette est à un mille d’Athènes, & n’a guere moins de sept à huit lieues de tour. Le dessus n’est ni habité ni cultivé ; il y a cependant un couvent de Grecs au nord de la montagne, que les Turcs nomment Cosbachi. On y fait quantité de miel qui est fort estimé, parce qu’il est moins âcre que les autres sortes de miel de la montagne, qu’il est d’une bonne consistance, d’une belle couleur d’or, & qu’il porte plus d’eau qu’aucun autre, quand on en veut faire du sorbet ou de l’hydromel.

Strabon assure que le meilleur miel du mont Hymette, étoit celui qui se recueilloit proche des mines d’argent, qui sont maintenant perdues. On l’appelloit Acapuiston, parce qu’il étoit fait sans fumée ; aussi le fait-on de même à présent sur le mont Hymette, sans étouffer les vieilles abeilles avec la fumée de soufre, comme on le pratique en quelques pays. C’est pour cela qu’elles y multiplient beaucoup, & qu’on recueille quantité de miel, non-seulement dans le couvent dont j’ai parlé, mais dans tous les autres du mont Penteli ; leurs ruches sont couvertes de cinq ou six petites planches, où les abeilles commencent d’attacher leurs rayons ; on y met un petit toît de paille par-dessus ; lorsqu’ils veulent partager leurs ruches, ils n’ont qu’à tirer pendant que les abeilles sont en campagne, la moitié des planches qui tiennent les rayons attachés, & les placer dans une autre ruche ; ils posent en même tems une ruche neuve au même endroit de la vieille, & qui est bâtie de la même façon ; alors les abeilles revenant du fourrage, prennent cette ruche pour leur ancien logis, & ne trouvant rien dedans, elles commencent à former leurs cellules.

Les herbes & les fleurs odoriférantes qui croissent au mont Hymette, ne contribuent pas peu à l’admirable manufacture de ces ouvrieres industrieuses. Enfin, le monastere grec Cosbachi fait du miel tant qu’il veut, & ne paye pour tous droits, qu’un sequin au vayvode ; le miel des autres monasteres qui