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mes prérogatives que les dieux mêmes : tels étoient Hercule, Esculape, Castor & Pollux.

Comme l’opinion commune faisoit descendre tous les morts dans les enfers, les ombres des héros même y étoient retenues, pendant que leur ame pure & dégagée de ce qu’elle avoit de périssable, joüissoit dans le ciel des plaisirs & des grandeurs de l’immortalité.

Les Grecs, après avoir fait mettre une colonne, & autres monumens sur les tombes des héros, établirent un culte pour les manes des mêmes héros, & même pour les héroïnes ; car on accorda des honneurs héroïques à des femmes. Coronis, mere d’Esculape ; Alcmene, mere d’Hercule ; Cassandre, fille de Priam ; Andromaque, Andromede, Helène, Latone, & quelques autres, joüirent de cette distinction.

Les tombeaux des héros & héroïnes étoient entourés d’un petit bois sacré, accompagné d’autels, où les parens & les amis alloient en des tems marqués, les arroser de libations, & les charger d’offrande ; & ces mêmes tombeaux joüissoient du droit d’asile ; c’est-là ce qu’on appelloit monument héroïque, ἡρῷον μνῆμα. Tel étoit le tombeau qu’Andromaque prit soin d’élever à son cher Hector ; libabat cinert Andromache.

Les Romains érigerent à leur tour des statues à ceux qu’ils regarderent comme des héros ; ils en avoient dans le Cirque, revêtues de peaux de lions, de sangliers, d’ours, ou de renards sauvages. Cette maniere de se vétir ordinaire aux premiers héros, dans le tems qu’on n’avoit point encore trouvé l’art de séparer la laine ou le poil des bêtes, fut consacrée par la religion ; de-là vient qu’ils sont représentés avec ces mêmes habillemens dans les temples & sur les médailles.

Les Grecs nommerent ἡρῷα, les tombeaux qu’ils érigerent aux demi-dieux, à ceux des héros qui leur étoient chers, & aux temples qu’ils bâtirent aux empereurs après leurs décès. Athenée parlant des honneurs rendus aux maitresses de Démétrius, joint les ἡρῷα, avec les autels qu’on leur élevoit, & les hymnes sacrées que l’on chantoit à leur gloire. Enfin, les particuliers appellerent du même nom, les monumens qu’ils bâtirent aux personnes pour lesquelles ils avoient un respect & un dévouement particulier.

On sait aussi que le mot ἥρως, a une signification fort étendue dans la langue grecque. 1°. Il signifie un homme qui par sa valeur, ou par ses bienfaits, a été mis au rang des dieux ou des demi-dieux après sa mort. 2°. Il répond au divus des Latins, titre donné aux empereurs déifiés, & ἡρῴνη répond à diva. Dans les médailles que les Grecs frapperent à l’honneur de l’infame Antinoüs, pour marquer sa consécration, ils l’appellerent indifféremment ἡρῷα, & θεὸς. 3°. Le nom de héros est souvent donné par les peres à leurs enfans décedés en bas-âge, comme cela paroît par diverses inscriptions, recueillies dans Gruter & Reinesius. 4°. Quelquefois ce nom designe simplement un homme consideré par sa valeur, ou par sa charge ; Homere l’applique non-seulement aux chefs des Grecs, mais aux Grecs en général. 5°. Enfin, pour dire quelque chose de plus, le même poëte employe le mot ἥρως, pour un domestique d’un des rivaux de Pénélope, & qui leur versoit à boire ; c’est dans l’Odyssée, liv. Σ. vers 422. (D. J.)

HERPES, sub. fém. terme de Médecine, ardeur, ou inflammation accompagnée d’un âpreté de cuir, & de l’éruption d’un grand nombre de petites pustules qui le rongent & le dévorent. Voyez Erésipelle.

Ce mot est dérivé du grec ἕρπω, paulatim gradior, parce que ces boutons rampent & se traînent d’un lieu à un autre.

Il y en a de plusieurs sortes.

L’herpe miliaire, est un assemblage d’une infinité de petites pustules qui se forment sous l’épiderme, & qui ont la grosseur d’un grain de millet. On l’appelle communément feu volage. Voyez Feu volage.

Herpes miliaire, suivant Wisemand, approche beaucoup de la nature de la gale, & demande les purgatifs mercuriels. Voyez Gale.

L’herpe simple, n’est qu’une pustule ou deux qui se forment sur le visage, de couleur blanchâtre ou jaunâtre, pointues & enflammées à leur base. Ces pustules se dessechent d’elles-mêmes, après avoir rendu le peu de pus qu’elles contiennent. Il y a une troisieme espece d’herpe, à qui l’on donne le nom de dartre. Voyez Dartre.

L’herpe corrosive, est celle dont les boutons sont rudes, causent des demangeaisons, & ulcerent les parties sur lesquelles ils se forment.

Herpes de plat-bord, (Marine.) c’est la coupe d’une lisse qui se trouve à l’avant & à l’arriere du haut des côtés d’un navire. On y met un ornement de sculpture, & cet ornement se nomme aussi herpe : il y en a quatre qui sont au plat-bord, deux à stribord, & deux à bas-bord. On peut voir dans la Planche IV. n°. 195, ce qu’on nomme herpe, & n°. 170, ce qu’on nomme plat-bord.

Herpes d’éperon, ce sont des pieces de bois taillées en balustre, qui forment la partie supérieure de l’éperon, & qui se répondent l’une à l’autre par des goutereaux.

Herpes marines ; on donne ce nom à toutes productions que la mer tire de son sein, & qu’elle jette naturellement sur ses bords, telles que l’ambre, le corail, &c. Ce mot vient de harpir, ancien mot qui signifioit prendre ; aujourd’hui l’on dit plus communément épaves de mer, plûtôt que herpes marines. (Z)

HERRNGRUND, (Géog.) petite ville de la haute-Hongrie, proche de Newsoll, remarquable par ses mines de cuivre & de vitriol. Ceux qui travaillent dans ces mines, y ont formé une ville soûterraine assez étendue ; ces mines dont Brown a donné la description dans ses voyages, sont fort riches ; car on tire de cent livres, vingt, trente livres de cuivre, & quelquefois davantage ; la plus grande partie de ce métal est attachée au rocher, d’où l’on a bien de la peine à le séparer ; & même dans quelques endroits, le métal & le rocher ne font qu’une seule masse ensemble. Les travailleurs de ces mines n’y sont pas incommodés des eaux, mais de la poussiere & de vapeurs de cuivre encore plus nuisibles à la vie. (D. J.)

HERNHUTISME, (Hist. ecclésiast.) espece de fanatisme introduit depuis quelque tems en Moravie, en Wétéravie & dans les Provinces-Unies.

Les Hernuthers sont aussi connus sous le nom de freres Moraves, & dans les mémoires pour servir à l’histoire de Brandebourg, on les appelle Zinzendorffiens. En effet le Hernhutisme doit son origine & ses progrès à M. le comte Nicolas Louis de Zinzendorf, né en 1700 & élevé à Hall dans les principes du quiétisme. Dès qu’il fut sorti de cette université en 1721, il s’appliqua à l’exécution du projet de former une petite société d’ames fideles, au milieu desquelles il pût vivre uniquement occupé d’exercices de dévotion dirigés à sa maniere. Il s’associa quelques personnes qui étoient dans ses idées, & fixa sa résidence à Bertholsdorf dans la haute Lusace, terre dont il fit l’acquisition.

Bertholsdorf fut bientôt remarquable par l’éclat de cette sorte de piété que M. de Zinzendorff y avoit introduite : la nouvelle en fut portée en Moravie par un charpentier nommé Christian David, qui avoit été autrefois dans ce pays-là, où il avoit inspiré à