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22. Elle est très-fertile, appartient aux François depuis 1650, n’est éloignée que d’environ 30 lieues de la Terre-ferme, & de 70 de la Martinique. Longit. 315. 35. lat. nord 12. 15. (D. J.)

GRENADIER, s. m. punica, genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales, disposés en rond. Le calice a la forme d’une cloche, & il est découpé ; il devient un fruit presque rond, garni d’une couronne, & divisé en plusieurs loges remplies de grains pleins de suc, attachés à un placenta & séparés des uns des autres par des membranes très-minces. Il y a dans ces grains une semence ordinairement oblongue. Tourn. inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

Le grenadier domestique, granata sive punica malus, sativa, C.B.P. 438. J. B. 1. 76. Raii, hist. 1462, &c. n’est qu’un arbrisseau, quoiqu’il s’éleve quelquefois à la hauteur d’un arbre lorsqu’on le cultive dans un terrein favorable, & qu’on en coupe les jeunes pousses. Ses branches sont menues, anguleuses, couvertes d’une écorce rougeâtre, partagées en des rameaux, armés d’épines roides, oblongues, droites. Ses feuilles sont placées sans ordre, semblables à celles du myrte ordinaire, ou de l’olivier, moins pointues, d’un verd luisant, portées sur des queues rougeâtres, garnies de veines rouges qui les traversent, & de côtes en-dessous, d’une odeur forte, urineuse, surtout si on les froisse entre les doigts. Les fleurs sortent des aisselles des branches ; elles sont en rose, à cinq pétales, de couleur écarlate : leur centre est occupé par plusieurs étamines, garnies de sommets & renfermées dans un calice de même couleur, long d’un pouce & plus, coriace, en forme de cloche, partagé en cinq lanieres, pointues, lesquelles dans la suite couronnent le nombril du fruit. Le calice se change en un fruit sphérique, un peu applati des deux côtés, de différente grosseur, qu’on nomme grenade, & qui est connu de tout le monde.

Le grenadier sauvage ressemble en tout au domestique, excepté qu’il est d’ordinaire plus épineux. Celui qui porte une fleur double s’appelle en Provence balaustier, & par les Botanistes malus punica, flore pleno majore, ou malus punica sylvestris major. Il produit d’amples fleurs, composées d’un très-grand nombre de pétales fort serrés. Les fleurs sont renfermées dans un calice qui n’est pas oblong, comme celui du grenadier domestique, mais large & applati, de couleur jaune purpurin, coriace, ligneux & divisé en plusieurs lanieres. Ses pétales sont quelquefois si nombreux, que les fleurs paroissent de grandes roses d’une couleur foncée : on les nomme balaustes quand elles sont contenues dans leur calice. Voyez Balauste.

Le fruit du grenadier sauvage ou domestique égale en grosseur nos plus belles pommes. Son écorce est médiocrement épaisse & comme du cuir, un peu dure cependant & cassante, verte & lisse avant la maturité, ensuite de couleur rouge & ridée, qui approche enfin de la couleur de la châtaigne, jaune intérieurement, d’une saveur astringente.

Ce fruit renferme plusieurs grains disposés en différentes loges, d’un rouge foncé dans les uns, de couleur d’améthyste dans les autres, remplis de beaucoup de suc vineux, quelquefois doux, quelquefois acide ou tenant le milieu entre l’un & l’autre. Ces grains sont disposés en maniere de rayon de miel, séparés par des cloisons charnues & membraneuses, qui sont comme des parois mitoyennes, ameres, tantôt blanchâtres, tantôt purpurines, & ayant un placenta situe dans le milieu. Chaque grain est semblable à un grain de raisin, & renferme une seule semence, oblongue, composée d’une écorce ligneuse, & d’une amande amere un peu astringen-

te. On trouve une espece singuliere de grenade dont

les grains ne contiennent point de semence, mais c’est par accident & par un jeu de la nature.

Le grenadier vient naturellement dans le Languedoc, la Provence, l’Espagne & l’Italie. On le cultive avec soin dans les pays tempérés ; les fleurs, les pépins de ses fruits, le suc, l’amande & l’écorce de grenade, sont d’usage. Voyez Grenade, (Matiere méd.) (D. J.)

Grenadier, (Agricult.) Entre les especes de grenadiers cultivés par les curieux, on nomme principalement le grenadier à fleur double, le grenadier panaché, le grenadier nain d’Amérique, & le grenadier à fruit. Les trois premiers sont préférables au dernier par leurs fleurs : on les encaisse d’ordinaire ; & c’est ainsi qu’ils servent d’ornement aux jardins.

On choisit pour cet effet une terre à potager de la meilleure sorte, on la passe à la claie fine ; on a du terreau ; on fait du tout un mélange, moitié l’un, moitié l’autre ; on en emplit les caisses qui doivent être proportionnées à la grandeur des grenadiers qu’on leur destine. La terre étant ainsi préparée, on plante le grenadier après en avoir accommodé les racines ; quand cet arbre est planté, on a du terreau & de bon fumier de vache, dont on épanche un doigt d’épaisseur sur la superficie de la caisse, & on donne ensuite au grenadier un ample arrosement.

Les grenadiers à fruit ne demandent pas tant de précaution : ils réussissent même mieux en pleine terre qu’en caisse ; mais il faut que ce soit en espalier principalement, & à une bonne exposition, parce que les grenades en deviennent plus grosses & plus colorées. Les grenadiers en caisse se labourent avec une houlette ou une pioche, & ceux qui sont en pleine terre avec la beche. On doit dans les grandes chaleurs les arroser fréquemment, autrement la fleur coule.

Il est essentiel de tailler les grenadiers. Le secret consiste à rogner les branches qui naissent mal placées ; on les retranche ; on conserve celles qui sont courtes & bien nourries, & on racourcit les branches dégarnies, afin de rendre le grenadier plus touffu : c’est ce qui en fait la beauté. On a soin de les pincer après leur premiere pousse de l’année, quand on voit qu’il y a quelques branches qui s’échappent. Miller donne sur cela d’excellens préceptes ; consultez-le.

Tout grenadier à fleur double, & autres qu’on éleve en caisse, ne doivent avoir le pié garni d’aucune branche, parce que ce défaut les défigure, & empêche que la tête de cet arbrisseau ne se forme agréablement. Si les grenadiers en caisse coulent, & que les trop grandes chaleurs de l’été en soient la cause, il faut les mouiller beaucoup ; & lorsque, malgré cette précaution, la coulure ne cesse point, il n’y a pas d’autre parti à prendre, que de les changer de caisses, si elles sont petites, ou bien de les rencaisser dans les mêmes, en remplissant les caisses d’une nouvelle terre préparée.

Les grenadiers s’élevent de semence ; ils se multiplient aussi de marcotes de la maniere qui suit. Supposez un grenadier de belle espece, au pié duquel il est venu quelques branches assez longues pour être couchées en terre, on en prend une, on l’émonde autant qu’on le juge à-propos, & de maniere que celle qui doit être couchée en terre soit tout-à-fait nette ; ensuite on couche cette branche dans un rayon, on l’arrête avec un petit crochet qu’on fiche en terre, on la couvre de terre, on l’arrose, & au bout de six mois elle prend racine.

S’il ne croît point de branches au pié de l’arbre, & qu’on soit obligé pour le marcoter d’avoir recours à la tête, on choisit la branche qui y paroît le plus propre ; on l’émonde, comme on l’a dit, & on la