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60 liv. de frais, & 13 liv. 18 s. 6 den. pour le propriétaire & pour la taille, font 73 liv. 18 s. 6 d. pour un arpent de blé, qui portant année commune cinq septiers, chaque septier coûte au fermier 14 15 8
Les années abondantes, l’arpent portant sept septiers, à 10 liv. le septier, le fermier perd par septier 0 11 2 
Ou par arpent 3 18 6
Les bonnes années, l’arpent portant six septiers à 12 l. le fermier perd par septier 0 6 5
Ou par arpent 1 18 6

S’il paye plus de taille qu’il n’est marqué ici, & s’il paye par arpent pour chaque année de fermage plus de 5 liv. 5 s. ses pertes sont plus considérables, à-moins que ce ne soit des terres très-bonnes[1] qui le dédommagent par le produit. Ainsi le fermier a intérêt qu’il n’y ait pas beaucoup de blé ; car il ne gagne un peu que dans les mauvaises années : je dis un peu, parce qu’il a peu à vendre, & que la consommation qui se fait chez lui à haut prix, augmente beaucoup sa dépense. Les prix des différentes années réduits aux prix communs de 15 liv. 9 s. le fermier gagne, année commune, 14 s. par septier ou 3 liv. 10 s. par arpent.

La sole de deux millions d’arpens en blé donne en total, à cinq septiers de blé par arpent, & la dixme y étant ajoûtée, 10, 944, 416 septiers, dont la valeur en argent est 169, 907, 795 liv.

De cette somme totale de 169, 907, 795 liv. il y a :

Pour la taille 7,000,000 35,000,000
Pour les propriétaires 21,000,000
Pour les fermiers 7,000,000
Pour la dixme 14,907,795 134,907,795
Pour les frais 120,000,000
Produit total 169,907,795

Il y a aussi par la grande culture deux millions d’arpens ensemencés chaque année en avoine, ou autres grains de Mars. Nous les supposerons tous ensemencés en avoine, pour éviter des détails inutiles qui nous rameneroient à-peu-près au même produit, tous ces grains étant à-peu-près de la même valeur, étant vrai aussi que l’avoine forme effectivement la plus grande partie de ce genre de récolte. On estime qu’un arpent donne, dixme prélevée, deux septiers d’avoine double mesure du septier de blé. Le septier est évalué 9 liv. Il faut retrancher un sixieme des deux septiers pour la semence ; reste pour le produit de l’arpent 15 liv. ou un septier & . Ajoûtez la dixme, le produit total est 16 livres 10 s. dont il y a :

Pour le fermage d’une année 5 5 10  
Pour la taille 2  
Pour le fermier 2 15
Pour les frais[2] 5   6 10
Pour la dixme 1 10
Produit total       16 10

Les deux millions d’arpens en avoine donnent, y compris la dixme, & soustraction faite de la semence, 3, 675,000 septiers, qui valent en argent 33, 330, 333 liv. 7 s. dont il y a :

Pour les propriétaires 10,500,000 20,000,000
Pour la taille 4,000,000
Pour les fermiers 5,500,000
Pour la dixme 3,000,000 13,000,000
Pour les frais 10,000,000
Produit total 33,000,000


Total des produits de la récolte du blé & de celle de l’avoine, traités par la grande culture.

Pour les propriétaires blé 21,000,000 31,500,000 55,000,000
avoine 10,500,000
Pour la taille blé 7,000,000 11,000,000
avoine 4,500,000
Pour les fermiers blé 7,000,000 11,500,000
avoine 5,500,000
Pour la dixme blé 14,900,000 18,000,000 148,000,000
avoine 3,100,000
Pour les frais blé 120,000,000 130,000,000
avoine 10,000,000
Produit total 203,000,000 liv.

Etat de la petite culture des grains. Nous avons observé à l’article Fermiers, déjà cité, que dans les provinces où l’on manque de laboureurs assez riches pour cultiver les terres avec des chevaux, les propriétaires ou les fermiers qui font valoir les terres sont obligés de les faire cultiver par des paysans auxquels ils fournissent des bœufs pour les labourer. Nous avons vû que les frais qu’exige cette culture, ne sont pas moins considérables que ceux de la culture qui se fait avec les chevaux ; mais qu’au défaut de l’argent qui manque dans ces provinces, c’est la terre elle-même qui subvient aux frais. On laisse des terres en friche pour la pâture des bœufs de labour, on les nourrit pendant l’hyver avec les foins que pro-

duisent les prairies ; & au lieu de payer des gages à

ceux qui labourent, on leur cede la moitié du produit que fournit la récolte.

Ainsi, excepté l’achat des bœufs, c’est la terre elle-même qui avance tous les frais de la culture, mais d’une maniere fort onéreuse au propriétaire, & encore plus à l’état ; car les terres qui restent incultes pour le pâturage des bœufs, privent le propriétaire & l’état du produit que l’on en tireroit par la culture. Les bœufs dispersés dans ces pâturages ne fournissent point de fumier ; les propriétaires confient peu de troupeaux à ces métayers ou paysans chargés de la culture de la terre, ce qui diminue extrèmement le produit des laines en France. Mais ce

  1. Les gros fermiers qui exploitent de grandes fermes & de bonnes terres qu’ils cultivent bien, gagnent davantage, quoique de bonnes terres soient affermées à un plus haut prix ; car une terre qui produit beaucoup, procure un plus grand bénéfice sur les frais & sur la semence. Mais il s’agit ici d’une estimation générale du fort au foible, par rapport à la différente valeur des terres, & aux différens états d’aisance des fermiers. On verra ci-après dans les détails, les différens rapports des revenus des terres avec les frais de culture : il est nécessaire d’y faire attention, pour juger des produits de l’agriculture relativement aux revenus des propriétaires, aux profits des fermiers, à la taille & à la dixme ; car on appercevra, à raison des divers produits, des rapports fort différens.
  2. On ne met ici que les frais de moisson, parce que les frais de culture sont compris avec ceux du blé. Voyez l’article Fermiers