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lâchemens extrèmes de l’estomac ; mais on le donne très-rarement ainsi, à cause de sa grande acreté.

On use beaucoup plus fréquemment dans les prescriptions magistrales, du gingembre confit ; celui-ci est beaucoup plus doux, mais il est encore assez actif pour réveiller doucement le jeu de l’estomac, exciter l’appétit, faciliter la digestion, donner des forces, & ce que les Medecins appellent pudiquement de la magnanimité, si on en mange plusieurs morceaux dans la journée : au reste, cette confiture est très agréable ; & on la sert assez communément sur nos tables. (b)

GINGI, (Géog.) royaume d’Asie ; ce royaume est une contrée de la côte de Coromandel, dans la presqu’île de l’Inde, en-deçà du Gange. Elle est bornée au nord par le royaume de Bisnagar, au sud par le Tanjaon, à l’est par l’Océan indien, à l’oüest par les montagnes de Gate, qui la séparent de la côte de Malabar. Son prince particulier ou naîque, est tributaire du roi de Décan ; sa ville principale est Gingi, espece de forteresse au sud du royaume de Carnate, à quatorze lieues oüest de Pondichéry. Long. suivant le P. Boucher, d’environ 100d. & suivant Desplaces,97d 21′ 30″. latit. 12d 10′. (D. J.)

GINGIRO, ou GINGER-BOMBA, (Géograph.) royaume d’Ethiopie au nord de la ligne équinoctiale, & au sud de l’Abyssinie, par laquelle il est borné au nord-est ; il est terminé à l’est par la riviere de Zébée, au sud par le Monoémugi, à l’oüest par le Mujac, au nord par la province de Gorrham : tout l’intérieur du pays nous est inconnu, personne n’y a pénétré. (D. J.)

GINGLIME, s. m. (Anatomie.) est une espece de diarthrose ou d’articulation des os. Voyez Diarthrose & Articulation.

Le ginglime est une espece d’articulation dans laquelle deux os se reçoivent mutuellement, de maniere qu’un même os reçoit & est reçû. Voyez Os.

Il y a trois sortes de ginglimes ; la premiere est lorsque le même os par la même extrémité est reçû par un seul os qu’il reçoit réciproquement en forme de charniere : telle est l’articulation de l’os du bras & de celui du coude.

La seconde est lorsqu’un os en reçoit un autre par une de ses extrémités, & qu’il est reçu dans un autre par son autre extrémité, comme le radius & le cubitus.

La troisieme espece de ginglime est celle où un os est reçû en forme de roue ou d’essieu, comme la seconde vertebre est reçue par la premiere. Chambers. (L)

GINS-ENG, s. m. (Bot. exot.) on écrit aussi genseng, ging-seng & geng-seng ; la plus célebre racine médicinale de toute l’Asie.

C’est-là cette racine si chere & si précieuse que l’on recueille avec tant d’appareil dans la Tartarie ; que les Asiatiques regardent comme une panacée souveraine, & sur laquelle les medecins chinois ont écrit des volumes entiers où ils lui donnent le nom de simple spiritueux, d’esprit pur de la terre, de recette d’immortalité.

Cette fameuse racine a un ou deux pouces de longueur : tantôt elle est plus grosse que le petit doigt, & tantôt moins, un peu raboteuse, brillante & comme transparente, le plus souvent partagée en deux branches, quelquefois en un plus grand nombre, garnie vers le bas de menues fibres : elle est roussâtre en-dehors, jaunâtre en-dedans, d’un goût acre, un peu amer, aromatique, & d’une odeur d’aromate qui n’est pas desagréable.

Le collet de cette racine est un tissu tortueux de nœuds, où sont imprégnées alternativement, soit d’un côté soit de l’autre, les traces des différentes tiges qu’elle a eues & qui marquent ainsi l’âge de cette

plante, attendu qu’elle ne produit qu’une tige par an, laquelle sort du collet & s’éleve à la hauteur d’un pié. Cette tige est unie & d’un rouge noirâtre.

Du sommet de cette tige naissent trois ou quatre queues creusées en gouttiere dans la moitié de leur longueur, qui s’étendent horisontalement, & sont disposées en rayons ou en une espece de parasol : les queues sont chacune chargée de cinq feuilles inégales, minces, oblongues, dentelées, retrécies, alongées vers la pointe, & portées sur la queue qui leur est commune, par une autre petite queue plus ou moins grande. La côte qui partage chaque feuille jette des nervures qui font un réseau en s’entrelaçant.

Au centre du nœud où se forment les queues des feuilles, s’éleve un pédicule simple, nud, d’environ cinq à six pouces, terminé par un bouquet de petites fleurs, ou par une ombelle garnie à sa naissance d’une très-petite enveloppe. Cette ombelle est composée de petits filets particuliers qui soûtiennent chacun une fleur dont le calice est très-petit, à cinq dentelures, & porté sur l’embryon. Les pétales sont au nombre de cinq, ovales, terminés en pointe, rabattus en-dehors. Les étamines sont aussi au nombre de cinq, de la longueur des pétales, & portent chacune un sommet arrondi.

Le stile est court & ordinairement partagé en deux branches, quelquefois en trois & en quatre, dont chacune est surmontée d’un stigmate : ce stile est posé sur un embryon qui en mûrissant devient une baie arrondie, profondément cannelée, couronnée, & partagée en autant de loges qu’il y avoit de branches au stile. Chaque loge contient une semence plate, en forme de rein.

Lieux de sa naissance. Le gins-eng croît dans les forêts épaisses de la Tartarie, sur le penchant des montagnes, entre les 39 & 47d. de latit. septentr. & entre le 10 & le 20d. de longitude orientale, en comptant depuis le méridien de Pékin. Le meilleur vient dans les montagnes de Tsu-toang-seng ; celui qui naît dans la Corée, & qu’on nomme ninzin, est plus épais, mou, creux en-dedans, & beaucoup inférieur au vrai gins eng.

Il n’est donc pas vrai que cette plante soit originaire de Chine, comme le dit le P. Martini, d’après quelques livres chinois qui la font croître dans la province de Pekin, sur les montagnes d’Yong-Pinfou : mais on a pû aisément s’y tromper, parce que c’est-là qu’elle arrive quand on l’apporte de la Tartarie à la Chine.

Appareil avec lequel on recueille, on seche, & on prépare cette racine. Les endroits où vient le gins-eng sont séparés de la province de Quantong, appellée Leaotong dans nos anciennes cartes, par une barriere de pieux de bois qui renferme toute cette province, & aux environs de laquelle des gardes rodent continuellement pour empêcher les Chinois d’aller chercher cette racine : cependant quelque vigilance qu’on employe, l’avidité du gain inspire aux Chinois le secret de se glisser dans ces deserts au risque de perdre leur liberté & le fruit de leurs peines, s’ils sont surpris en sortant de la province ou en y rentrant.

L’empereur qui régnoit en 1709, souhaitant que les Tartares profitassent de ce gain préférablement aux Chinois, avoit ordonné à dix mille Tartares d’aller ramasser eux-mêmes tout ce qu’ils pourroient de gins-eng, à condition que chacun d’eux en donneroit à sa majesté deux onces du meilleur, & que le reste seroit payé aux poids d’argent fin. Par ce moyen on comptoit que l’empereur en auroit cette année-là environ vingt mille livres chinoises, qui ne lui coûteroient guere que la quatrieme partie de leur valeur. Le P. Jartoux rencontra par hasard la même année quelques-uns de ces Tartares au milieu de ces affreux deserts.