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Germain Louis Chauvelin président à mortier, fut nommé garde des sceaux de France le 17 Août 1727. Ses provisions contiennent la clause, que vacation arrivant de l’office de chancelier, il demeureroit réuni à celui de garde des sceaux, sans nouvelles provisions & sans nouveau serment. Du reste elles sont conformes à celles de ses prédécesseurs, si ce n’est qu’elles ne détaillent point les droits que le roi lui attribue ; il est dit seulement que c’est pour en joüir aux honneurs, autorités, prééminences & droits, dont les pourvûs dudit office ont ci-devant joüi & usé. Il prêta serment le 18 du même mois. Le roi lui donna ensuite la charge de secrétaire d’état, avec le département des affaires étrangeres, & le fit ministre d’état. Les sceaux lui furent redemandés le 20 Février 1737, lorsqu’il fut exilé à Gros-Bois ; il y eut alors un édit de suppression de la charge de garde des sceaux créée en sa faveur. Le 21 du même mois, ils furent rendus à M. d’Aguesseau chancelier, qui les garda jusqu’au 27 Novembre 1750, qu’il les remit à M. de Saint-Florentin secrétaire d’état.

M. de Lamoignon ayant été nommé chancelier de France le neuf Décembre suivant, M. de Machault d’Arnouville, ministre d’état, conseiller au conseil royal, contrôleur-général des finances, & commandeur des ordres du roi, fut nommé garde des sceaux. Ses provisions portent que c’est pour en joüir avec pareille autorité que les chanceliers ; elles furent scellées par le roi même, qui écrivit de sa main le visa en ces termes. « Visa, LOUIS, pour création de la charge de garde des sceaux de France, en faveur de J. B. de Machault. » Il prêta serment le dix, & donna sa démission le premier Février 1757.

La forme du serment des chanceliers & gardes des sceaux de France a changé plusieurs fois.

Celle qui se trouve dans les registres du parlement en l’année 1375, ne contient rien qui soit relatif singulierement à la garde du sceau.

Mais le serment qui fut prêté par le chancelier du Prat, entre les mains du roi, le 7 Janvier 1514, est remarquable en ce qui concerne la fonction de garde des sceaux. « Quand on vous apportera, est-il dit, à sceller quelque lettre signée par le commandement du roi ; si elle n’est de justice & de raison, vous ne la scellerez point, encore que ledit seigneur le commandât par une ou deux fois : mais viendrez devers icelui seigneur, & lui remontrerez tous les points par lesquels ladite lettre n’est raisonnable ; & après que aura entendu lesdits points, s’il vous commande de la sceller, la scellerez, car lors le péché en sera sur ledit seigneur & non sur vous : exalterez à votre pouvoir les bons, savans, & vertueux personnages, les promouverez & ferez promouvoir aux états & offices de judicature, dont avertirez le roi quand les vacations d’iceux offices arriveront, &c. »

La forme particuliere du serment pour la charge & commission de garde des sceaux, est telle :

« Vous jurez Dieu votre créateur, & sur la part que vous prétendez en paradis, que bien & loyaument vous servirez le roi à la garde des sceaux qu’il vous a commise & commet présentement par moi, ayant de lui suffisant pouvoir en cette partie ; que vous garderez & observerez, & ferez garder, observer & entretenir inviolablement les autorités & droits de justice, de sa couronne & de son domaine, sans faire ni souffrir faire aucuns abus, corruptions & malversations, ne autre chose que ce soit ou puisse être, directement ou indirectement, contraire, préjudiciable, ni dommageable à iceux ; que vous n’accorderez, expédierez, ne ferez sceller aucunes lettres inciviles & déraisonnables, ni qui soient contre les commandemens & volontés dudit seigneur, ou qui puissent préjudicier à ses droits & autorités, priviléges, franchises & libertés de son royaume ; que

vous tiendrez la main à l’observation de ses ordonnances, mandemens, édits, & à la punition des transgresseurs & contrevenans à iceux ; que vous ne prendrez ni n’accepterez d’aucun roi, prince, potentat, seigneurie, communauté, ne autre personnage particulier, de quelque qualité & condition qu’il soit, aucuns états, pensions, dons, présens & bienfaits, si ce n’est des grés & consentement dudit seigneur ; & si aucuns vous en avoient jà été promis, vous les quitterez & renoncerez ; & généralement vous ferez, exécuterez ; & accomplirez en cette charge & commission de garde des sceaux du roi, en ce qui la concerne & en dépend, tout ce qu’un bon, vrai & loyal chancelier de France, duquel vous tenez le lieu, peut & doit faire pour son devoir en la qualité de sa charge : & ainsi vous le promettez & jurez ».

Le garde des sceaux prête serment entre les mains du roi. Ses provisions lui donnent le titre de chevalier ; elles sont enregistrées au parlement, au grand-conseil, en la chambre des comptes, & en la cour des aides.

Son habillement est le même que celui du chancelier ; & aux Te Deum, il a un siége de la même forme que celui du chancelier, mais placé à sa gauche. Il porte toûjours sur lui la clé du sceau.

Il a au-dessus de ses armes le mortier à double galon, semblable à celui du chancelier ; derriere ses armes le manteau & deux masses passées en sautoir, en signe de celles que les huissiers de la chancellerie portent devant lui dans les cérémonies.

Lorsqu’il va par la ville ou en voyage, il est toûjours accompagné d’un lieutenant de la prevôté de l’hôtel, qu’on appelle le lieutenant du sceau ; & de deux hocquetons ou gardes de la prevôté de l’hôtel, qui ont des charges particulieres attachées à la garde du sceau.

Il siége au conseil du roi immédiatement après le chancelier.

Sa fonction à l’égard de la grande-chancellerie, consiste à présider au sceau, lequel se tient chez lui pour les lettres de grande-chancellerie. Il est juge souverain de la forme & du fond de toutes les expéditions que l’on présente au sceau. C’est à lui que l’on fait le rapport de toutes les lettres ; & il dépend de lui de les accorder ou refuser : le scelleur n’appose le sceau sur aucune que de son ordre.

Il a droit de visa sur toutes les lettres qui sont sujettes, appellées lettres de charte, qui sont adressées à tous, présens & à venir.

Il a aussi inspection sur toutes les autres chancelleries établies près des cours, conseils & présidiaux. Il nomme à tous les offices de ces chancelleries ; ses nominations sont intitulées de son nom, signées par lui, contre-signées de son secrétaire, scellées de son sceau & contre-sceaux particuliers. Les principaux officiers lui doivent à leur réception un droit de robe & un droit de serment, pour le serment qu’ils prêtent entre ses mains, ou entre celles de la personne qu’il commet à cet effet sur les lieux. Enfin il a sur ces offices le droit de survivance & le droit de casualité ; au moyen de quoi ceux qui ont les offices sujets à ce droit, lui payent la paulette.

C’est lui qui reçoit le serment des gouverneurs particuliers de toutes les villes du royaume.

C’est lui qui accorde toutes les lettres de pardon, rémission, abolition, commutation de peine, érection en marquisat, comté, baronnie, & autres graces dépendantes du sceau.

Il a le droit de placer les indults sur les collateurs du royaume.

Ceux qui voudront en savoir davantage sur les honneurs, fonctions, droits & prérogatives attachés à la dignité de garde des sceaux, peuvent consulter l’histoire de la chancellerie par Tessereau ; Joly, des