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vous en servez pour donner ce qu’on appelle le fond, à vos peaux lustrées : mais pour un cent de peaux de renard, il n’en faut que 25 pintes ; vous séparerez cette quantité en deux ; vous tiendrez l’une à part, & vous tremperez vos peaux dans l’autre. A mesure que vous les tremperez, vous les tordrez bien, & vous les jetterez dans le cuvier, où vous aurez mis séparément le restant de votre composition. Quand elles y seront toutes, vous y entrerez les jambes nues ; les foulerez, & les tiendrez dans ce cuvier pendant deux jours, les foulant de huit en huit heures. Cela fait, vous les tordrez ; vous les prendrez par le dessus du quarré & le bas de la culée, & les secouerez fortement pour faire revenir le poil ; & pour que les peaux sechent plus facilement, vous les étendrez sur un cordeau à l’air : vous ne les quitterez point pendant ce tems ; vous vous occuperez à en manier le cuir, pour l’empêcher de durcir, toûjours secouant la peau, la corrompant avec les mains, & restituant le poil à sa place.

Lorsque les peaux sont seches, on refait de la composition ou du lustre ; & l’on en redonne une couche, afin de replacer entierement le poil. On les fait sécher ; seches, on les porte à la cave, où on les étend le cuir contre la terre, afin de leur faire prendre de l’humidité : alors on a un peu de sain-doux dont on les frotte legerement sur le cuir ; frottées, on les triballe, comme on a dit ; triballées & tirées, on les passe au tonneau à dégraisser : mais il faut bien le nettoyer auparavant du plâtre & des cendres qui ont servi à passer auparavant d’autres peaux ; parce que le lustre ne se dégraisse pas ainsi, mais avec du sable bien menu, qu’on fait chauffer d’une chaleur à pouvoir être supportée par la main. Il faut pour une quinzaine de peaux de renard, un demi-seau de sable : on le met chaud dans le tonneau avec les peaux ; on tourne le tonneau, comme on a dit ci-dessus, pendant une demi heure ; après quoi on les en tire : on les secoue l’une après l’autre dans le tonneau, & l’on en remet quinze autres dans le même sable : c’est ainsi qu’on enleve le plus gros du lustre ; vous détachez le reste avec d’autre sable. Si votre sable vous paroît bien noir, vous repassez encore une fois, pour vous assûrer qu’il ne reste point de lustre superflu. Après ce travail, vous les appliquez les unes contre les autres, poil contre poil, & vous les gardez : mais vous ne pouvez être trop attentif à ce qu’elles ne fassent aucun pli dans le poil ; les peaux se travaillant encore sur elles-mêmes, ce pli resteroit.

Autre composition ou lustre. Prenez trois livres de noix de galle ; trois onces de verd-de-gris ; quatre onces de sel ammoniac ; deux once d’alun de Rome ; deux onces de litharge d’or ; deux onces d’antimoine ; huit onces de couperose verte : pilez le tout ensemble dans un mortier, excepté la noix de galle, que vous délayez séparément dans un bacquet, après l’avoir pilée avec l’eau de chaux. Vous délayerez le reste des ingrédiens dans un bacquet, au sortir de votre mortier, avec de pareille eau : cela fait, vous mêlerez le tout, qui ne doit faire qu’environ dix à douze pintes. Ce lustre préparé, vous vous en servirez comme du précédent.

Autre composition pour donner à la fouine la couleur de la marte.

Prenez deux livres de noix de galle cuite, & demi-livre crue, également pilée ; trois livres de mine de-plomb rouge ; une livre de sumac. Détrempez ces ingrédiens avec eau de riviere ou de citerne ; ajoûtez-y ce qui sera tombé de votre lustre, & le marc qui sera resté dans les bacquets. Détrempez le tout dans trois seaux d’eau ; ajoûtez une livre de litharge d’or, une livre d’alun de glace, une livre de couperose verte, une demi-livre de sel ammoniac, une livre de verd-de-gris, un quarteron d’antimoine

crud, & deux livres de plomb de maire. Pilez le tout ensemble, & le mêlez avec la noix de galle. Prenez ensuite une grande terrine vernissée, où vous mettrez environ la moitié d’une pinte de votre composition. Vous y tremperez les peaux de fouines quatre à quatre, en les y plongeant & soulant, afin que le poil prenne le lustre par-tout ; vous les torderez, secouerez, & mettrez dans le bacquet avec le restant de votre composition qu’elles n’auront pas bûe ; vous les y foulerez avec les piés ; vous les y laisserez un jour & demi. Au bout duquel, plaçant une planche en-travers au-dessus du bacquet, vous les en tirerez & les étendrez sur la planche l’une sur l’autre, pour égoutter. Elles égoutteront jusqu’au lendemain, ce qui leur fera prendre le fond. De-là vous les porterez à la riviere, où vous les laverez jusqu’à ce que l’eau en sorte claire. Ensuite vous les ferez sécher ; seches, vous leur donnerez une couche avec la même eau qui leur a fait prendre le fond ; réiterez cette couche plusieurs fois, & à chaque fois faites sécher au soleil. Lorsque vous leur trouverez la couleur de marte, vous les exposerez à l’humidité pour les radoucir avec la graisse : & vous finirez par les dégraisser dans le tonneau, comme nous l’avons dit ailleurs.

Si vous voulez que les peaux de renard prennent parfaitement le lustre, ayez une pierre de chaux de la grosseur de quatre œufs : mettez-la dans un bacquet avec quatre pintes d’eau ; ajoûtez une demi-livre d’alun ; prenez une peau de renard non lustrée : trempez votre brosse dans cette composition : frottez-en votre peau comme pour la lustrer ; mais ne frottez pas à fond : passez la brosse superficiellement ; il ne s’agit que de faire prendre cette préparation à la pointe du poil de renard, qui est blanchâtre ou grisâtre. Cela fait, exposez vos peaux au soleil ; séchez, battez-les à la baguette ; brossez-les bien, & les lustrez ensuite comme nous avons dit plus haut.

Préparation des peaux de chien. Prenez une pierre de chaux de la grosseur de la forme d’un chapeau : mettez-la dans douze pintes d’eau ; lorsqu’elle sera éteinte, prenez deux livres de couperose verte, une livre & demie d’alun de Rome, une livre de verd-de-gris, & deux livres de litharge d’or ; jettez tout dans la chaux éteinte ; transvasez ensuite dans une grande chaudiere de cuivre, que vous tiendrez sur le feu jusqu’à ce que le mélange soit réduit à quatre à cinq pintes. Cela fait, approchez une table de votre chaudiere ; étendez dessus les peaux de chien les unes après les autres : prenez une brosse, trempez la dans la composition : brossez ensuite vos peaux chaudement par-tout, & sur-tout aux endroits où il y a du poil blanc. Cette premiere préparation sert à disposer les peaux à prendre le lustre plus facilement. On appelle en général ces préliminaires de lustre, le barbareau, & l’on dit donner le barbareau.

Pour tigrer les peaux de chien, donner à des lapins gris une façon de Genette, imiter la panthere, tigrer des lapins blancs, & généralement pour moucheter toutes sortes de peaux, servez-vous de la composition suivante.

Prenez une pierre de chaux du poids d’une livre, éteignez-la dans de l’urine : ajoûtez ensuite de l’eau avec un peu d’alun, une demi-livre ou environ que vous ferez bouillir pendant une heure ; observez que tout votre mélange n’excede pas la quantité de trois pintes. Prenez les peaux que vous voulez tigrer : donnez-leur une couche de cette drogue par-tout, sans déranger le poil, & frottant toûjours avec votre brosse en descendant de la tête à la culée. Cela fait, exposez au soleil ; il faut qu’elles soient sechées & battues le même jour où la préparation précédente leur a été donnée. Quand vous les aurez battues jus, qu’à ce qu’il n’en sorte plus de poussiere, brossez-les