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Ce fourneau, comme on le peut voir, a encore beaucoup de ressemblance avec celui de fusion de M. Cramer, fig. 26. & suiv. Néanmoins il y a entre eux des différences essentielles qui nous les ont fait admettre tous les deux. Celui de M. Cramer est plus composé & plus varié, & conséquemment peut être appliqué à plus d’opérations ; mais celui de M. Pott donne le plus fort degré de feu qui ait jamais été produit par aucun fourneau.

La fig. 39-44. trouvera aussi sa place avec les fourneaux de fusion, quoiqu’elle serve plus particulierement à la vitrification des terres, pierres, &c. qui n’est au fond qu’une fusion de ces mêmes corps. Le fourneau nécessaire à ces sortes d’expériences, se trouve représenté dans la Pl. XI. de l’art de la Verrerie de Kunchel, mise en françois par M. le baron d’Holbach. Mais comme M. Cramer s’en est beaucoup servi pour les émaux, &c. il l’a corrigé de façon que le feu peut être donné plus fort aux vaisseaux, qu’on y peut introduire plus de choses, & que les torréfactions & calcinations nécessairement longues en pareil cas, peuvent se faire en même tems que le reste.

Pour le construire, on employe des pierres capables de soûtenir la violence du feu. C’est ce qu’il est aisé de connoître, si l’on se sert d’une pierre pareille pour soûtenir un creuset dans lequel on fait une fusion qui demande un feu vif, telle que celle du cuivre ; car si elle n’adhere pas au fond du creuset, quand on le retire ; si elle ne prend point de vernis, à-moins que ce ne soit un très-leger enduit ; si elle ne se gerse point, & si elle garde sa dureté étant refroidie, alors on peut être sûr qu’elle a toutes les qualités requises. Il faut rejetter comme mauvaises celles qui, après avoir soûtenu un grand feu, se fendent en refroidissant. On peut se servir pour mortier de la composition argilleuse dont on a fait les briques du fourneau, si c’en est qu’on employe, ou celle dont on a fait les moufles d’essai. On observera que les pierres joignent si bien entr’elles, que le trait de rustique soit très-petit, c’est-à-dire qu’une legere couche de mortier suffise pour les maçonner.

Il faut qu’il y ait dans le lieu où l’on construira le fourneau en question une cheminée pompant bien la fumée ; que toutes les grandes ouvertures qui s’y trouvent puissent être fermées exactement ; & que le fourneau soit placé près de la cheminée, de façon que l’artiste puisse tourner librement autour.

La figure extérieure d’un fourneau peut être celle d’un cylindre terminé par une voûte. Son diametre sera de 24 pouces, ou plus, selon la différence des pierres : sa hauteur de 48 ; l’épaisseur du mur dans les endroits les plus minces sera au-moins de quatre pouces ou de six : sa cavité intérieure sera divisée en chambres, dont la voûte doit suivre la direction d’une ligne parabolique. La plus basse qui sert pour le cendrier, sera haute de 12 pouces, & son plus grand diametre ou l’inférieur en aura 14, & ainsi l’on voit quelle est la direction de la ligne parabolique. On fera à sa voûte une ouverture de 10 pouces de diametre ; en sorte qu’il ne restera sur son dos qu’un bord circulaire de deux pouces. Ce bord sert à soûtenir des barres de fer équarries que l’on met sur cette ouverture, au lieu d’une grille. On scelle ces barres à l’endroit du rebord d’une couche de lut de même épaisseur, qu’on applanit avec soin, pour qu’elle puisse recevoir les vaisseaux qu’on y place de toutes parts. On laisse à la base du cendrier une ouverture ou soupirail en quarré long, large de six pouces sur quatre de haut, qui se ferme avec une porte de fer roulant sur des gonds.

La seconde chambre élevée sur la premiere, est le foyer ou lieu recevant l’aliment du feu. Elle est de même largeur & hauteur que la précédente, excep-

té que les pierres n’en soûtiennent pas si bien l’action

du feu. C’est pour cette raison qu’on lui donne quelques pouces de plus en largeur, & qu’on remplit cet excédent d’un garni soûtenant la derniere violence du feu. Ce garni se fait, si l’on n’en a point d’autre, de creusets d’ipsen pilés, qu’on mêle avec l’argille la plus réfractaire qu’on peut trouver. Au milieu de la voûte est un trou circulaire de six pouces de diametre, dans la circonférence duquel la voûte n’a qu’un doigt d’épais. Sur le dos de cette voûte est un emplacement large de quatre pouces, servant à mettre les vaisseaux. Dans la circonférence de cette chambre on fait sept portes arquées, à égales distances les unes des autres, six desquelles sont larges & hautes de six pouces, & dont la septieme a deux pouces de plus. Leurs bases sont éloignées de deux pouces de la couche du lut qui assujettit les barres de fer, laquelle doit être regardée comme le pavé de cette chambre. Le mur du fourneau est diminué d’un tiers de son épaisseur, entre la base de chaque porte & le sol de la chambre. Toutes les portes sont garnies de fermetures roulant sur des gonds, faites ainsi que nous venons de le dire, en décrivant la fig. 26. & couvertes d’un garni de deux doigts d’épais ; elles seront reçues dans une feuillure large de quelques lignes, & de même profondeur que l’épaisseur du garni. Chaque fermeture a d’ailleurs à sa partie supérieure un petit trou, à-travers duquel on peut voir aisément ce qui se passe dans le fourneau.

La troisieme chambre, supérieure à la seconde, est parfaitement semblable aux deux précédentes, si ce n’est que sa voûte est plus basse de deux pouces, & que le trou au moyen duquel elle communique avec la quatrieme chambre, est de quatre pouces en quarré seulement, & n’est pas dans le milieu.

La quatrieme & derniere chambre est de même largeur que les autres ; mais sa voûte n’est élevée que de huit pouces. A l’opposite du trou qui établit la communication de cette chambre-ci avec l’inférieure, & à deux pouces de son pavé, est un tuyau cylindrique de tôle de quatre pouces de diametre, servant à déterminer la fumée & la flamme dans cette chambre. Entre ce trou & ce tuyau ou cheminée, est une ouverture haute & large de six pouces, commençant dès le sol de la chambre. Elle est garnie d’une fermeture de fer, & sert à introduire & retirer les vaisseaux. Ce fourneau est exécuté dans le laboratoire de M. Roüelle.

On se sert de ce fourneau de la maniere qui suit. On allume le feu dans la seconde chambre ; il se fait de charbon ou de bois sec, & principalement de hêtre, qu’on y introduit par la maîtresse porte. Mais il est bon d’observer les choses suivantes, quant au choix d’une pâture propre à donner un feu violent en général. Si l’on veut donner la derniere violence du feu à un vaisseau absolument couvert de son aliment, il faut que les charbons soient petits ou d’une grosseur médiocre, & que les tourtes n’ayent pas plus de trois doigts de haut, si les vaisseaux sont grands, ni moins d’un, s’ils sont petits. Mais si l’on met les vaisseaux à côté ou dessus l’aliment du feu, comme il arrive d’ordinaire dans ce fourneau, pour leur donner la chaleur & la flamme la plus vive, il faut préférer en ce cas le bois & les gros charbons. Maintenant si l’on fait dans le mur du laboratoire une ouverture un peu grande, ou du moins égale au soupirail, qu’on établisse un canal de tôle ou de planches qui conduise de l’un à l’autre, & qu’on ferme d’ailleurs le laboratoire de tous côtés, pour qu’il n’y entre que peu d’air : alors son action est d’autant plus rapide par ce canal, que la cheminée du laboratoire est échauffée ; de sorte qu’on parvient à donner au feu un degré de la derniere violence. Il sera si vif aux petites portes de la seconde chambre, que