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en deux livres. Le premier contient des formules des lettres qui s’expédioient aux palais des rois, chartæ regales. L’autre livre contient celles qui étoient données devant le comte ou les juges des lieux, appellées chartæ pagenses. Cet ouvrage est nécessaire pour bien entendre l’histoire de nos rois de la premiere race, & la jurisprudence qui avoit lieu alors. Jerôme Bignon dont on a parlé ci-dessus, publia cet ouvrage en un volume in-8°. qu’il enrichit de savantes remarques. Il y a joint des formules romaines, & d’autres anciennes formules françoises dont l’auteur est incertain. (A)

Formules des Actes, qu’on appelle aussi formules simplement, se prennent en plusieurs sens différens. On entend quelquefois par-là le style uniforme que l’on avoit projetté d’établir pour les actes & procédures ; quelquefois la marque & inscription qui est au-haut du papier & du parchemin timbrés : quelquefois par formule on entend le papier même ou parchemin qui est timbré.

L’origine des formules en France vient des ordonnances que Louis XIV. fit faire pour la réformation de la justice, & notamment celles des mois d’Avril 1667, Août 1669 & 1670. Aussi-tôt que la premiere de ces ordonnances parut, le roi crut que pour rendre à ses sujets l’exécution des ordonnances plus facile, & afin qu’il y eût à l’avenir un style uniforme dans toutes les cours, il devoit faire dresser des formules tant des exploits que des autres procédures, actes & formalités nécessaires dans la poursuite des procès. On commença donc par dresser des formules pour l’exécution de l’ordonnance de 1667, lesquelles furent vûes & examinées dans le conseil de réformation, & arrêtées pour servir de regle & de modele à tous les praticiens & autres sujets du roi. Le recueil de ces formules fut imprimé en un volume in-4°. en 1668. Il ne paroît pas que l’on ait fait le même travail sur les autres ordonnances.

Cependant par un édit du mois de Mars 1673, le roi annonça encore qu’il avoit estimé nécessaire de faire dresser en formules les actes & procédures les plus ordinaires, en conformité des nouvelles ordonnances, pour être lesdites formules portées dans chaque siége, & y être observées sans aucun changement ; & pour faciliter l’observation de ces formules & ôter tout prétexte de s’en écarter, il ordonna que ces formules seroient imprimées, & que les officiers publics se serviroient de ces imprimés, tant pour les originaux que pour les copies de leurs actes, dans lesquelles formules ils rempliroient à la main les blancs de ce qui seroit propre à chaque acte. Les motifs allégués dans cet édit, étoient de rendre le style uniforme dans tous les tribunaux ; de prévenir les fautes où tombent souvent des copistes peu intelligens ; de rendre l’instruction des procès plus prompte & plus facile, & de diminuer les frais. Ces formules imprimées avoient paru si commodes, que l’on s’en servoit déjà dans l’instruction de différentes affaires & procès, & que néanmoins les parties n’en tiroient point d’avantage, vû qu’on leur faisoit toûjours payer les mêmes droits, que si les actes étoient entierement écrits à la main.

L’édit ordonna en conséquence que les huissiers, sergens, procureurs, greffiers & autres officiers ministres de justice des conseils de S. M. parlemens, grand-conseil & autres cours, siéges & justices royales, & ceux des justices des seigneurs, mêmes des officialités & autres jurisdictions tant ordinaires qu’extraordinaires, seroient tenus, chacun à leur égard, de se servir, tant pour originaux que pour copies, des formules d’exploits, procédures & autres actes judiciaires, pour être les blancs des imprimés remplis, & par eux employés à leurs usages ; qu’à cet effet il seroit dressé un recueil de ces formules, qui seroit ar-

rêté par S. M. & envoyé dans toutes les cours premieres

& principales, pour y avoir recours & servir de modele aux imprimés des formules.

Qu’il seroit fait un autre recueil des formules des contrats, obligations & autres actes les plus communs & usités, & qui sont journellement passés par les notaires & tabellions, soit royaux, apostoliques ou des seigneurs ; comme aussi des lettres de mer, connoissemens, chartes parties, & autres actes & contrats maritimes, pour servir aux écrivains de vaisseau.

Qu’il seroit pareillement fait un recueil des lettres les plus ordinaires de justice, finance & de grace, tant de la grande chancellerie, que de celles qui servent près les cours & présidiaux, & des provisions des bénéfices & offices, des lettres des Arts & Métiers, & autres de toute nature.

Que l’on feroit pareillement un recueil des formules des lettres de provisions, présentations & nominations de bénéfices des archevêques, évêques, chapitres, abbés, & autres collateurs & patrons ecclésiastiques, & généralement de toutes les lettres qui sont données par les archevêques & évêques ; comme aussi des lettres de maître-ès-arts, de bachelier, de licentié & de docteur en toutes les facultés des universités, & de toutes les autres lettres qui s’expédient dans les secrétariats des universités, & de celles qui sont données par toutes autres communautés ecclésiastiques & séculieres.

Enfin qu’il seroit aussi fait un recueil des formules des quittances, qui s’expédient annuellement pour les revenus casuels de S. M. marc-d’or, recette générale des finances & particulieres des tailles, payeurs des rentes sur la ville de Paris, & généralement par tous les officiers comptables ; ensemble par les rentiers & autres parties prenantes ; comme aussi des acquits, certificats, passeports, passavants & autres actes qui servent à la régie de nos fermes & perception de nos droits, même des commissions des tailles des paroisses.

Que sur les modeles de ces formules seroient imprimés les exemplaires, qui seroient employés par ceux qui s’en devoient servir, soit en parchemin ou en papier, suivant l’usage ; & que toutes ces formules imprimées seroient marquées en tête d’une fleur-de-lis, & timbrées de la qualité & substance des actes.

On devoit, sous peine de nullité des actes, se servir des exemplaires imprimés, trois mois après que les recueils de formules auroient été mis au greffe des cours.

Cet édit fut registré au parlement, le roi y séant en son lit de justice, le 23 Mars 1673. Il fut registré le même jour en la chambre des comptes, de l’ordre de S. M. porté par Monsieur, son frere unique, assisté du maréchal du Plessis-Praslin & des conseillers d’état.

Par une déclaration du 30 Juin suivant, le roi ordonna que les recueils de formules & le tarif arrêté en son conseil le 22 Avril précédent, seroient enregistrés dans toutes ses cours.

Cette déclaration fut portée au parlement de Paris, avec les recueils de formules & le tarif des droits ; mais elle n’y fut point enregistrée, à cause de l’inconvénient que l’on trouva dans les formules, qui ne pouvoient servir à tous les divers actes dont la disposition est différente, selon les personnes, les lieux & les choses.

Le roi voulant accélérer la perception des droits portés par le tarif des formules, pour fournir aux dépenses de la guerre qu’il faisoit en personne, donna une autre déclaration le 2 Juillet 1673, par laquelle il ordonna que le travail commencé pour dresser les formules seroit continué & achevé, pour