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* Fin, (Morale.) c’est la derniere des raisons que nous avons d’agir, ou celle que nous regardons comme telle ; ainsi l’on demande à un homme, à quelle fin avez-vous fait cette démarche ? quelle fin vous proposiez-vous dans cette occasion ? Pressez un homme de motifs en motifs, & vous trouverez que son bonheur particulier est toûjours la fin derniere de toutes ses actions refléchies.

Fin, (Jurispr.) dans le style judiciaire, signifie en genéral but & objet.

Fin civile, est lorsque la procédure est dirigée au civil ; on se sert de ce terme lorsque dans un procès criminel on demande que les parties soient reçûes en procès ordinaire : on dit communément que les parties seront renvoyées à fins civiles.

Fins et conclusions, sont termes synonymes qui signifient l’objet d’une demande.

Fin de nullité, c’est la demande tendante à faire déclarer nulle quelque procédure ou autre acte.

Fins de non payer ; on se sert au palais de cette expression pour signifier des moyens par lesquels un débiteur cherche à éluder le payement de ce qu’il doit.

Fins de non procéder, sont des moyens de forme à la faveur desquels on soûtient que l’on doit être dispensé d’aller en avant sur une demande, jusqu’à ce qu’il ait été statué sur ces fins ou conclusions ; telles sont les exceptions dilatoires, les exceptions déclinatoires, les moyens de nullité, & autres exceptions péremptoires qui se tirent de la forme & non du fond de la contestation. Les fins de non procéder doivent être proposées avant d’avoir contesté au fond, autrement on n’y est plus recevable, excepté lorsqu’il s’agit d’un déclinatoire fondé sur l’incompétence du juge, ratione materiæ : comme quand une matiere temporelle est portée devant un juge d’église ; car une incompétence de cette espece, qui est une fin de non procéder, peut être proposée en tout état de cause. L’ordonnance de 1667, tit. vj. des fins de non procéder, art. 3. veut que ces sortes de causes soient jugées sommairement à l’audience, sans pouvoir les appointer : il y a néanmoins quelquefois des cas où les juges sont obligés de le faire, comme lorsque la décision d’un déclinatoire dépend de faits, & qu’il y a des enquêtes & des titres à examiner. Voyez Bornier, sur l’article 3 que l’on a cité.

Fins de non-recevoir, est toute exception péremptoire au moyen de laquelle on est dispensé d’entrer dans la discussion du fond.

Les fins de non-recevoir se tirent 1°. de la forme ; par exemple, lorsqu’une femme forme une demande sans être autorisée de son mari, ou un mineur sans être assisté de son tuteur ou curateur.

2°. Il y en a qui se tirent du défaut de qualité, comme quand on oppose au demandeur qu’il n’est point héritier de celui dont il reclame les droits.

3°. Du laps de tems, savoir quand il y a quelque prescription acquise.

Aux termes de l’article 5 du tit. v. de l’ordonnance de 1667, les fins de non-recevoir doivent être employées dans les défenses, pour y être préalablement fait droit. (A)

Fin de voiles, (Marine.) Un vaisseau est fin de voiles, lorsqu’il est leger, qu’il porte bien la voile, & qu’il marche très-bien. (Z)

Fin, (Chimie, Métallurgie.) se dit substantivement de l’or & de l’argent, qui sont des métaux parfaits, par opposition au cuivre, à l’étain, au plomb, & au fer, qui sont des métaux imparfaits. On essaie le cuivre pour savoir si le fin (c’est-à-dire l’or & l’argent) qu’il contient peut dédommager des frais du rafraîchissement, de la liquation, du ressuage, & de l’affinage, voyez ces articles, & donner encore quelque bénéfice. Un bon essayeur doit retirer tout le fin qui

peut être contenu dans un alliage, sans y laisser la moindre matiere hétérogene. On fait des essais des scories, pour savoir si elles ne contiennent point encore quelque peu de fin. Le mélange d’argent & de plomb qu’on laisse refroidir sans le remuer, ne contient pas une égale quantité de fin dans toutes les différentes parties de sa masse. Voyez Lotissage. Ainsi on leve les essais du plomb encore en bain, pour savoir s’il peut être affiné avec bénéfice, ou si le fin qu’il contient payera les frais de l’affinage : mais il ne faut pas confondre le fin qu’on retire ainsi d’un plomb sortant du catin de réception dans les travaux en grand, pour savoir s’il peut être affiné avec bénéfice, avec le grain de fin qu’on retire d’un plomb granulé en masse, affiné ou non, pour le défalquer ensuite de l’essai auquel on l’employe. Voyez Grain de fin. Fin se dit aussi adjectivement d’un métal imparfait, mais pur, par opposition à son état d’impureté. Un quintal de cuivre maté peut donner vingt livres de cuivre fin : l’étain d’Angleterre passe pour le plus fin que l’on connoisse : le fer de Berry est plus fin que celui de Champagne, ou il a le grain plus fin ; mais cette épithete ne s’est pas encore donnée, que je sache, au plomb, sans doute parce que quand il est dépouillé de toute matiere étrangere, il est par-tout le même dans la nature : on dit aussi dans le même sens, cet or & cet argent sont plus fins que tel autre, soit qu’il y ait vraiment de l’or & de l’argent d’un meilleur aloi que les autres, ou, ce qui est plus vraissemblable, parce qu’ils sont mieux dégagés de toute matiere étrangere ; conditions qui exigent des travaux pénibles, & un grand exercice de la part de l’essayeur ou de l’affineur. Voyez Denier, Karat, Affinage, Raffinage, Départ, Inquart, & Essai. V. Cramer, & le Schluter de M. Hellot. Art. de M. de Villiers.

Fin, (Manége, Maréchall.) Le cheval fin est proprement un cheval de legere taille, tel qu’il doit être choisi dans le nombre des différens chevaux résultans du produit du mélange des diverses races, lorsqu’on le destine au manége, ou à servir en qualité de cheval de maître, en voyage, à la guerre, à la chasse, &c.

Nous demandons que le cheval de manége ait de la beauté, qu’il soit nerveux, leger, vif, & brillant ; que les mouvemens en soient lians & trides ; que la bouche en soit belle ; & principalement que les reins & les jarrets en soient bons, &c.

Dans le cheval de voyage, nous exigeons une taille raisonnable, un âge fait, tel que celui de six à sept années, des jambes sûres, des piés parfaitement conformés, un ongle solide, une grande legereté de bouche, beaucoup d’allure, une action souple & douce, de la tranquillité, de la franchise ; & nous rejettons avec soin celui qui seroit ardent, paresseux, & délicat en ce qui concerne la nourriture.

Le cheval de guerre doit avoir une belle bouche, la tête assûrée, une force liante & souple, de la sensibilité, de l’adresse, du courage, de la legereté ; il ne doit craindre aucun des objets qui peuvent frapper ses sens : il importe encore extrèmement qu’il ne soit point vicieux envers les autres chevaux ; qu’il n’ait point d’ardeur, & qu’il soit d’un bon & facile entretien.

A l’égard du cheval de chasse, nous desirons qu’il soit doüé de legereté, de vîtesse, qu’il ait du fond & de l’haleine, que les épaules en soient plates & très libres ; qu’il ne soit point trop raccourci de corps ; que la bouche en soit bonne, qu’elle ne soit point trop sensible, & qu’il soit plûtôt froid qu’ardent à s’animer.

La tranquillité, la docilité, l’exacte obéissance, la bonté de la bouche, des allures sûres & douces, une taille médiocre, une franchise à l’épreuve de tous les objets capables d’effrayer & d’émouvoir, sont les qualités que l’on doit rechercher dans les chevaux d’arquebuse, dans les chevaux de promenade, & dans les chevaux de femme.