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A côté de cette figure 5. on voit les parties d’assemblage de la verge de bois ; au-dessous de la figure 6. le canon bc de la bobine e ; & en d, une des poulies vuides qui servent à conduire la corde de bobines en bobines. Voici donc le mouvement de cette machine. La manivelle A fait tourner la grande roue CC, les roues D & E, & la fusée O ; la fusée O, les poulies PQ ; les poulies PQ, la poulie R ; la poulie R, l’aspe ST, qui tire les fils de dessus les bobines. Quant à la roue E, elle fait mouvoir toutes les bobines. Quant aux directions de ces mouvemens, elles sont données par les cordes ouvertes ou croisées. Quand les cordes sont ouvertes, les mouvemens sont dans le même sens ; & en sens contraire, quand les cordes sont croisées.

Après l’invention du roüet représenté dans la Planche précédente, succéda celle des moulins, qu’on voit dans celle ci. Ce n’est pas que les roüets ne perfectionnassent les matieres qui étoient préparées par leur secours, mais ils n’en fournissoient pas encore assez : il fallut donc trouver le moyen de faire plus d’ouvrage. Pour y parvenir on employa la seconde machine sous le nom de moulin ; & au lieu de huit bobines ou fusées que le roüet faisoit tourner, le nouveau moulin en fit mouvoir 48, ce qui expédioit d’ouvrage plus que le roüet. Cette machine est plus simple que le roüet. Nous allons donner la description de toutes les parties qui la composent, en observant néanmoins qu’il arrive très-souvent que le fil n’étant pas aussi tordu qu’il devroit l’être dans son premier filage, ou suivant l’ouvrage dans lequel il doit entrer, on le remet sans le doubler sur les moulins à retordre, afin de lui donner la préparation qui lui est nécessaire, observant toûjours de le faire tourner dans la seconde préparation & quand il est doublé, d’une façon différente de la premiere.

La figure 1. de la vignette est composée d’une grande roue A, garnie en-dedans d’une croisée B, B, C, C, au-travers de laquelle passe un arbre D. Cette croisée est soûtenue par quatre pieces E. Dans le bas de l’arbre est un tourillon F, qui entre dans une grenouille G. Le haut de l’arbre H entre dans un trou rond I, pour qu’il soit arrêté droit.

La grande roue A engrene dans une lanterne K, appuyée par son arbre sur une piece de bois L, & passée dans une piece de bois M, au-dessus de laquelle, & au même arbre, est une seconde lanterne N qui engrene avec une roue O faite comme une roue de champ, laquelle a son arbre. De l’autre côté du pilier 15, qui en est traversé est un pignon S qui donne le mouvement à la roue Y, attachée à l’aspe ou devidoir V, qui devide & ramasse le fil à mesure qu’il se tord.

Au pignon S est attachée une piece de bois P appuyée sur la partie Q, au bout de laquelle est un second pignon T, soûtenu par une seconde piece de bois R, appuyé sur une piece de bois 15. Ce second pignon donne le mouvement à une seconde roue Y, attachée à un second aspe ou devidoir X, qui devide & ramasse le fil dont les écheveaux sont composés.

Les lettres aa, figure 2. sont des fuseaux de fer qui entrent quarrément dans les bobines sur lesquelles le fil est devidé ; & ce fil passe par des trous très-polis marqués d & e, afin de se trouver juste & en droite ligne sur l’aspe ou devidoir. Tous les fuseaux sont pointus, & entrent dans des especes de grenouilles de verre enchâssées dans les pieces marquées i, fig. 4. qui sont entaillées dans la piece longue marquée f, figure 3. Chaque fuseau est garni d’une plaque de plomb qui est placée au-dessous de la bobine dans la partie quarrée de ce même fuseau, pour lui donner plus de poids & de facilité à tourner sur lui-même.

Le haut de chaque fuseau est rond & poli ; il est

garni d’une petite piece de bois mobile appellée couronne, marquée u, fig. 4. autour de laquelle est un fil-de-fer, dont une extrémité qui est relevée étant courbée, forme une petite boucle marquée y, dans laquelle est passé le fil qui a déjà passé dans une autre boucle marquée x, qui se trouve à l’autre extrémité du fil-de-fer qui vient répondre au milieu de la bobine, comme il est représenté dans la figure 4.

La lisiere 2, 2, même figure, est une courroie sans fin, laquelle passant d’un côté sur le tambour 3, figure 2. & venant sur un autre tambour tournant 4, même figure, attaché à une piece 8 & 9, au moyen d’un pilier solide 10, au haut duquel est un trou où passe une vis avec son écrou 11 : en tournant la piece écroüée, on fait lâcher ou tirer la courroie 2 autant que le besoin l’exige ; & au moyen du mouvement que la grande roue A donne à la lanterne K, le tambour qui lui est adhérant tournant de même, le mouvement qu’il donne à la courroie qui frote sur chaque fuseau, & qui fait le tour du moulin, fait qu’ils tournent tous ensemble avec une si grande célérité, que le fil se trouve retordu lorsqu’il arrive sur l’aspe ou devidoir, quoiqu’il ne tourne pas doucement.

La courroie est soûtenue par des bobines tournantes 5, 5, fig. 4. Les bobines sont placées entre les fuseaux de deux en deux, & servent à deux fins : la premiere est que les bobines étant cavées quarrément, & placées de façon qu’elles pressent la courroie, leur cavité soûtient cette même courroie, laquelle, sans cette précaution, tomberoit insensiblement au bas des fuseaux. La seconde est que les bobines placées avec une justesse convenable, tiennent la courroie appuyée legerement contre le bas des fuseaux, sans quoi elle ne pourroit pas les faire tourner avec cette régularité qu’exige la préparation de cette matiere.

La figure 3. est le moulin vû de face, le bâtiment du moulin qui est un quarré long de 16 piés sur 4 de large, ajusté & mortoisé comme la figure le démontre ; arrêté par le haut avec deux pieces cintrées, 16. Les moulins de cette espece n’ont pas eu autant de succès qu’on s’en promettoit, parce que la courroie qui donne le mouvement aux fuseaux qui portent les bobines remplies de fil, tirant sur une même ligne, il falloit une extrème justesse pour qu’elle appuyât également sur chacun de ces mêmes fuseaux, auxquels elle ne donne le mouvement que par le frotement qu’elle fait sur la partie élevée qui se trouve dans le bas de ces pieces, qui toutes doivent être passées au tour, pour être de la justesse requise.

La figure 2. est le moulin vû de côté. La fig. 3. est celle du mouvement, composé des roüages dont il a été fait mention dans la figure 1. La figure 4. indique la façon dont les fuseaux sont placés : les autres pieces séparées démontrent la façon dont elles doivent être composées en grand.

Les moulins quarrés n’ayant pas paru propres à donner toute la perfection dont les fils & les laines étoient susceptibles, attendu l’irrégularité qui se trouvoit dans la courroie, qui, comme on l’a démontré, tournant sur une ligne droite, causoit des mouvemens irréguliers & indispensables dans quelques fuseaux, il fut question de remédier à ce défaut ; & pour y parvenir on inventa des moulins ronds, tels qu’ils sont représentés Planche III. Ce moulin, dont le mouvement est à-peu-près égal à celui de ceux qui sont quarrés, a cette propriété différente de ces derniers, que la courroie suivant les fuseaux sur la circonférence d’un cercle, & se resserrant sur le tambour, il n’est pas possible qu’elle ne porte juste par-tout ; & au moyen de cette justesse, les fuseaux tournant avec une parfaite égalité, la matiere se trouvoit mieux préparée : le mouvement étant d’ailleurs plus simple, il falloit moins de peine