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la constipation, les tranchées, & le cours de ventre salutaire qui les accompagne.

Quand l’acrimonie séreuse est seulement logée dans les organes de la respiration & de la membrane pituitaire, elle produit une fievre legere, avec alternative de frissons & de petites chaleurs plus mordicantes qu’ardentes ; l’enchiffrenement, la douleur de tête, les yeux larmoyans, gonflés ; les narines rouges, qui laissent écouler une sérosité acre & corrosive ; l’éternuement, l’enflure du nez & des levres, la respiration un peu difficile ; la toux, les crachats qui se cuisent insensiblement, se détachent, & annoncent la fin de la maladie.

Causes. La cause immédiate, est une lymphe abondante & acre qui, dispersée par tout le corps, ou logée dans les tuniques glanduleuses, suscite une inflammation accompagnée de douleur, de tumeur & de rougeur. Cette sérosité est principalement produite par le défaut ou par la suppression de transpiration, quelle qu’en soit la cause ; d’où il arrive que cette fievre se manifeste davantage dans les vicissitudes considérables de tems, & principalement aux équinoxes.

Il se trouve aussi quelquefois dans l’air une matiere subtile & caustique qui s’insinue par le moyen de l’inspiration dans le corps humain, où elle excite promptement une fievre catarrhale, qui est d’ordinaire épidémique, & quelquefois contagieuse.

Prognostics. Plus la quantité de lymphe acre est grande, plus les symptomes sont violens, & plus la maladie est longue. La simple fievre catarrhale s’en va communément d’elle-même, sans le secours de l’art ; mais elle peut devenir fâcheuse par de mauvais traitemens, & dans des constitutions particulieres. Plus elle s’éloigne de sa douceur naturelle, plus l’inflammation est considérable, & plus on doit craindre que les visceres n’en souffrent. Son meilleur signe est une résolution journaliere & une dissipation successive de la matiere morbifique.

Cette maladie se termine par une expectoration abondante des bronches pulmonaires par les sueurs, les selles, les urines, ou l’excrétion de sérosité muqueuse par le nez.

Cure. Il faut se proposer, 1°. de corriger & d’émousser l’acrimonie de la lymphe ; 2°. de rétablir la transpiration, dont l’interruption a produit la fievre ; 3°. d’évacuer les humeurs visqueuses, & d’en prévenir la formation pour l’avenir.

On corrigera l’acrimonie de la lymphe par les substances onctueuses, comme les émulsions, les bouillons de navets, les gruaux, les tisannes d’orge mondé, avec de la rapure de corne de cerf, des raisins, & de la réglisse. On divisera la sérosité glutineuse par les incisifs, tels que la racine d’aunée, de pimprenelle & de dompte-venin infusées ensemble, ou autres semblables ; par les sels neutres, tels que le nitre & le tartre vitriolé. On peut en particulier atténuer la lymphe qui est en stagnation dans les cavités des narines, par le sel volatil ammoniac sec, imprégné de quelques gouttes d’huile de marjolaine ; on seconde les excrétions par des infusions chaudes, & des poudres diaphorétiques. On procure l’évacuation de la lymphe visqueuse qui séjourne dans les glandes de la gorge, par les pectoraux.

On calmera la toux par des parégoriques, les pilules de styrax ou de cynoglosse. Le ventre doit être tenu ouvert par de fréquentes boissons de liqueurs émollientes, par des lavemens, par des décoctions de manne, de pruneaux & de raisins. Si l’on soupçonne quelqu’inflammation dans les parties internes, les émulsions seront nitrées. Un de nos modernes donne la cure de la fievre catarrhale en deux lignes : acre tenue concoquendum hypnoticis, condiendum resinosis, evacuandum diaphoreticis & diureticis.

Observation de pratique. Les Medecins ont observé de tout tems que les personnes d’un tempérament phlegmatique & sanguin, les enfans, les filles & les femmes, sont beaucoup plus sujets aux fievres catarrhales, que les hommes & les adultes d’un tempérament fort & sec. Hippocrate avoit dit autrefois (Epidem. liv. VI. sect. iij.) que l’enrouement, les maux de tête & les migraines, sont emportés par une fievre catarrhale qui leur succede : c’est aussi ce que l’expérience journaliere apprend tous les jours aux praticiens.

Pour ce qui regarde la fievre maligne catarrhale, comme elle est plus connue sous le nom de fievre pétéchiale, voyez Fievre pétéchiale.

Fievre cathartique ou diarrhétique : fievre continue, accompagnée de flux de ventre très-opiniâtre. Comme elle fait les plus grands ravages dans les villes & dans les camps, je me propose d’en parler avec toute l’étendue qu’elle mérite.

Causes. Il y a dans les fievres continues un grand nombre d’especes de flux de ventre, tant par rapport à la matiere & à la cause, que par rapport aux effets & à l’évenement, & par conséquent il en résulte, que le medecin y doit donner toute son attention pour bien traiter ce genre de maladies.

Le flux de ventre qui accompagne cette fievre, vient quelquefois d’un hétérogène qui agit sur les intestins par une forte irritation, & qui cause à-peu-près les mêmes effets que ceux que produisent de puissans purgatifs. Quelquefois cet hétérogène est répandu dans la masse des humeurs, & entretient un flux de ventre, en excitant continuellement l’action des excrétoires des intestins ; d’autres fois il réside, du moins en partie, dans les premieres voies, sur-tout dans la vésicule du fiel ; car la bile elle-même peut se dépraver & devenir purgative, & même un purgatif fort irritant : elle peut aussi recevoir de la masse des humeurs un suc vicieux & irritant, qui se mêle & séjourne avec elle, & qui lui communique ses mauvaises qualités, ensorte qu’il entretiendra le flux de ventre, en s’écoulant continuellement dans les intestins : si une telle bile est successivement refournie à la vésicule par la masse du sang, elle perpétuera la diarrhée : il paroît que de pareils flux de ventre sont toûjours accompagnés d’une sorte de dissolution des humeurs, & que c’est une acrimonie qui les produit par irritation, & qui est dans le cas présent la cause de la dissolution.

Ses effets. Si le flux de ventre fébrile dure longtems, il dispose de plus en plus les visceres de l’abdomen à la même maladie ; il les affoiblit, les excorie, les enflamme, vuide, épuise le reste des visceres & des vaisseaux : d’où naissent la maigreur, l’atrophie, la débilité, la dyssenterie, l’épaississement des fluides dans toute l’habitude du corps, le relâchement des solides, la perte des parties fluides, la leucophlegmatie, l’hydropisie, la consomption, & la mort.

Cure. La cure de ce mal en général consiste à adoucir l’acreté qui fait irritation ; à l’évacuer par des émétiques, des purgatifs, des lavemens ; à raffermir les parties lâches, à calmer l’impétuosité des liqueurs par des narcotiques, à déterminer la matiere morbifique d’un autre côté par les sueurs ou par les urines, à l’expulser après en avoir corrigé la premiere source.

Mais M. Vanswieten, mon ancien maître & mon ami (je supprime ses titres & ses qualités) a détaillé cette cure avec tant de savoir & d’intelligence dans ses comment. sur Boerhaave § 722, que je crois en devoir donner ici le précis, pour n’en pas faire un renvoi.

Lorsqu’on soupçonne qu’une diarrhée ou dyssenterie est entretenue par des matieres irritantes, re-