Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 6.djvu/279

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

teur n’en ait fait mention ; ceux qu’un défaut aussi essentiel a trompés, seroient sans doute en droit de leur reprocher leur silence. (e)

EXOPHTHALMIE, s. f. (Med.) maladie particuliere des yeux.

Ce mot grec qui est expressif, & que je suis obligé d’employer, signifie sortie de l’œil hors de son orbite ; mais il ne s’agit pas de ces yeux gros & élevés qui se rencontrent naturellement dans quelques personnes, ni de cette espece de forjettement de l’œil, qui arrive à la suite de la paralysie de ses muscles, ni enfin de ces yeux éminens & saillans, rendus tels par les efforts d’une difficulté de respirer, d’un tenesme, d’un vomissement, d’un accouchement laborieux, & par toutes autres causes, qui interceptant en quelque maniere la circulation du sang, le retiennent quelque tems dans les veines des parties supérieures.

Nous entendons ici par exophthalmie (& d’après Maitrejan, qui en a seul bien parlé) la grosseur & éminence contre nature du globe de l’œil, qui s’avance quelquefois hors de l’orbite, sans pouvoir être recouvert des paupieres, & qui est accompagnée de violentes douleurs de l’œil & de la tête, de fievre, & d’insomnie, avec inflammation aux parties extérieures & intérieures de l’œil. Cette triste & cruelle maladie demande quelques détails.

Elle est causée par un prompt dépôt d’une humeur chaude, âcre, & visqueuse, qui abreuvant le corps vitré, l’humeur aqueuse, & toutes les autres parties intérieures du globe, les altere, & souvent les détruit. La chaleur & l’acrimonie de cette humeur se manifestent par l’inflammation intérieure de toutes les parties de l’œil, & par la douleur qui en résulte. Son abondance ou sa viscosité se font connoître par la grosseur & l’éminence du globe de l’œil, qui n’est rendu tel que par le séjour & le défaut de circulation de cette humeur.

Il paroît que le corps vitré est augmenté outre mesure par l’extrème dilatation de la prunelle, que l’on remarque toûjours dans cette maladie. Il paroît aussi, que l’humeur aqueuse est semblablement augmentée, par la profondeur ou l’éloignement de l’uvée, & par l’éminence de la cornée transparente.

Le globe de l’œil ne peut grossir extraordinairement, & s’avancer hors de l’orbite, sans que le nerf optique, les muscles de l’œil, & toutes ses membranes, ne soient violemment distendus. Voilà d’où vient l’inflammation de tout le globe de l’œil, la violente douleur qu’éprouve le malade, la fievre, l’insomnie, &c.

L’exophthalmie fait quelquefois des progrès très rapides ; & quand elle est parvenue à son dernier période, elle y demeure long-tems. Ses effets sont, que l’œil revient rarement dans sa grosseur naturelle, que la vûe se perd ou diminue considérablement.

Soit que cette maladie soit produite par fluxion, ou par congestion, si le malade continue de sentir des élancemens de douleurs terribles, sans intervalle de repos, l’inflammation croît au-dedans & au-dehors, les membranes qui forment le blanc de l’œil, se tuméfient extraordinairement, les paupieres se renversent, le flux de larmes chaudes & âcres succede, & finalement l’œil se brouille ; ce qui est un signe avant-coureur de la suppuration des parties internes, & de leur destruction.

Après la suppuration faite, la cornée transparente s’ulcere, & les humeurs qui ont suppuré au-dedans du globe, s’écoulent. Alors les douleurs commencent à diminuer, & l’œil continue de suppurer, jusqu’à ce que toutes les parties altérées soient mondifiées ; ensuite il diminue au-delà de sa grosseur naturelle, & enfin il finit par se cicatriser.

Il arrive souvent que l’humeur qui cause cette ma-

ladie, ne vient pas à suppurer, mais s’atténue, se

résout insensiblement, & reprend le chemin de la circulation ; dans ce cas, la douleur & les autres accidens se calment, l’œil se remet quelquefois dans sa grosseur naturelle, ou ce qui est ordinaire, demeure plus petit. La vûe cependant se perd presque toûjours, parce que le globe de l’œil ne peut s’étendre si violemment, sans que ses parties intérieures ne souffrent une altération qui change leur organisation, sans que le corps vitré ne se détruise, & sans que le crystallin ne se corrompe, de même que dans les cataractes purulentes.

Le traitement de l’exophthalmie demande les remedes propres à vuider la plénitude, à détourner l’humeur de la partie malade, à adoucir & à corriger cette humeur viciée. Ainsi la saignée du bras doit être répetée suivant la grandeur du mal & les forces du malade : on ouvre ensuite la jugulaire & l’artere des temples du même côté, on applique des vésiccatoires devant ou derriere les oreilles ; on fait un cautere au-derriere de la tête, ou on y passe un séton. Les émolliens, adoucissans & rafraîchissans sont nécessaires pendant tout le cours de la maladie ; mais tous ces remedes généraux doivent être administrés avec ordre & avec prudence.

Il ne faut pas non plus négliger les topiques convenables, les renouveller souvent, & les appliquer tiedes, soit pour relâcher la peau, soit pour tempérer l’inflammation extérieure de l’œil, car ils ne servent de rien pour l’inflammation intérieure.

Lorsque le mal est sur son déclin, ce qu’on connoît par la diminution de l’inflammation & de la douleur, on se sert alors des topiques résolutifs, c’est-à-dire de ceux qui par leurs parties subtiles, volatiles & balsamiques, échauffent doucement l’œil, atténuent & subtilisent les humeurs, & les disposent à reprendre le chemin de la circulation. C’est aussi sur le déclin de la maladie, & quand la fievre est appaisée, qu’on doit commencer à purger le malade par intervalles & à petites doses, en employant en même tems les décoctions de sarsepareille & de squine.

Si dans le cours du mal on s’apperçoit que les accidens ne cedent point aux remedes, & que l’œil se dispose à suppurer, on doit se servir de topiques en forme de cataplasme, pour avancer davantage la suppuration : on les appliquera chaudement sur l’œil malade, & on les renouvellera trois ou quatre fois le jour.

Quand le pus est formé, & même quelquefois avant qu’il le soit entierement, on épargnera de cruelles douleurs au malade, en ouvrant l’œil avec la lancette, en perçant avec art la cornée le plus bas qu’il est possible, & dans le lieu le plus propre à procurer l’écoulement des humeurs purulentes.

A mesure que le globe se vuide, il se flétrit, & les douleurs diminuent à proportion que les parties altérées se mondifient : on panse ensuite l’œil avec les collyres détersifs & mondifians, jusqu’à ce que l’ouverture soit disposée à se cicatriser ; alors on se sert de dessicatifs, & l’on pourvoit à l’excroissance de chair, qui survient quelquefois après l’ouverture ou après l’ulcération de la cornée. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

* EXORBITANT, adj. (Gramm.) terme qui n’est guere relatif qu’à la quantité numérique : c’est l’excessif de cette quantité. Ainsi on dit : il exige de moi une somme exorbitante. Voyez Excès.

EXORCISME, s. m. (Théol. & Hist. ecclés.) priere ou conjuration dont on se sert pour exorciser, c’est-à-dire chasser les démons des corps des personnes qui en sont possédées, ou pour les préserver du danger. Voyez Démon.

Ce mot est tiré d’un mot grec qui signifie adjurare, conjurare, conjurer. Dans la plûpart des dic-