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en général la transcription d’un acte dans un registre, soit en entier ou par extrait. Cette formalité a pour objet de conserver la teneur d’un acte dont il peut importer au Roi, ou au public, ou à quelque particulier, d’avoir connoissance.

Les marchands & négocians, banquiers & agens de change sont obligés, suivant l’ordonnance du commerce, d’avoir des livres ou registres, & d’y enregistrer (ou écrire) tout leur négoce, leurs lettres de change, dettes actives & passives.

On enregistre les baptêmes, mariages & sépultures, vêtures, professions en religion, en inscrivant les actes sur des registres publics destinés à cet effet.

Les actes sujets au contrôle, insinuation, centieme denier ou autre droit, sont enregistrés, c’est-à-dire transcrits en entier ou par extrait sur les registres destinés pour ces formalités.

On enregistre aussi les saisies réelles, les criées, les substitutions, des bulles & provisions, &c. (A)

Enregistrement des ordonnances, édits, déclarations, & autres lettres patentes, pris dans le sens littéral, n’est autre chose que la transcription de ces nouveaux reglemens que le greffier des jurisdictions, soit supérieures ou inférieures, fait sur les registres du tribunal en conséquence de la vérification qui en a été faite précédemment par les tribunaux supérieurs qui ont le droit & le pouvoir de vérifier les nouvelles lois.

Néanmoins dans l’usage, on entend aussi par le terme d’enregistrement la vérification que les cours font des nouvelles ordonnances, l’arrêt ou jugement qui en ordonne l’enregistrement, l’admission qui est faite en conséquence par le greffier, du nouveau réglement au nombre des minutes du tribunal, le procès-verbal qu’il dresse de cet enregistrement, la mention qu’il en fait par extrait sur le repli des lettres : on confond souvent dans le discours toutes ces opérations, quoiqu’elles soient fort différentes les unes des autres.

La vérification est un examen que les cours font des lettres qui leur sont adressées par le Roi, tant pour vérifier par les formes nationales si le projet de loi qui est présenté est émané du prince, ou si au contraire les lettres ne sont point supposées ou falsifiées, que pour délibérer sur la publication & enregistrement d’icelles, & consentir au nom de la nation que le projet de loi soit registré & exécute, au cas qu’il y ait lieu de l’approuver.

L’arrêt d’enregistrement est le jugement qui, en conséquence de la vérification qui a été faite & du consentement donné à l’exécution de la loi, ordonne qu’elle sera mise au nombre des minutes du tribunal, & transcrite dans ses registres.

L’admission du nouveau réglement au nombre des minutes du tribunal, & qui est le véritable enregistrement, a pour objet de marquer que la loi a été vérifiée & reçûe, & en même tems de constater cette loi, en la conservant dans un dépôt public où elle soit permanente, & où l’on puisse recourir au besoin & vérifier sur l’original la teneur de ses dispositions. Elle est différente de la transcription qui se fait de ce même réglement sur les registres en parchemin pour en mieux assûrer la conservation.

Le procès-verbal d’enregistrement est la relation que fait le greffier de ce qui s’est passé à l’occasion de la vérification & enregistrement, & de l’admission qui a été faite en conséquence du nouveau réglement entre les minutes du tribunal.

La mention de l’enregistrement que le greffier met sur le repli des lettres, est un certificat sommaire par lequel il atteste qu’en conséquence de l’arrêt de vérification & enregistrement, il a mis le réglement au nombre des minutes & registres du tribunal.

La transcription sur les registres en parchemin

n’est qu’une suite de l’enregistrement, & une opération qui ne se fait quelquefois que long-tems après, pour la police du greffe & pour suppléer au besoin la minute du réglement.

On conçoit, par ce qui vient d’être dit, combien la vérification est différente de la simple transcription qui se fait dans les registres ; mais comme le style des cours, lorsqu’elles ont vérifié une loi, est d’ordonner qu’elle sera registrée dans leur greffe, il est arrivé de-là que dans l’usage, lorsqu’on veut exprimer qu’une loi a été vérifiée, on dit communément qu’elle a été enregistrée ; ce qui dans cette occasion ne signifie pas simplement que la loi a été insérée dans les registres, on entend principalement par-là que la vérification qui précede nécessairement cet enregistrement a été faite.

Toutes les différentes opérations dont on vient de parler, se rapportent à deux objets principaux ; l’un est la vérification du nouveau réglement, l’autre est son admission dans les registres du tribunal : c’est pourquoi l’on se fixera ici à ces deux objets ; c’est-à-dire que l’on expliquera d’abord ce qui concerne l’enregistrement en tant qu’il est pris pour la vérification, & ensuite l’enregistrement en tant qu’il signifie l’admission ou transcription du réglement dans les minutes & registres du tribunal.

Avant d’expliquer de quelle maniere on procede à la vérification & enregistrement d’une loi, il est à propos de remonter à l’origine des vérifications & enregistremens, & de rappeller ce qui se pratiquoit auparavant pour donner aux nouvelles lois le caractere d’autorité nécessaire pour leur exécution.

On a toûjours eu l’attention chez toutes les nations policées, de faire examiner les nouvelles lois que le prince propose, par ceux qu’il a lui-même chargés du soin de les faire exécuter. La loi viij. au code de legibus, fait mention que les nouvelles lois devoient être proposées en présence de tous les grands officiers du palais & des sénateurs : Vopiscus dit de l’empereur Probus qu’il permit aux sénateurs ut leges quas ipse ederet senatus consultis propriis consecrarent, ce qui ressemble parfaitement à nos arrêts d’enregistrement.

En France on a pareillement toûjours reconnu la nécessité de faire approuver les nouvelles lois par la nation, ou par les cours souveraines qui la représentent en cette partie, & qui étant dépositaires de l’autorité royale, exercent à cet égard un pouvoir naturel, émané du Roi même par la force de la loi ; c’est ainsi que s’expliquoit le chancelier Olivier dans un discours fait au parlement en 1559.

Il est vrai que jusqu’au treizieme siecle il n’est point parlé de vérifications ni d’enregistremens, mais il y avoit alors d’autres formes équipolentes.

Sous les deux premieres races, lorsque nos rois vouloient faire quelque loi nouvelle, ils la proposoient ou faisoient proposer par quelque personne de considération dans un de ces parlemens généraux ou assemblées de la nation, qui se tenoient tous les ans, d’abord au mois de Mars, & que Pepin transféra au mois de Mai.

Ces assemblées étoient d’abord composées de toute la nation, des grands & du peuple ; mais sous ce nom de peuple, on ne comprenoit que les Francs, c’est-à-dire ceux qui composoient originairement la nation françoise, ou qui étoient descendus d’eux, & ceux qui étoient ingénus, c’est-à-dire libres.

Chacun dans ces assemblées avoit droit de suffrage : on frappoit sur ses armes pour marquer que l’on agréoit la loi qui étoit proposée ; ou s’il s’élevoit un murmure général, elle étoit rejettée.

Lorsque l’on écrivit & que l’on réforma la loi salique sous Clovis, cette affaire fut traitée dans un parlement, de concert avec les Francs, comme le