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Mais son chef-d’œuvre est un grand tableau de douze piés & demi de large sur neuf & demi de haut, représentant des animaux de grandeur naturelle : c’est la fable du loup & du cheval. Il est d’une maniere grande, d’un pinceau ferme, d’une couleur vraie, & d’un effet surprenant ; ce qui a fait dire au public que ce n’étoit pas seulement au loup que ce cheval donnoit un coup de pié. Le commencement de cet éloge est d’après un écrivain qu’on ne soupçonnera pas de favoriser M. Bachelier : aussi l’a-t-il tempéré, en ajoûtant qu’on craignoit que ce tableau ne s’écaillât. C’est comme s’il eût dit : nous ne pouvons empêcher qu’il ne soit beau ; empêchons qu’on ne l’achete. Cet article nous a été communiqué par M. Monnoye. Les gens de Lettres y verront sur l’encaustique des recherches & des connoissances qui auroient pû se trouver & qui ne se trouvent néanmoins dans aucun des écrits qu’on a publiés sur cette matiere. Ceux qui auront gardé la neutralité dans la contestation de l’encaustique, ne pourront disconvenir que l’auteur n’ait montré autant d’impartialité que de jugement, en réduisant à leur juste valeur les prétentions réciproques des parties opposées, & qu’il n’ait parlé dans ce morceau avec un soin qui peut instruire tout le monde, & une vérité qui ne doit offenser personne.

ENCAVURE, s. m. (Medecine.) maladie particuliere des yeux, que les Grecs ont nommé κοίλωμα, & les auteurs latins, cavitas.

L’encavure est un des ulceres profonds de la cornée, dur, semblable à celui qu’on appelle fossette ; excepté qu’il est plus large & qu’il semble moins profond, parce que la cornée se trouvant émincée, est un peu poussée au-dedans de l’ulcere par l’humeur aqueuse. Voyez Fossette.

Cependant dans les ulceres des yeux il faut peu se mettre en peine des noms qu’on leur a donnés, parce qu’ils ne doivent point changer la méthode curative. L’important est de tâcher de connoître la nature de ces ulceres, en former le prognostic, & travailler à la guérison de ceux qui en sont susceptibles. La vûe est trop précieuse pour négliger l’étude de toutes les maladies qui peuvent causer sa perte ; mais pour éviter les répétitions qui se présenteroient souvent dans cet ouvrage, nous rassemblerons brièvement ce qui concerne les diverses especes d’ulceres des yeux, sous le mot général. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

ENCEINTE, s. f. terme de Fortification, signifie la circonférence ou le contour du rempart d’une place fortifiée, soit qu’elle soit composée de bastions, ou non. Chambers. (Q)

Enceinte, (Venerie.) c’est le lieu où le valet de limier détourne les bêtes avec son limier.

* ENCENIES, adj. pris subst. (Hist. anc.) fêtes qu’on célébroit à la dédicace d’un temple, à la consécration d’une chapelle, à la réédification d’une maison. C’étoient des festins & des danses. Les jeunes filles s’y couronnoient de fleurs. Nous avons aussi nos encenies, les Juifs ont eu les leurs : elles ont passé de la synagogue dans l’Église sous le pape Félix. Voyez Consécration, Temple, Dédicace, &c. Voyez l’article suivant.

Encenies, s. f. pl. (Hist. sacrée.) restauration ou rénovation, formé de καινός, nouveau.

C’est le nom que les Juifs donnoient à une fête très-solennelle qu’ils célébroient le 25 de leur neuvieme mois, qui répond à nos mois de Novembre & Décembre. Elle avoit été instituée en mémoire de la restauration ou purification du temple, faite par Judas-Machabée.

Les Juifs avoient encore deux encenies ; savoir la dédicace du temple par Salomon, & celle que fit Zorobabel après le retour de la captivité.

Encenie se dit aussi dans l’histoire ecclésiastique &

dans les ouvrages des peres, de la dédicace des églises chrétiennes. Voyez Dédicace.

ENCENS, s. m. (Hist. nat. des drogues.) en latin thus masculum, olibanum off. λίϐανος, Théophr. & Diosc. λιϐανωτὸν, Hippoc. substance résineuse, d’un jaune-pâle ou transparent, en larmes semblables à celles du mastic, mais plus grosses. Voici ce qu’en dit M. Geoffroy, qui en a parlé avec le plus de briéveté & de vérité.

L’encens est sec & dur, d’un goût un peu amer, modérément acre & résineux, non desagréable, & d’une odeur pénétrante. Lorsqu’on le jette sur le feu, il devient aussi-tôt ardent, & répand une flamme vive qui a peine à s’éteindre : il ne coule pas comme le mastic. Si on le met sous les dents, il se brise aussitôt en petits morceaux ; mais il ne se réunit point comme le mastic, & on ne peut pas le rouler comme lui dans la bouche, parce qu’il s’attache aux dents.

Les gouttes d’encens sont transparentes, oblongues & arrondies ; quelquefois elles sont seules, quelquefois il y en a deux ensemble, & elles ressemblent à des testicules ou à des mammelles, selon qu’elles sont plus ou moins grosses : c’est de-là que viennent les noms ridicules d’encens mâle & d’encens femelle. Quelquefois il y a quatre ou cinq gouttes d’encens de la grosseur d’un pois ou d’une aveline, qui sont par hasard attachées à l’écorce de l’arbre d’où elles ont découlé. On estime l’encens qui est blanchâtre, transparent, pur, brillant, sec.

L’encens a été connu non-seulement des Grecs & des Arabes, mais aussi de presque toutes les nations, & dans tous les tems. Son usage a été très-célébré & très-fréquent dans les sacrifices ; car autrefois on les faisoit avec de l’encens, & on s’en servoit, comme l’on s’en sert encore à-présent, pour exciter une odeur agréable dans les temples. Cette coûtume a presque passé parmi toutes les nations, dans toutes les religions, & dans tous les lieux.

Les auteurs ne conviennent pas du pays natal de l’encens. Quelques-uns prétendent qu’il n’y a que l’Arabie qui le produit ; & encore que ce n’est pas ce pays-là tout entier, mais seulement la partie que l’on appelle Saba. D’autres veulent que l’Ethiopie, dont quelques peuples s’appellent Sabéens, porte aussi cette racine odoriférante.

Nous sommes encore moins certains de l’arbre qui fournit l’encens. Pline en parle fort obscurément, & suppose que c’est le terebinthe. Théophraste assûre qu’il est haut de cinq coudées, branchu, & que ses feuilles ressemblent à celles du poirier. D’autres cependant, dit-il, soûtiennent qu’il est semblable au lentisque ; & d’autres, qu’il a l’écorce & les feuilles du laurier. Diodore de Sicile lui donne la figure de l’acacia d’Egypte, & les feuilles de saule. Garzias assûre que l’arbre de l’encens n’est pas fort haut, & que ses feuilles sont semblables à celles du lentisque. Thevet au contraire soûtient qu’il ressemble aux pins qui fournissent de la résine.

Ce que quelques-uns appellent parfum ou encens des Juifs (parce qu’ils s’en servoient souvent dans leurs temples), est une masse seche, un peu résineuse, rougeâtre en écorce, qui a l’odeur pénétrante du storax liquide. Cette masse est faite des écorces de l’arbre appellé rosa-mallas, que l’on fait bouillir, & que l’on exprime après que l’on en a tiré le storax liquide : elle n’est bonne qu’à brûler.

La manne d’encens n’est autre chose que les miettes ou les petites parties qui se sont formées de la collision des grumeaux d’encens, par le mouvement de la voiture ou autrement.

La suie d’encens est cette manne d’encens, brûlée de la maniere qu’on brûle l’arcançon pour faire du noir de fumée.

L’écorce d’encens est l’écorce de l’arbre thurifere.