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5. Le Ciel est divisé en deux, ou quatre, ou trente-six régions, & ces régions en plusieurs autres ; chacune a sa divinité, & toutes sont subordonnées à une divinité qui leur est supérieure. De ces principes, il faut descendre à d’autres, jusqu’à ce que l’univers entier soit distribué à des puissances qui émanent les unes des autres & toutes d’une premiere.

6. Cette premiere puissance tira la matiere de l’essence, & l’abandonna à l’intelligence qui en fabriqua des spheres incorruptibles. Elle employa ce qu’il y avoit de plus pur à cet ouvrage ; elle fit du reste les choses corruptibles & l’universalité des corps.

7. L’homme a deux ames ; l’une qu’il tient du premier intelligible, & l’autre qu’il a reçûe dans le monde sensible. Chacune a conservé des caracteres distinctifs de son origine. L’ame du monde intelligible retourne sans cesse à sa source, & les loix de la fatalité ne peuvent rien sur elle ; l’autre est asservie aux mouvemens des mondes.

8. Chacun a son démon, il préexistoit à l’union de l’ame avec le corps. C’est lui qui l’a unie à un corps. Il la conduit, il l’inspire. C’est toûjours un bon génie. Les mauvais génies sont sans district.

9. Ce démon n’est point une faculté de l’ame ; c’est un être distingué d’elle & d’un ordre supérieur au sien, &c.

Principes de la Philosophie morale des Eclectiques. Voici ce qu’on en recueillera de plus généralement admis, en feuilletant les ouvrages de Porphyre & de Jamblique.

1. Il ne se fait rien de rien. Ainsi l’ame est une émanation de quelque principe plus noble.

2. Les ames existoient avant que d’être unies à des corps. Elles sont tombées, & l’exil a été leur châtiment. Elles ont depuis leur chûte passé successivement en différens corps, où elles ont été retenues, comme dans des prisons.

3. C’est par un enchaînement de crimes & d’impiétés, qu’elles ont rendu leur esclavage plus long & plus dur. C’est à la Philosophie à l’adoucir & à le faire cesser. Elle a deux moyens ; la purification rationnelle, & la purification théurgique, qui élevent les ames successivement à quatre différens dégrés de perfection, dont le dernier est la théopatie.

4. Chaque degré de perfection a ses vertus. Il y a quatre vertus cardinales, la prudence, la force, la tempérance & la justice ; & chaque vertu a ses degrés.

5. Les qualités physiques qui ne sont que des avantages de conformation, & dont l’usage le plus noble seroit d’être employés, comme des instrumens, pour s’élever aux autres qualités, sont au dernier rang.

6. Les qualités morales & politiques, sont celles de l’homme sensé, qui supérieur à ses passions, après avoir travaillé long-tems à se rendre heureux par la pratique de la vertu, s’occupe à procurer le même bonheur à ses semblables. Ces qualités sont pratiques.

7. Les qualités spéculatives sont celles qui constituent proprement le philosophe ; il ne se contente pas de faire le bien, il descend encore en lui-même, il s’y renferme, & médite, afin de connoître la vérité des principes par lesquels il se conduit.

8. Les qualités expurgatives ou sanctifiantes, ce sont toutes celles qui élevent l’homme au-dessus de sa condition, par la privation de tout ce qui est au-delà des besoins de la nature les plus étroits. Dans cet état, l’homme a sacrifié tout ce qui peut l’attacher à cette vie ; son corps lui devient un fardeau onéreux ; il en souhaite la dissolution ; il est mort philosophiquement. Or la mort philosophique par-

faite est le point de la perfection humaine le plus

voisin de la vie des dieux.

9. Les qualités spéculatives consistent dans la contemplation habituelle du premier principe, & dans l’imitation la plus approchée de ses vertus.

10. Les qualités théurgiques sont celles par lesquelles on est digne dès ce monde de commercer avec les Dieux, les démons, les héros & les ames libres.

11. L’homme peut avec le secours des seules forces qu’il a recûes de la nature, s’élever successivement de la dégradation la plus profonde, jusqu’au dernier degré de perfection ; car la loi de la necessité n’a point d’empire invincible sur l’énergie du principe divin qu’elle porte en lui-même, & avec lequel il n’y a point d’obstacle qu’il ne puisse surmonter.

12. Si la séparation de l’ame & du corps s’est faite avant que l’ame ne se soit relevée de son état d’avilissement, & qu’elle ait emporté avec elle des traces secretes de dépravation ; elle éprouve le supplice des enfers, en rentrant dans un nouveau corps qui devient pour elle une prison plus cruelle que le corps qu’elle a quitté, qui l’éloigne davantage de son premier principe, & qui rend sa grande révolution plus longue & plus difficile.

Voilà ce que nous avons trouvé de plus important & de moins obscur dans la philosophie des Eclectiques anciens. Pour s’en instruire à fond, il faut aller puiser dans les sources, & feuilleter ce qui nous reste de Plotin, de Porphyre, de Julien, de Jamblique, d’Ammian Marcellin, &c..... sans oublier l’histoire critique de la philosophie de M. Brucker, & la foule des auteurs tant anciens que modernes, qui y sont cités.

ECLEGME, s m. en Medecine, c’est un remede pectoral, qui a la consistance d’un sirop épais ; on l’appelle aussi looch. Voyez l’article Sirop. Voyez aussi Looch, &c.

Ce mot est grec ; il vient du mot λείχω, je leche, à cause que le malade doit prendre ce remede en léchant le bout d’un petit bâton de réglisse que l’on y trempe ; afin qu’en le prenant ainsi peu à peu, il puisse rester plus long-tems dans son passage, & mieux humecter la poitrine.

Il y a des éclegmes de pavot, d’autres de lentilles, & d’autres de squilles, &c. Ils servent à guérir ou à soulager les poumons dans les toux, les péripneumonies, &c. Ils sont ordinairement composés d’huiles incorporées avec des sirops. Chambers.

ECLIPSE, s. f. en Astronomie, c’est une privation passagere, soit réelle, soit apparente, de lumiere, dans quelqu’un des corps célestes, par l’interposition d’un corps opaque entre le corps céleste & l’œil, ou entre ce même corps & le Soleil. Les éclipses de Soleil sont dans le premier cas ; les éclipses de Lune & des satellites sont dans le second : car le Soleil est lumineux par lui-même, & les autres planetes ne le sont que par la lumiere qu’ils en reçoivent. Les éclipses des étoiles par la Lune ou par d’autres planetes, s’appellent proprement occultations. Lorsqu’une planete, comme Vénus & Mercure, passe sur le Soleil, comme elle n’en couvre qu’une petite partie, cela s’appelle passage. Voyez Occultation & Passage.

Le mot éclipse vient du grec, ἔκλειψις, défaillance. Les Romains se servoient aussi du mot deficere, pour désigner les éclipses. (O)

L’ignorance de la Physique a fait rapporter dans tous les lieux & dans tous les tems, à des causes animées, les effets dont on ne connoissoit pas les principes ; ainsi les prêtres débiterent en Grece, que Diane étoit devenue amoureuse d’Endimion, & que les éclipses devoient s’attribuer aux visites nocturnes